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Le New York Times a annoncé que ses applications iOS en chinois et en anglais avaient été retirées de l’App Store chinois par Apple sur demande de Pékin. Aucune raison précise pour cette censure n’a été fournie.
Plus de New York Times pour les possesseurs chinois d’iPhone. Apple a obéi à l’injonction de Pékin de retirer de l’App Store les applications en anglais et en chinois du quotidien américain, ont révélé les responsables du journal mercredi 4 janvier. La marque à la pomme n’avait jusqu’à présent jamais censuré publication aussi prestigieuse sur demande des autorités chinoises.
Contacté par le New York Times, le géant de Cupertino a cité des "violations de la réglementation locale" pour justifier sa décision de faire disparaître dès le 23 décembre l’une des dernières façons d’accéder au quotidien américain sans avoir recours à des moyens techniques détournés pour braver la censure chinoise. La vente du journal et son site sont interdits en Chine depuis 2012, après la publication d’une enquête sur la fortune amassée par l’ancien Premier ministre Wen Jiabao.
Règles vagues et floues
Ni les autorités chinoises ni Apple n’ont précisé quelles règles avaient été enfreintes. Un flou qui "complique considérablement la tâche du New York Times de faire appel ou contester la décision chinoise", regrette Farzana Aslam, directrice associée du Centre de droit public comparé de l’Université de Hong Kong, interrogée par le New York Times dans son article pour dénoncer la décision de la marque à la pomme.
Pékin a mis en place en juin 2016 un dispositif pour interdire les applications qui permettraient de "mettre en danger la sécurité nationale, l’ordre social ou [qui] violeraient les droits et intérêts de tiers". Comme si cette définition n’était pas suffisamment vague, le législateur a ajouté qu’une application ne pouvait pas non plus "publier du contenu prohibé".
Le flou entourant son éviction de l’App Store en Chine n’a pas empêché le New York Times d’avoir son idée sur les raisons de cette nouvelle sanction. Quelques jours auparavant, le journal avait contacté le gouvernement au sujet d’un article à paraître sur les milliards de dollars d’avantages fiscaux offerts par Pékin à Foxconn, le propriétaire de l’usine-ville (entre 500 000 et 700 000 ouvriers) de fabrication d’iPhone. La veille de l’expulsion de l’App Store, le quotidien avait publié un article décrivant une vidéo anti-occidentale promue en ligne par des responsables des services chinois de sécurité.
Deux contenus susceptibles de mettre le gouvernement dans l’embarras ont-ils suffi pour convaincre Pékin de demander à Apple de sévir ? Difficile à dire en l’absence de précision officielle. Difficile aussi de savoir à quel point le groupe américain a résisté à la pression chinoise.
Pour rappel, en 2016, Tim Cook, le PDG d’Apple, s’était publiquement opposé aux demandes des autorités américaines de lui fournir un moyen de pirater l’iPhone de l’un des auteurs de la tuerie de San Bernardino. Il avait alors fait valoir la nécessité de protéger la vie privée des utilisateurs contre les risques d’abus de la police. Le moins que l’on puisse dire est que le patron du groupe a été beaucoup plus discret sur la nécessité de protéger en Chine le droit à l’information.
Intérêts économiques
Apple n’est certes pas le seul groupe américain à avoir satisfait à des demandes chinoises qui pouvaient paraître contraires à des principes défendus par les géants de la Tech en Occident. Yahoo! s’est rendu célèbre pour avoir fourni à Pékin, en 2004, des e-mails reçus par des dissidents chinois qui utilisaient sa messagerie. Facebook a élaboré, d’après une enquête de Reuters en novembre 2016, un outil permettant de supprimer des messages selon la zone géographique où se trouve l’utilisateur : une arme de censure massive qui pourrait aider Pékin à autoriser le réseau social en Chine.
Tous ces mastodontes du Web sont soupçonnés d’avoir cédé pour ne pas mettre en péril leurs intérêts économiques dans la première puissance asiatique. La Chine est le troisième plus important marché d’Apple et lui a rapporté 8,8 milliards de dollars de recettes au quatrième trimestre 2016, rappelle le quotidien britannique The Guardian.
Mais que les fans chinois du New York Times se rassurent : le quotidien a souligné, un rien désabusé, que son application de mots croisés était toujours disponible sur l’App Store.