Les dirigeants européens se retrouvent à Malte vendredi pour parler crise migratoire et avenir de l’Europe. Deux dossiers épineux à l’heure du post-Brexit, des arrivées incessantes de migrants, et de l'hostilité de Trump face au Vieux continent.
C’est un sommet sous le signe de la nervosité. Vendredi 3 février, lors de la grand-messe de l’Union européenne (UE), à Malte, les dirigeants des Vingt-huit vont devoir s’atteler à une double tâche bien compliquée : afficher l’unité de l’Europe tout en essayant de trouver des solutions à la crise migratoire, le tout, alors que l’UE traverse une grave zone de turbulence. Car les dossiers s’accumulent sur les bureaux de Bruxelles…
Le Royaume-Uni a voté cette semaine le déclenchement effectif de sa sortie de l’Union européenne. L’espace Schengen, qui promettait la libre-circulation sur le territoire européen, ne cesse de se déliter : l’Autriche, l’Allemagne, la Suède, le Danemark ont rétabli des contrôles à leurs frontières. Et outre-Atlantique, la nouvelle administration de Donald Trump se positionne sur une ligne clairement anti-immigration et anti-Europe. Difficile pour Bruxelles, dans ces conditions, d’afficher un visage serein.
Le dossier libyen
Si la tendance n’est pas à l’accueil des migrants, il est pourtant un domaine où les Vingt-huit semblent d’accord : agir sur l’axe Libye/UE et mettre fin à l’immigration clandestine. "Il est temps de fermer la route allant de la Libye à l’Italie", a clamé haut et fort, jeudi, le président du Conseil européen Donald Tusk à la veille du sommet. Cette route, plus prisée que jamais par les migrants d’Afrique subsaharienne notamment, inquiète l’UE, avec l’arrivée du printemps, qui marque traditionnellement une reprise du flux migratoire. Malte, qui assure la présidence tournante de l’UE, craint une nouvelle crise humanitaire.
Mais fermer cette route maritime signifie que l’UE doit conclure un accord avec la Libye, un État instable, coupé en deux, où le gouvernement reconnu par la communauté internationale n’a même pas le contrôle de l’intégralité de son littoral. Un accord bilatéral – s’il existe un jour –, ne ressemblera en rien à l’accord Ankara-UE, signé en mars dernier, qui a permis de faire baisser drastiquement les arrivées illégales en Grèce.
Le dossier humanitaire
Quelles que soient les décisions qui sortiront de ce sommet, l’Europe doit agir rapidement. Des milliers de migrants patientent – et meurent – dans des camps de fortune en Serbie, en Grèce, en Hongrie dans des conditions précaires et indignes.
Autre urgence : les sauvetages en Méditerranée. Les chiffres des traversées font froid dans le dos : en 2016, plus 4 500 personnes ont péri noyées.
L’an dernier, la péninsule italienne de Lampedusa a recueilli plus de 180 000 migrants. La situation devient ingérable pour ce pays en ligne de front, symbole de l’échec d’une politique de répartition européenne. Et les conséquences sont parfois dramatiques : le 27 janvier, un réfugié gambien s’est noyé dans le Grand Canal de Venise sous les yeux et les insultes des promeneurs.
Le dossier américain
Face au protectionnisme prôné outre-Atlantique et à la nouvelle politique américaine, quel rôle doit endosser l’UE sur le nouvel échiquier mondial ? Donald Tusk a vivement pris à partie Washington en début de semaine, qualifiant d’"inquiétantes" les premières décisions prises par le nouveau président américain qui remet en cause, à ses yeux, sept décennies de politique étrangère américaine.
Bruxelles craint surtout la ligne politique du gouvernement de Trump, qui ne s’est jamais posé en "ami" de l’Europe et n’a pas manqué une occasion de tirer à boulets rouges sur le Vieux continent – en annonçant notamment son démantèlement prochain. À peine élu, le nouveau chef de l’État américain avait d’ailleurs reçu à la Trump tower Nigel Farage, l'ex-leader britannique du parti Ukip, farouchement eurosceptique.