En meeting à La Villette, François Fillon a balayé les accusations en lien avec l’emploi présumé fictif de son épouse Penelope Fillon. Il a également promis de sortir la France du "chaos".
Le grand meeting pour lancer la campagne de François Fillon et afficher une droite unie autour de sa candidature a bien eu lieu. Mais le rassemblement de La Villette, dimanche 29 janvier, a été transformé, l’espace d’un instant, en un comité de soutien au couple Fillon de plusieurs milliers de personnes (quelque 15 000 selon les organisateurs).
Après plusieurs jours durant lesquels l’ancien Premier ministre de Nicolas Sarkozy a dû répondre aux informations du Canard Enchaîné sur l’emploi présumé fictif de son épouse Penelope Fillon, ce meeting lui a permis de lancer sa contre-attaque.
"Depuis le début, Penelope est à mes côtés, avec discrétion, avec dévouement. J’ai construit mon parcours avec elle. Nous n’avons rien à cacher", a-t-il affirmé, sous les yeux de sa femme, assise au premier rang, et sous les cris du public qui scandait des "Penelope ! Penelope ! Penelope !".
"À trois mois de l’élection présidentielle, comme par hasard, on construit un scandale. À travers Penelope, on cherche à me casser. Moi je n’ai peur de rien, j’ai le cuir solide. Si on veut m’attaquer, qu’on m’attaque droit dans les yeux, mais qu’on laisse ma femme tranquille", a ajouté le candidat Fillon, alors que le public se mettait à répéter à l’envi "Fillon président ! Fillon président ! Fillon président !".
Affaire Penelope : des éléments de langage mis au point
Ceux qui, parmi ses soutiens et ses électeurs potentiels, attendaient une clarification et davantage d’explications n’ont pas eu gain de cause : François Fillon a préféré ne pas s’exprimer en longueur sur le sujet. Une réunion avec les principaux responsables de son équipe de campagne, parmi lesquels Patrick Stefanini, Bernard Accoyer et Bruno Retailleau, avait servi dans la matinée, selon un membre du parti Les Républicains, à mettre au point les éléments de langage à répéter en boucle dans les médias : "accusation abjecte et infondée", "emploi légal", "probité de François Fillon". Pour le candidat, il s’agit désormais d’aller de l’avant et de ne surtout pas évoquer d'éventuel plan B.
Cette stratégie ne devrait pas avoir trop de mal à passer auprès de ses électeurs. À La Villette, une grande majorité du public reprochait à la presse de monter en épingle l’affaire Penelope. "Il s’agit d’une machination faite pour abattre notre candidat", a ainsi regretté Nadine, 72 ans, une affiche "Je suis Penelope" à la main.
"C’est une affaire qui est montée de toutes pièces, qui est là pour déstabiliser notre candidat et lui enlever toute crédibilité, a affirmé de son côté Antoine, 19 ans. Je trouve ça assez minable et dommage. C’est quelqu’un de très intègre, il n’a pas arrêté de le montrer. C’est une machination."
Fin des 35 heures, baisse du nombre de fonctionnaires : François Fillon déroule son programme. Face à ce public conquis et devant presque toutes les figures de la droite, parmi lesquelles Alain Juppé, François Baroin, Xavier Bertrand ou Valérie Pécresse, le candidat Fillon a donc pu dérouler son discours comme prévu.
Affirmant s’adresser "à tous les Français" et assurant qu’il "n’y a pas un peuple de droite contre un peuple de gauche", François Fillon a fait le constat d’un "pays défait, profondément défait, dans son image et dans l’estime qu’il a de lui-même", d’un pays "plongé dans une crise morale sans précédent" et d’un pays "sans chef".
Pour y remédier et pour faire face au "monde nouveau", symbolisé par la "révolution numérique", la "mutation écologique" et "l’islam radical", le vainqueur de la primaire de la droite et du centre a de nouveau exposé le programme qui l’a fait gagner en novembre.
"Notre seule marge de manœuvre réside dans notre capacité à nous rassembler, à travailler plus, à travailler tous", a-t-il affirmé, promettant la baisse des charges sur le coût du travail, la fin des 35 heures et la fin de la bureaucratie.
Au sujet des fonctionnaires, François Fillon a réaffirmé sa volonté de réduire leur nombre de 500 000 postes, mais il a tenu à préciser qu’il était "l’ennemi de la bureaucratie" et non "pas celui des fonctionnaires".
"À gauche, on rêve des 32 heures et d’un revenu universel : c’est l’assistanat universel"
François Fillon s’en est également pris à ses concurrents à l’élection présidentielle, réunissant Jean-Luc Mélenchon, Benoît Hamon, Manuel Valls, Emmanuel Macron et Marine Le Pen sous la même étiquette. "Il y a plus de cinquante ans André Malraux disait : il y a quatre gauches, dont l’extrême-droite. Il avait raison. Nous y sommes", a-t-il déclaré.
Avant même les résultats du second tour de la primaire de la gauche, le candidat Les Républicains semble d’ailleurs avoir acté la victoire de Benoît Hamon. "À gauche, on rêve des 32 heures et d’un revenu universel : c’est l’assistanat universel", a-t-il lancé face à un public toujours prêt à huer les socialistes. "Ils nous expliquent qu’il faut aller toujours plus loin à gauche. Plus la réalité les met en déroute, plus ils ont foi dans leurs dogmes. Ils promettent des milliards de dépenses. Ils proposent de travailler moins et de rêver plus. Ils n’ont rien compris", a-t-il ajouté. Pour François Fillon, "les conservateurs, c’est eux", alors que sa candidature représente "le parti du mouvement".
Avec ce meeting, François Fillon est désormais prêt, selon un proche, à entrer dans le vif de la campagne. La question est de savoir si ce discours passera auprès des Français. Déjà critiqué pour la dureté et la radicalité de son programme, l’ancien député de la Sarthe, qui faisait figure, il y a deux mois, de grand favori pour l’Élysée, doit aujourd’hui composer avec l’affaire Penelope.
"Cette affaire est angoissante, désespérante et décevante, reconnaissait ainsi Daniel, 70 ans. Ça ne remettra pas en cause mon vote pour François Fillon, mais je crains que ça ne remette en cause celui du reste de la France. Je suis extrêmement perplexe." Des propos peu représentatifs de ceux tenus par le public de La Villette, dimanche après-midi, mais qui traduisent davantage l’inquiétude qui règne sans doute désormais dans le camp Fillon.