
Après avoir largement consolidé sa position de roi du e-commerce, Amazon tente désormais de se faire une place de choix dans le monde de la distribution physique. Voici à quoi ressemblera probablement le commerce de proximité à la sauce Jeff Bezos.
Amazon réalise sa première livraison par drone aux États-Unis, Amazon prodigue des conseils mode via son application mobile, Amazon livre nos courses sans minimum d’achat (Amazon Pantry)… Bientôt, Amazon viendra nous masser à domicile ? On exagère, mais ces derniers mois, le géant mondial du e-commerce aura lancé un nombre record de nouveaux services, allant de la prestation de proximité toujours plus poussée au simple gadget destiné à rendre l’achat ludique et addictif (on pense forcément à Amazon Dash, petits boutons connectés permettant de commander et de se faire livrer des sodas ou du gel douche d’une simple pression).
La firme est devenue l’an dernier le premier distributeur non alimentaire français
Même en France, où l’entreprise implantée depuis 16 ans semblait n’avoir jamais réussi à percer pour de bon, elle domine désormais le marché de la grande distribution, du haut de ses 8 milliards d’euros de chiffres d’affaires. D’après une étude de la banque Morgan Stanley, la firme est devenue l’an dernier le premier distributeur non alimentaire français devant les groupes Darty-Fnac, Leclerc ou Carrefour. Et elle est loin d’être en reste chez nos voisins européens : en Allemagne et au Royaume-Uni, elle capterait à elle seule un tiers de la croissance du commerce.
En bon mastodonte des nouvelles technologies, pas question pour Amazon de se satisfaire de ses acquis. Et puisque tout s’est jusqu’ici si bien passé pour elle dans le monde du e-commerce, elle n’a aujourd’hui plus aucune raison de ne pas lancer à l’assaut du commerce "physique", auquel reste attachée une grande partie des consommateurs, aussi bien français qu’américains. Et ce quitte à opérer un changement de stratégie pour le moins radical lorsque l’on sait qu’il y a encore cinq ans, l’ouverture de boutiques avec pignon sur rue était loin sur sa liste d’objectifs à atteindre.
Dans un article qui croise des témoignages de sources dites "proches du dossier", le New York Times fait justement l’état des lieux de ce grand chantier du commerce de proximité dans lequel s’est lancée la firme de Jeff Bezos. Ainsi, le quotidien nous rappelle qu’Amazon vient d’ouvrir sa cinquième librairie, Amazon Books, à Chicago, et qu’elle est en train d’en construire trois autres à travers les États-Unis. D’après certaines sources, l’entreprise serait également à la recherche d’emplacements de choix à Londres pour y installer ses rayons... Doit-on s’attendre à voir s’implanter dans les rues de Paris, Lille ou Marseille ces fameux Amazon Books ? Le scénario n’est pas à exclure.
Amazon Go, la supérette autonome
Sans surprise, Amazon a d’autres ambitions que celle de devenir notre nouveau libraire de quartier. Fin 2016, elle inaugurait à Seattle, où est implanté son siège social, sa toute première supérette. Baptisé Amazon Go, elle a la particularité de se passer totalement de caisses : en reconnaissant à l’entrée du magasin les smartphones sur lesquels doit être installée l’application Amazon Go, le client choisit ainsi ses produits – des boissons, des sandwichs ou encore des plats préparés dans des cuisines ouvertes – et ressort "sans payer", un peu comme après une course en Uber.
Le client choisit ainsi ses produits et ressort "sans payer"
Il n’a d’ailleurs pas besoin de "scanner" au fur et à mesure ses articles, Amazon ayant développé une technologie spécifique pour savoir quand l’un d’entre eux est retiré d’un rayon ou y est au contraire replacé (un mix de vision par ordinateur, de capteurs sensoriels et de deep learning). Une fois ses courses terminées, l’utilisateur reçoit (évidemment) son ticket "de caisse" sur son téléphone.
Mais que ceux qui ont prévu de partir à Seattle dans les jours à venir et de se lancer dans l’expérience du shopping algorithmique se ravisent : si ce premier magasin devait être ouvert au grand public "début 2017", il reste à ce jour réservé aux employés de la firme. Quoiqu’il en soit, avec Amazon Go, Amazon nous laisse probablement entrevoir la manière dont nous ferons nos courses demain.
Un autre modèle d’enseigne alimentaire devrait également voir le jour d’ici à 2018 : Amazon serait en passe de tester des drives, sous l’appellation AmazonFresh Pickup. Le site GeekWire affirme en effet avoir obtenu des documents officiels faisant état d’un accord entre Amazon et la ville de Seattle pour l’implantation d’une future boutique. Jusqu’à présent, et si cette information se confirme, AmazonFresh n’était qu’un service de livraison de produits frais et secs à domicile.
La réalité augmentée à la rescousse des secteurs faibles
La firme de Seattle pourrait également créer sa chaîne de boutiques de meubles et d’électroménager, deux secteurs où l’internaute a encore du mal à se lancer dans un achat sans avoir pu voir de ses propres yeux les produits. Mais l’information la plus intéressante reste sans doute celle selon laquelle la réalité augmentée pourrait également y être exploitée (plusieurs brevets déposés ces dernières années en lien avec cette technologique laissaient entendre les aspirations de la firme en matière d’AR) afin que les clients puissent imaginer le rendu d’un nouveau canapé ou d’une cuisine équipée dans leurs intérieurs respectifs.
Dernier projet passé en revue par le New York Times, qui affirme avoir eu accès à des documents internes faisant mention du concept : celui d’un plus grand espace d’approvisionnement, proche cette fois d’un supermarché, où les aliments frais seraient en libre-service tandis que les denrées moins périssables seraient stockées dans des entrepôts gérés par des employés.
Avec tous ces projets dans les tuyaux et la haut niveau de savoir-faire technologique dont dispose la firme, difficile de concevoir qu'Amazon ne gagnera pas son pari de devenir l'un des acteurs principaux du commerce, et non plus seulement du e-commerce.
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