
L'ancien Premier ministre, candidat à la primaire de la gauche, a défendu jeudi dans "L'émission politique" son projet présidentiel, affirmant avoir "changé" pour justifier l'inflexion à gauche de son programme par rapport à ses positions passées.
Pendant plus de deux heures, Manuel Valls a tenté de convaincre qu'il pouvait être le meilleur candidat à la primaire de la gauche. L’ancien Premier ministre, souvent sur la défensive, a dû assumer son bilan aux côtés de François Hollande. Celui "qui veut incarner une gauche réformiste, qui refuse le libéralisme mais qui essaie d'avancer en même temps" a été interrogé sur la cohérence entre ses positions passées et nouvelles.
Le candidat au "cœur des progressistes"
Finies les propositions droitisantes du "Monsieur 5 %" de la primaire de 2011 : en 2017, il ne s'agit plus de "déverrouiller" les 35 heures, de supprimer l'impôt sur la fortune ni même de "sortir de la logique de la dépense publique". La gauche et la social-démocratie en France et dans le monde ont par le passé "trop cédé" à "la puissance du marché, à des forces de l'argent, au libéralisme", a estimé l'ancien Premier ministre. Et d’ajouter : "bien sûr que j'ai changé ! Je n'ai pas changé de conviction, mais j'ai changé, j'ai mûri", a insisté l'ex-locataire de Matignon, niant tout opportunisme.
Manuel Valls assume désormais "le niveau de dépenses publiques dont les Français ont besoin", prône un "revenu décent" de plus de 800 euros, ou encore un salaire et un taux d'impôt sur les sociétés minimum dans l'Union européenne. "J'essaie d'incarner une gauche réformiste, qui refuse le libéralisme mais qui essaie d'avancer en même temps", a-t-il dit.
Le 49-3
C’est la volte-face la plus surprenante de son programme : après avoir eu recours à six reprises en trois ans à Matignon à l’article 49-3, notamment pour la loi Macron et la loi travail, Manuel Valls entend supprimer de la Constitution cette disposition qui permet l'adoption de projets de loi sans vote. Il souhaite néanmoins la cantonner aux textes budgétaires. "Je ne suis plus Premier ministre, je réfléchis à l'avenir. Et notamment sur la réponse à apporter à la crise démocratique", s’est-il justifié avant d’ajouter : "On m'a imposé le 49-3", rejetant ainsi la responsabilité sur les frondeurs socialistes.
Le voile
Il y a quelques mois, Manuel Valls qualifiait le voile d'"asservissement de la femme". Interpellé sur cette question par une jeune entrepreneur diplômée de l'École normale supérieure qui se définit comme "musulmane et féministe", il a défendu sa ligne en se disant lui-même "féministe" mais inquiet d'une "mode" d'un "foulard revendiqué". "Qu'est-ce que c'est cette idée que le visage, que le corps des femmes, serait impudique (...) Vous êtes libre de porter ce voile, mais vous savez parfaitement ce qui se passe aujourd'hui dans certains quartiers", a-t-il rétorqué à son interlocutrice voilée.
Logements sociaux
Manuel Valls a présenté une nouvelle proposition en annonçant souhaiter la création de 40 000 nouveaux logements sociaux destinés en priorité aux jeunes précaires. Quelque 109 000 logements sociaux ont été construits en France en 2015, en progression de 2,3 %.
La Russie
Pas de changement de position sur ce dossier. "La Russie est une grande nation avec une grande histoire", a rappelé Manuel Valls. "Elle doit assumer ses responsabilités de grande puissance, et d'abord en Syrie". "Il ne faut pas lever les sanctions contre la Russie" a-t-il dit.
Sur le dossier syrien, "nous savons que, pour le futur de la Syrie, la présence de Bachar el-Assad sera un obstacle", a indiqué Manuel Valls, qui a estimé qu'il fallait être "pragmatique et l'inviter à la table des négociations".
Dans cette campagne réduite à quatre semaines, l'ex-Premier ministre a choisi la stratégie de l'omniprésence. Outre de nombreuses apparitions médiatiques, il fera un déplacement par jour, hors débats télévisés. Après Liévin dimanche, des réunions publiques sont prévues à Rennes le 16 et à Limoges le 18 janvier.