Considéré comme le président le plus guerrier de la Ve République, François Hollande a enregistré, sur le terrain militaire, quelques succès. Mais il a également dû opérer plusieurs volte-face. Bilan de quatre ans et demi d’opérations militaires.
Serval au Mali en janvier 2013, Sangaris en Centrafrique en décembre de la même année, Chammal en Irak en septembre 2014 puis en Syrie en septembre 2015… Plus qu’aucun autre président de la Ve République, François Hollande a enchaîné les opérations militaires à un rythme effréné.
Une posture pour le moins inattendue venant d'un responsable politique qui n'avait jamais manifesté d'appétence particulière pour le monde de la guerre. "François Hollande a découvert à l’Élysée l’international et le monde militaire, commente Armelle Charrier, journaliste de France 24, spécialiste des questions internationales. Avant d’être élu président de la République, il était un homme politique qui avait eu des mandats en Corrèze, qui avait été premier secrétaire du Parti socialiste, mais qui n’avait pas eu de ministère et n’était pas connu pour aimer les voyages à l’étranger."
Alors que le président français a annoncé renoncer à se porter candidat à sa propre succession, retour sur le bilan d'un "chef de guerre" qui a été contraint de le devenir.
• Mali
Devant la montée en puissance des jihadistes au Sahel, François Hollande engage en quelques heures, le 11 janvier 2013, l'armée française au Mali sous le nom de l’opération Serval. En moins de trois mois, les jihadistes sont mis en déroute et leur sanctuaire nord-malien anéanti. "Hollande qu'on accuse souvent de procrastination, d'hésitation a réagi vite et bien. L'opération est un succès militaire", analyse auprès de l’AFP Pascal Boniface, directeur de l'Institut des relations internationales et stratégiques (Iris).
Régulièrement critiqué en France pour son indécision, l’intervention au Mali fait quelque temps oublier sa cote de popularité déjà alarmante. "Je vis la journée la plus importante de ma vie politique", lâche-t-il le 2 février 2013 à Tombouctou, qui l’accueille en libérateur. À ce moment-là, rappelle Armelle Charrier, "il se rend compte que l’étranger et l’armée peuvent lui amener ce costume de chef de guerre, qu’il va aussi endosser parce que les choses sont compliquées pour lui en politique intérieure et que cela peut lui permettre de redorer son image et celle de la France."
Mais trois ans plus tard, l'image est plus trouble : l'armée française est toujours au Mali - l'opération antiterroriste, renommée Barkhane, a été élargie à cinq pays du Sahel - les accords de paix signés en 2015 peinent à se concrétiser et les jihadistes, à défaut d'avoir retrouvé leur force de frappe initiale, continuent de faire parler d'eux à chaque attaque contre les forces de l'ONU ou maliennes.
• Syrie
En août 2013, François Hollande s'apprête à "punir" le régime du président syrien Bachar al-Assad, accusé d'avoir utilisé des armes chimiques contre son peuple. Mais le dirigeant français doit se raviser après la volte-face à la dernière minute de son homologue et allié américain, Barack Obama, qui renonce à le suivre.
Sur le dossier syrien, François Hollande "veut penser que la démocratie existe dans ce pays et qu’il faut parvenir à la faire émerger. Ce qui implique qu’il faut combattre Bachar al-Assad. Mais la France se trouvera très vite esseulée, certains lui reprochant une position beaucoup trop rigoriste", rappelle Armelle Charrier.
Paris est donc contraint d’opérer un virage. "Au mot d’ordre de la chute du régime, fil rouge de la politique étrangère française depuis le début du soulèvement anti-Assad, en 2011, succède une approche beaucoup plus attentiste, calquée sur l’attitude américaine, qui privilégie l’endiguement de la crise et la lutte contre le terrorisme jihadiste", écrit Le Monde en octobre 2015.
Menacée par l’organisation État islamique (EI) sur son territoire, la France entend désormais cibler les bastions du groupe jihadiste dans le nord de la Syrie. Fin septembre 2016, les avions français, alors engagés en Irak dans le cadre de la coalition internationale anti-jihadiste, frappent "des sanctuaires de Daech [autre nom de l’EI] où sont formés ceux qui s'en prennent à la France", selon les termes employés alors par le Premier ministre Manuel Valls. En d’autres termes, Paris considère son intervention en Syrie comme de la "légitime défense".
• Centrafrique
En décembre 2013, François Hollande ouvre un nouveau "front" en Centrafrique où les violences entre chrétiens et musulmans tournent au bain de sang. De décembre 2013 à octobre 2016, jusqu'à 2 500 soldats français s'interposeront entre les deux camps dans le cadre de l'opération Sangaris.
Depuis la fin de l'intervention en octobre dernier, les exactions ont toutefois repris. Comme au Mali, "la situation n'est pas complètement rétablie, il y a encore des spasmes d'affrontement mais le pire a été évité", relativise le directeur de l'Iris, Pascal Boniface.
• Irak
En septembre 2014, François Hollande engage, dans le cadre de l’opération Chammal, les forces militaires françaises en Irak. Au sein de la coalition internationale contre l’EI, les avions de chasse tricolores et le porte-avions "Charles-de-Gaulle" sont fortement mis à contribution.
Au 1er septembre 2016, le colonel Patrick Steiger, porte-parole de l'État-major des armées, annonce que la France a effectué du 5 juillet au 30 août "344 sorties" et mené "61 raids, dont dix avaient été planifiés à l'avance". Depuis le début de l'opération, les Mirage et les Rafale français ont mené en Irak un millier de frappes. Ce qui fait de la France, selon Paris, la deuxième force de la coalition internationale, juste derrière les États-Unis.
À l'heure du bilan, l'engagement diplomatique et militaire de François Hollande pèse toutefois peu. Dans l’ouvrage "Les Guerres du Président" du journaliste David Revault D'Allones, François Hollande soulignait qu’une présidentielle se gagnait très rarement sur un bilan international. "Cela fait le statut présidentiel […], pas l'élection", concédait-il dans le livre sorti en 2015.
Avec AFP