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L’ombre d’un Italexit plane sur le référendum italien

Le référendum italien du 4 décembre pourrait coûter son poste au Président du conseil italien, Matteo Renzi. Mais, selon plusieurs médias, derrière ce scrutin, c'est également la place de l’Italie dans la zone euro qui est en jeu.

"À grand pas vers l'Italexit", pour Les Échos. "Après le Brexit, l'Italexit", pour le quotidien allemand Focus. À en croire une partie de la presse, l’ombre d’un Brexit à l'italienne plane au-dessus d’un référendum crucial pour le président du Conseil, Matteo Renzi, qui doit se tenir dimanche 4 décembre.

Le scrutin italien ne porte pourtant pas sur l’appartenance ou non à l’Union européenne (UE), contrairement au vote sur le Brexit au Royaume-Uni. Les Italiens doivent se prononcer sur une réforme constitutionnelle censée renforcer les pouvoirs du gouvernement au détriment des deux chambres afin de faciliter le travail de réformes de Matteo Renzi.

Aubaine pour le Mouvement 5 étoiles

Mais le référendum s’est transformé en vote d’adhésion ou de rejet de l’actuel homme fort italien qui pourrait, à moyen terme, remettre en cause la place de l’Italie dans l’Union européenne. L’actuel président du Conseil a fait de son maintien à son poste l’un des enjeux du scrutin à venir. Mal lui en a pris : les ultimes sondages, publiés le 18 novembre, donnent le “non” gagnant.

Une aubaine pour le Mouvement 5 étoiles (M5S), le principal parti italien d’opposition, connu pour ses positions eurosceptiques. À Bruxelles, les députés européens de cette formation siègent aux côtés de ceux de Ukip, la formation souverainiste britannique qui a milité sans relâche pour le Brexit. Le chef de file du M5S, l’ex-comique Beppe Grillo, s’est aussi prononcé en faveur d’un référendum sur une sortie de l’euro.

Dans le scénario catastrophe des europhiles, Matteo Renzi démissionne après la victoire du “non” et les élections anticipées permettent à Beppe Grillo, victorieux, de lui succéder. Le M5S organise alors un nouveau référendum sur le maintien dans la zone euro... ou pire. Il pourrait vouloir surfer sur le sentiment eurosceptique dans le pays – plus de 40 % des Italiens se déclarent eurosceptiques – et envisager une sortie pure et simple de l’UE.

Finesses de la loi électorale

Que les europhiles se rassurent pourtant. Cette succession d’événements n’a rien d’inéluctable, même en cas de “non” au référendum et de démission de Matteo Renzi. “Un Italexit imminent n’est pas probable”, jugent les analystes de la banque danoise Danske Bank dans une note sur la question publiée le 22 novembre. En cas de "non", le président italien, Sergio Mattarella, peut très bien demander à Matteo Renzi de former un nouveau gouvernement de “technocrates” pour assurer la transition jusqu’aux prochaines élections prévues en 2018.

Les finesses de la loi électorale peuvent aussi jouer en défaveur des desseins eurosceptiques du M5S. A priori, Peppe Grillo a tout à gagner des règles actuellement en vigueur, qui assurent une importante prime en sièges au parti qui arrive en tête lors des élections afin de lui garantir un soutien politique solide. Mais le texte qui a instauré ce système en juillet 2016 est vivement contesté et Matteo Renzi a promis, à plusieurs reprises, qu’il l’amenderait après le référendum. “Rien ne l’empêche en cas de victoire du ‘non’ de revenir à l’ancien système de scrutin proportionnel”, notent les banquiers de la Danske Bank. Le Mouvement 5 étoiles aurait alors bien du mal à former une coalition qui soutiendrait sans réserve son projet de référendum.

Le bloc idéologique du M5S n’est pas non plus monolithique. Cette formation fédère aussi bien des sympathisants de gauche attirés par son discours anti-austérité et son appel à davantage de démocratie directe que des militants d’extrême droite séduits par la fermeté à l’égard des immigrés et les diatribes eurosceptiques. Cette capacité à ratisser large explique, en grande partie, les succès électoraux du mouvement, mais peut aussi se révéler un handicap dans l’hypothèse où il accèderait au pouvoir. Pas sûr, par exemple, que la frange la plus à gauche accepte sans rechigner la décision d’organiser un référendum sur la sortie de la zone euro.