Inconnu du grand public avant ce premier débat des primaires de la gauche, le candidat de l'Union des démocrates et écologistes, Jean-Luc Bennahmias, commente sa prestation télévisée jugée loufoque par de nombreux commentateurs.
Au lendemain du premier débat entre les sept candidats aux primaires initiées par le Parti socialiste en vue de l'élection présidentielle, France 24 fait réagir Jean-Luc Bennahmias, candidat de l'Union des démocrates et écologistes (UDE), l’un des "petits candidats" de cette joute télévisée.
Malgré une prestation jugée décousue et déconcertante par de nombreux commentateurs, selon un sondage Harris Interactive (réalisé auprès de 1 002 personnes) publié vendredi 13 janvier, le candidat écologiste est tout de même parvenu à convaincre 8 % des personnes interrogées et 19 % des sympathisants de gauche.
Ancien des Verts et du MoDem, ex-conseiller régional et ancien député européen, il revient sur cette première joute à sept et sur les limites de cette formule télévisée "trop courte et pas assez thématique" à ses yeux.
France 24 : Votre prestation a été particulièrement remarquée, voire même raillée, les gens se demandent si vous prenez ces primaires de la gauche au sérieux. Pourquoi avoir adopté cette posture pendant le débat ?
Jean-Luc Bennahmias : Je ne prends aucune posture, je suis moi-même. Des gens m’ont reproché d’être décontracté, de ne pas mettre de cravate ou de tutoyer les autres candidats et de les appeler par leur prénom. Mais je ne porte jamais de cravate, même quand je vais rendre visite à François Hollande à l’Elysée, même quand je représente la France à la Cop21. La cravate n’est pas obligatoire au Parlement européen, ça tombe bien ! Je sais que cela choque certaines personnes, mais je ne suis pas un provocateur, je suis juste moi-même.
Je ne joue pas non plus le jeu de ceux qui font comme si ils ne se connaissaient pas. Mais dans quelle société vit-on ? Moi je n’évolue pas dans une fiction. Nous nous ne connaissons pas cœur ! Je ne vais pas faire semblant, alors que je connais Manuel Valls depuis qu’il a 15 ans. J’ai 62 ans et je suis le plus vieux de cette primaire, je vous rappelle.
Prenez-vous au sérieux votre candidature ?
Quand bien même nous, les candidats, prendrions ce débat au sérieux, il semble que la population en général, elle, ne le prend pas au sérieux. Quand on voit l’audimat de TF1 sur ce premier débat [3,8 millions de téléspectateurs, soit 18,3 % de part d'audience pour la chaîne] il y a de quoi se poser des questions. À quoi cela sert-il de jouer la crédibilité quand on a des citoyens qui pensent qu’on ne passera pas le premier tour de la primaire. Une primaire sert surtout à débattre et faire des propositions.
Aucun des candidats de la primaire de gauche ne sera le prochain président de la République, alors moi je propose une grande alliance, allant de Nathalie Kosciusko-Morizet à Jean-Luc Mélenchon en vue d’avoir autre chose en France qu’une perspective ultraréactionnaire ou d’extrême droite. Le second tour de l’élection présidentielle opposera François Fillon à Marine Le Pen, et je ne m’y résous pas. Nous avons la possibilité de constituer une majorité progressiste, qui ne peut pas être crédible si elle ne se borne qu’à la gauche stricto sensu.
Vous avez nié hier vouloir poster des "vigiles pour immobiliser d'éventuels terroristes", proposition pourtant indiquée sur votre site et reprise par le journaliste Gilles Bouleau à l’antenne. Cette mesure s’inscrit-elle dans votre programme ?
Je dispose d’un budget de 25 000 euros pour ma campagne, mon équipe est composée essentiellement de professionnels bénévoles. Je n’ai pas le temps d’aller voir mon site pendant que je suis à la fois au four et au moulin. Mon équipe m’a présenté [en septembre] une version bêta du site avec des formules prétextes tirées de mon livre. Je n’ai pas vérifié tous les textes présentés au départ.
Cette mesure est anecdotique. Elle ne répond pas à un centième de la lutte contre le terrorisme. S’il y avait une proposition à faire ce serait d’améliorer la surveillance des réseaux sociaux, qui ont largement contribué au développement du terrorisme.
Le déroulement de ce premier débat va-t-il changer votre stratégie ? Comment comptez-vous rebondir dimanche 15 janvier ?
Dimanche prochain, je serai dix fois moins stressé que je ne l’étais hier. Désormais les présentations sont faites, j’espère que nous pourrons répondre directement aux questions sans avoir à passer par de longues introductions.
J’ai demandé à mon directeur de campagne de discuter avec les chaines de télévision pour la préparation du prochain débat, car deux minutes chacun pour répondre aux questions, c’est trop court. Il faudrait revoir la formule. Le débat devrait s’articuler autour de deux ou trois thématiques traitées en profondeur, sans quoi les gens décrochent. Si j’ai servi à quelque chose hier, c’était au moins d’animer un peu l’émission ! À mon goût, le revenu universel, le pouvoir d’achat et l’emploi auraient mérité qu’on y passe un peu plus de temps. L’Union européenne a manqué au débat, les questions écologiques et de transition énergétique ne sont pas intervenues une seule fois, sauf dans mes propos et ceux de François de Rugy [cofondateur du parti Ecologistes!]. Il manquait aussi des questions de société, comme l’usage du cannabis et ses dérivés, la parité ou la place du handicap, qui n’ont pas été évoquées.