
Alors que la trêve hivernale prend fin le 31 mars dans l'Hexagone, deux associations, la Fédération des acteurs de la solidarité et Emmaüs, interpellent le gouvernement sur le retour à la rue des sans-abri mais aussi des migrants.
À quelques semaines de la fin de la trêve hivernale, les associations s’inquiètent “de la fermeture annoncée (…) de milliers de places d’hébergement” qui provoquerait le retour à la rue de nombreux sans-abri et migrants, notamment à Paris où le centre humanitaire est saturé. Dans un communiqué publié mercredi 1er mars, la Fédération des acteurs de la solidarité (Fnars) – qui regroupe 870 associations – et Emmaüs solidarité jugent “le contexte très préoccupant”. Il mêle à une “extrême saturation” du 115, le numéro d’urgence réservé aux sans-abri, une “diminution inquiétante des solutions d’hébergement” pour les migrants.
La trêve hivernale, une solution provisoire
Chaque année, la période dite de “trêve hivernale” qui s’étend du 1er novembre au 31 mars permet d’empêcher l’expulsion d’un locataire qui n’aurait pas payé à temps son loyer. Pendant cinq mois, le propriétaire du logement ne peut donc pas demander à son occupant de quitter les lieux.
L’État profite aussi de cette période pour ouvrir des places d’hébergement afin de garantir la mise à l‘abri des personnes à la rue. Cet hiver, le gouvernement a créé 10 000 places en plus des quelque 122 000 ouvertes toute l’année. Mais les associations s’inquiètent, ne sachant pas “combien de places seront pérennisées sur les territoires et quelles seront les solutions proposées aux personnes sans-abri en cas de fermeture”.
Elles tirent la sonnette d’alarme. La Fnars et Emmaüs solidarité assurent que plusieurs centaines de personnes ont déjà été remises à la rue dans les grandes villes comme Lyon, Bordeaux ou Lille, suite à la fermeture de gymnases et de salles collectives.
Cité par l’AFP, Éric Pliez, président du Samu social de Paris se dit “inquiet et furieux” de la situation dans la capitale : “Plus de 600 places ferment intramuros d’ici fin juin, qui concernent 400 personnes en famille, parmi lesquelles 150 enfants. Au total, 1 600 places vont fermer d’ici la fin de l’année et les ouvertures ne compenseraient que la moitié de ces places. Il faut mettre le turbo !”, insiste-t-il.
Alerte par @EMMAUSolidarite et la @FedeSolidarite sur la réduction des capacités d'hébergement, restons vigilants ! https://t.co/oJOUUnZ2xx https://t.co/XCLNH9J0T9
— EMMAÜS Solidarité (@EMMAUSolidarite) 1 mars 2017Fermeture prochaine de 2 500 places en CAO
Tous les ans, la fin de la trêve hivernale préoccupe les associations mais le phénomène se complique un peu plus cette année par la situation des migrants à Paris. Le centre humanitaire de La Chapelle, qui a ouvert en novembre, est encombré, forçant des dizaines de migrants à dormir dans la rue et à faire appel au numéro d’urgence, le 115. Le centre, qui a permis la prise en charge de 6 000 personnes, connaît en effet depuis mi-février une saturation du fait d’une “insuffisance de places d’hébergement disponibles”, toujours selon le communiqué, ce qui bloque les orientations selon les associations.
Et la situation va s’aggraver par “la fermeture au plan national de 2 500 places en CAO (centre d’accueil et d’orientation) à partir du mois d’avril notamment dans des centres de vacances”, censés servir durant les vacances scolaires. Pourtant, dans un communiqué datant du 30 janvier, le ministère de l’Intérieur assurait que “les CAO resteront ouverts aussi longtemps qu’il le faudra”.
Dans une lettre envoyée le 22 février aux ministres de l’Intérieur, Bruno Le Roux, et du Logement, Emmanuelle Cosse, Paul Duprez, président d’Emmaüs solidarité qui gère le centre de La Chapelle, considère que “le fonctionnement actuel deviendra, si la situation n’est pas débloquée, rapidement intenable”.
Contacté par France 24, Paul Duprez n’a pas de doute sur l’intention du gouvernement, mais estime que les solutions trouvées auparavant doivent perdurer. “Je demande au gouvernement de respecter ses engagements. La volonté doit être concrétisée par des actes”, demande-t-il, car le risque majeur selon lui serait de voir se reformer des campements de rues dans la capitale. “Si aucun correctif immédiat n’est apporté, ces campements ne peuvent que renaître et s’étendre”, signale Paul Duprez.