
Au lendemain de la mort du roi Bhumibol, un an de deuil a été décrété en Thaïlande. Des milliers de personnes sont attendues, vendredi, pour suivre le cortège funéraire jusqu'au palais. Les télévisions diffuseront en noir et blanc pendant 30 jours.
Des millions de Thaïlandais étaient vêtus de noir, vendredi 14 octobre, pour pleurer leur roi, Bhumibol Adulyadej, dont la mort ouvre une page de grande incertitude dans un royaume où il était la clef de voûte depuis 70 ans.
Joggeurs, employés de bureau dans le métro : toute la Thaïlande était en noir et blanc, couleurs du deuil en Asie. "Tant que le roi était en vie, le peuple restait uni", explique, ému, Arnon Sangwiman, employé de la compagnie nationale d'électricité, venu tôt sur un marché du centre de la capitale Bangkok.
Des milliers de personnes sont attendues dans l'après-midi pour suivre le cortège funéraire à partir de 16h00 locale (09h00 GMT) et qui doit conduire le corps du roi de l'hôpital Siriraj au grand palais. Le parcours a été fermé à la circulation avant l'aube.
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Le prince héritier Maha Vajiralongkorn doit ensuite conduire la cérémonie bouddhiste du "bain" du corps de son père, première étape d'une longue série de rites qui durent plusieurs mois pour les membres de la famille royale. La dernière sera la crémation du corps, plusieurs années après le décès pour un roi en Thaïlande.
Tous les programmes télé en noir et blanc
Vendredi, toutes les chaînes de télévision diffusaient un programme unique en noir et blanc, et ce pour 30 jours, en signe de deuil. Les médias audiovisuels seront perturbés pour la même durée : leurs programmes ont été suspendus et seuls les nouvelles royales et des documentaires à la gloire du roi sont diffusés.
Le gouvernement a également déclaré une journée de deuil pour les fonctionnaires et demandé au secteur du "divertissement" de cesser toute activité pendant 30 jours. Une situation très inhabituelle dans la capitale du pays à la vie nocturne très active, avec des établissements de nuit et des bars à prostitués très fréquentés par les touristes.
Même dans le métro de Bangkok, les écrans publicitaires du métro affichaient un poème sur fond gris : "Notre pilier nous a quittés, le ciel s'est déchiré".
Le "délai" demandé du prince héritier
Depuis la demande jeudi soir du prince de bénéficier d'"un délai" avant de monter sur le trône, les inquiétudes se multiplient. Le bain donné à son père sera sa première apparition publique depuis l'annonce de la mort du plus vieux souverain en exercice au monde, à l'âge de 88 ans.
Âgé de 64 ans, le prince héritier passait le plus clair de son temps en Allemagne et sa personnalité, réputée instable, fait débat, même au sein des conseillers du palais et des généraux aux manettes du gouvernement, soulignent les analystes. Avec ce délai demandé par le prince, "on dévie déjà de ce qui aurait dû être une succession normale", souligne David Streckfuss, historien spécialiste de la Thaïlande.
Reste que les Thaïlandais, même sceptiques, ne parlent du prince qu'en privé, en raison d'une loi de lèse-majesté très stricte qui condamne à de lourdes peines de prison tout détracteur de la royauté.
Les 10 dernières années du règne de Bhumibol Adulyadej ont été marquées par une très grande instabilité politique, qui a vu s'affronter élites ultraroyalistes (les "jaunes", couleur de la royauté) et partisans de l'ex-Premier ministre Thaksin Shinawatra (qui ont pour symbole le rouge).
Le dernier coup d'État, en mai 2014, a d'ailleurs été mené au nom de la sauvegarde de la monarchie par une armée soucieuse de verrouiller la scène politique à l'approche de la succession, alors que la personnalité du prince héritier inquiète de nombreux Thaïlandais.
Avec AFP