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Le président Erdogan douche les espoirs d'un accord sur la réunification de Chypre

Les discussions visant à résoudre le différend chypriote se sont achevés, vendredi à Genève, sur une fausse note. Le président turc Recep Tayyip Erdogan s'est montré en effet inflexible sur la question du retrait total des troupes turques de l'île.

Les pourparlers de paix organisés à Genève par l'ONU se sont terminées tôt vendredi matin, avec l'engagement des dirigeants des deux communautés chypriotes, soutenus par la Turquie, la Grèce et la Grande-Bretagne, à poursuivre leurs efforts afin de réunifier l'île divisée depuis quarante-deux ans.

Toutefois les déclarations, vendredi, du président chypriote Nicos Anastasiades, suivis d'une réplique immédiate de son homologue turc Recep Tayyip Erdogan, ont clamé les ardeurs des plus optimistes.

"Nous avons tracé une voie qui crée des espoirs" en vue d'un accord, a annoncé Nicos Anastasiades aux journalistes à l'issue de quatre jours d'intenses discussions avec le dirigeant chypriote-turc et des ministres grec, turc et britannique à Genève.

Mais "notre position reste (…) le retrait de l'armée turque", a-t-il ajouté, en référence aux quelque 30 000 soldats stationnés au nord de l'île depuis 1974.

"Hors de question" de retirer toutes les troupes turques

Le président turc a répliqué vendredi que le retrait total des troupes turques de Chypre, était "hors de question". Avant d'ajouter que la République turque de Chypre du Nord (RTCN), uniquement reconnue par Ankara, "travaille intensément et met en avant sa sincérité", mais que les République de Chypre et Athènes "continuent d'avoir des attentes différentes".

Il a également évoqué des différends sur la présidence tournante d'une Chypre fédérale divisée en deux entités – chypriote grecque et chypriote turque. Indiquant qu'Ankara n'était pas d'humeur à faire des concessions, il a ajouté : "nous leur avons dit (à Genève) que personne ne devait rien attendre de nous."

Jeudi, le nouveau secrétaire général des Nations Unies, Antonio Guterres, s’était pourtant montré optimiste. "Vous ne pouvez pas attendre de miracles (...). Il va falloir être patient. Nous ne cherchons pas un bricolage rapide, nous cherchons une solution solide et durable pour Chypre", avait-il souligné.

Il s'était déclaré certain de la détermination des participants à faire "l'ultime effort" pour trouver une solution. En revanche, aucune date n'a été fixée pour que les garants du processus – les ministres des Affaires étrangères grec, turc et britannique – se voient de nouveau.

Mercredi soir, le président chypriote grec Nicos Anastasiades et le dirigeant chypriote turc Mustafa Akinci ont pour la première fois échangé des cartes sur leur vision du futur État fédéré.

L'île de Chypre est divisée depuis l'échec d'un coup d'État visant à rattacher Chypre à "la Grèce des colonels" en 1974 et l'invasion de l'armée turque au nord. Le secteur grec, qui compte 800 000 habitants, et une partie turque, qui regroupe environ 220 000 habitants, séparées par une ligne de cessez-le-feu.

"Conférence historique"

La réunion de jeudi, qualifiée de "conférence historique", car inédite dans son format multilatéral, avait pour objectif de discuter uniquement des garanties de sécurité de la future fédération de Chypre, avec les "garants" actuels : Grèce, Turquie et Royaume-Uni, l'ex-puissance coloniale.

"Les participants ont reconnu qu'il est temps que les négociations se concluent (...). C'est une opportunité historique qu'il ne faut pas rater", a souligné un communiqué de l'ONU à l'issue de la journée de négociations.

Bien que largement minoritaires, les Chypriotes turcs contrôlent actuellement 37 % de l'île. Selon les médias chypriotes, la partie grecque serait disposée à leur accorder 28,2 % du futur État, alors que la partie turque en réclamerait 29,2 %.

Selon le porte-parole du gouvernement chypriote-grec, Nikos Christodoulides, la carte présentée par la partie turque respecte la limite des 29,2 %. "Mais il y a des parties et des aspects qui ne nous satisfont pas, en d'autres termes, ce n'est pas satisfaisant en tant que résultat final", a-t-il précisé.

Jeudi soir, quelque 200 Chypriotes grecs se sont rassemblés à Nicosie pour protester contre la présence de troupes turques à Chypre et réclamer leur "droit au retour" sur les propriétés qu'ils ont dû quitter, selon un journaliste de l'AFP.

D'autres rassemblements ont eu lieu cette semaine à Nicosie, cette fois pour soutenir les efforts de paix.

Avec AFP et Reuters