
La justice turque a refusé, mardi, d'examiner un recours de l'opposition exigeant l'annulation d'une mesure de l'Autorité électorale dénoncée comme une possible source de fraude lors du référendum sur les pouvoirs du président Erdogan.
La justice turque a refusé d'examiner un recours déposé par l'opposition qui conteste la prise en compte d'urnes non scellées lors du référendum du 16 avril, a annoncé mardi 25 avril l'agence de presse Anatolie.
Le Conseil d'État, plus haute instance administrative de Turquie chargée de juger les contentieux publics, a estimé ne pas être compétent pour se prononcer en matière électorale. Le Parti républicain du peuple (CHP), qui a saisi le Conseil d'État la semaine passée, avait également demandé le report de la proclamation des résultats officiels du référendum qui a élargi les pouvoirs du président Recep Tayyip Erdogan dans l'attente que le contentieux soit réglé.
Ces résultats doivent être promulgués par le Haut conseil électoral (YSK) dans un délai de 11 à 12 jours après le scrutin. Les résultats officieux donnent une courte victoire du "oui" avec 51,4 % des voix. Une mission commune d'observateurs de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) et du Conseil de l'Europe avait estimé le 17 avril que le scrutin n'avait pas été "à la hauteur des critères" européens et souligné que la campagne s'était déroulée dans des conditions inéquitables favorisant le camp du "oui".
Ouverture d'une procédure de suivi
En parallèle, l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe (Apec) a ouvert mardi une procédure de suivi concernant la Turquie, en raison des nombreuses violations de l’État de droit et des droits de l’Homme constatées dans le pays.
Cette mesure, dont le pays a déjà fait l'objet entre 1996 et 2004, le soumet à un contrôle plus étroit du respect des engagements auxquels il a souscrit en adhérant au Conseil de l’Europe, organisme de défense des droits de l'Homme qui comprend 47 États membres dont 28 sont membres de l'Union européenne.
Régression démocratique
La résolution ouvrant officiellement cette procédure contre la Turquie a été approuvée par 113 voix, contre 45 et 12 abstentions. Pour justifier cette décision, l’Assemblée invoque la régression démocratique du pays qui s'est accentuée depuis le putsch manqué du 15 juillet dernier. Elle veut protester contre la levée de l’immunité de 154 parlementaires et l’arrestation de 12 d’entre eux, celle de plus de 150 journalistes ainsi que les purges qui ont touché quelque 150 000 agents de la fonction publique.
Elle "s’inquiète que l’état d’urgence [qui a suivi] serve non seulement à exclure des institutions étatiques les personnes impliquées dans le coup d’État, mais également à faire taire toutes les voix critiques et à générer un climat de crainte parmi les citoyens ordinaires et les universitaires, au sein des organisations non gouvernementales et des médias indépendants, au risque d’ébranler les fondations d’un État démocratique".
"Décision injuste"
Le ministère turc des Affaires étrangères a fermement condamné ce qu'il qualifie de "décision injuste" et estimé que la xénophobie et l'islamophobie "se propageaient de façon violente" en Europe.
"Décider de rouvrir la procédure de suivi contre la Turquie, suivant les recommandations de cercles malveillants de l'Apec, est une honte pour cette instance qui se revendique comme le berceau de la démocratie", estime le ministère turc dans un communiqué en ajoutant qu'Ankara n'aurait pas d'autre choix que de réexaminer ses relations avec le Conseil de l'Europe.
Avec Reuters et AFP