Pour la première fois de l'histoire de la Ve République, le candidat de la droite républicaine ne figurera pas au second tour de la présidentielle. Une mise au point s’impose chez les Républicains et elle s’annonce sanglante.
Dimanche soir, au QG de campagne de Les Républicains, François Fillon est longtemps resté aux abonnés absents. La défaite est cinglante pour l’ancien Premier ministre, qui arrive en troisième position avec 19,94 % des voix. D'autant plus qu’au lendemain de sa victoire triomphale à la primaire de la droite, et au vu de l'impopularité du gouvernement socialiste sortant, l’élection présidentielle s’annonçait "imperdable"…
À 20h40, le candidat éliminé dès le premier tour s’est exprimé pour reconnaître que "cette défaite est (s)a défaite". "Les obstacles étaient trop nombreux, trop cruels", a-t-il ajouté.
"On paie cher les affaires"
"C'est une défaite d'autant plus cruelle que nous aurions dû gagner. On paie cher les affaires", a lâché Laurent Wauquiez, vice-président du parti Les Républicains, dès l’annonce des premières estimations. Le mot est lâché. Fillon a été grandement fragilisé par les affaires judiciaires, après les révélations fin janvier du Canard enchaîné sur l'emploi présumé fictif de son épouse comme collaboratrice parlementaire, pour lequel la justice l'a mis en examen.
L’heure des règlements de compte n’a pas tardé à sonner. "Ce n'est pas la droite qui a perdu, c'est Fillon", tranche l'ancien ministre Eric Woerth. La députée Nadine Morano ne mache pas ses mots pour qualifier l'élimination des Républicains dès le premier tour : un "tremblement de terre", "une catastrophe", a-t-elle commenté en pointant "une responsabilité importante" de François Fillon. "Sur le terrain nous étions empêchés de faire campagne", a-t-elle également déploré. Du côté du QG de campagne de François Fillon, Antoine Mariotti, envoyé spécial de France 24 a évoqué "une réunion sanglante, qui a eu lieu vers 18h30", selon des sources au sein du parti les Républicains.
Le bureau politique du mouvement doit à nouveau se réunir lundi 24 avril pour debrieffer ce "séisme", selon les mots du sénateur-maire de Troyes François Baroin. "Les élus de droite et notamment du centre-droite ont été gênés tout au long de la campagne par le refus du candidat de répondre aux questions des journalistes sur les affaires, mais aussi par sa radicalisation sur certains thèmes de sa campagne", a ajouté Antoine Mariotti.
Le parti Les Républicains risque-t-il l’implosion ? Que va-t-il advenir du camp filloniste ? Contrairement à un certain Lionel Jospin au soir du 21 avril 2002, Fillon n’a pas annoncé de retrait définitif de la vie politique.
Les ténors du parti appellent à voter Macron
Pour le politologue du Centre de la vie politique française (Cevipof) Raymond Cayrol, "François Fillon a eu raison d’assumer pleinement la responsabilité de cet échec", en rappelant qu’il avait décidé début mars de maintenir sa candidature lors d’une conférence de presse, alors que son désistement était pressenti, après la grande manifestation du Trocadéro. À l’époque, plusieurs élus et membres de son équipe de campagne comme Thierry Solère avaient préféré lâcher Fillon, qui s'était engagé à se retirer en cas de mise en examen.
Pour l’heure, en vue du second tour, les ténors du parti, tels que François Baroin, Jean-Pierre Raffarin ou Nathalie Kosciusko-Morizet, ont affiché une certaine unité en appellant à voter pour Emmanuel Macron, tout comme François Fillon, même si le sarkoyste Laurent Wauquiez a, lui, appelé à voter contre Marine Le Pen tout en précisant qu'il "ne souhaitait pas travailler avec Emmanuel Macron".
En cas de large victoire d’Emmanuel Macron, le risque de division est là. "Aux législatives, ne vous dispersez pas, restés unis, groupé, la France en a besoin", a martelé François Fillon.