logo

Des heurts à Paris lors de la manifestation contre la Loi travail

Des milliers d'opposants à la Loi travail ont manifesté une dernière fois, jeudi, à l'appel des syndicats CGT et FO. Des échauffourées ont éclaté à Paris et en Province, faisant une vingtaine de blessés.

Soixante-deux personnes ont été interpellées pendant les manifestations en France contre la Loi travail jeudi 15 septembre, dont 32 ont été placées en garde à vue, a annoncé le ministre de l'Intérieur.

"Montrer qu'on est toujours là et qu'on n'est pas d'accord" : plusieurs milliers de personnes ont défilé à Paris et en régions pour réclamer l'abrogation de la Loi travail, qui aura déclenché des mois d'affrontements politiques et de conflit social, sans faire plier l'exécutif. 

Selon la CGT, quelque 170 000 personnes ont manifesté en France, la police et le ministère de l'Intérieur en ont compté 78 000. À Paris, le syndicat a dénombré 40 000 manifestants, soit un peu moins que lors de la précédente mobilisation le 5 juillet (45 000 selon les syndicats), tandis que la police a compté entre 12 500 et 13 500 manifestants dans la capitale.

"Au total, 15 policiers et gendarmes ont été blessés à Paris et en province, dont deux grièvement, qui ont été hospitalisés", a précisé le ministre de l'Intérieur Bernard Cazeneuve dans un communiqué., regrettant des incidents dans la capitale mais aussi à Nantes, Rennes, Rouen, Grenoble, Toulouse et Montpellier.

Selon la préfecture de police de Paris, 16 personnes ont été interpellées pendant la manifestation parisienne, pour "port d'armes prohibées, rébellion, violences sur agents de la force publique et dégradations de biens publics".

Quatre manifestants ont été blessés, ainsi que huit policiers et gendarmes, dont "2 présentant des brûlures suite aux jets de cocktails Molotov".

"Il faut que les salariés se mobilisent dans la rue"

"Face à une telle loi, on ne peut pas attendre la présidentielle (...), il faut que les salariés se mobilisent dans la rue", avait déclaré plus tôt sur France Info Philippe Martinez, secrétaire général de la CGT. Pour Jean-Claude Mailly, son homologue à FO interrogé sur France 2, la Loi travail est "un ratage complet sur la méthode et le fond [qui va] laisser des traces" dans la majorité et suscite "beaucoup d'amertume" parmi les salariés qui ont battu le pavé pendant plusieurs mois.

Après avoir réclamé, en vain, pendant des mois, le retrait de ce texte qu'ils considèrent comme source de "dumping social", les deux leaders ont marché à nouveau ensemble à Paris, pour demander son abrogation. Ils avaient à leurs côtés les responsables de FSU, Solidaires, Unef, UNL et Fidl.

Des manifestations, parfois émaillées de violences, étaient organisées dans plus de 110 villes. À Belfort, des centaines de personnes ont défilé pour garder l'activité d'Alstom dans la ville et "marquer le coup", en cette journée nationale de mobilisation contre la Loi travail. En marchant à Nantes, Rebecca, 32 ans, déjà quelques manifs derrière elle, a voulu pour cette dernière grande manifestation syndicale "montrer qu'on est toujours là et qu'on n'est pas d'accord". À Marseille, quelques milliers de personnes ont battu le pavé. "On va leur montrer que loi ou pas, ils nous trouveront toujours face à eux", a expliqué François Roche, délégué du personnel CGT chez Airbus Helicopters. Ils étaient entre 1 500 et 2 000 (selon les syndicats) à Tours, 3 000 à Rennes...

Des appels à la grève ont été lancés dans la fonction publique, à La Poste, chez Air France, France Télévisions ou les intermittents du spectacle. À la SNCF et à la RATP, le trafic était normal. Dans le ciel, en revanche, plus de 20 % des vols étaient annulés en début de matinée à l'aéroport d'Orly et un retard moyen de vingt minutes était enregistré, selon des sources aéroportuaires.

Myriam El Khomri "fière des droits nouveaux" que la Loi travail instaure

Après ce baroud d'honneur, les syndicats opposés au texte n'ont pas prévu de nouvelle date de mobilisation. Mais ils espèrent maintenir la pression, en entreprise et devant la justice. Ils travaillent sur des recours possibles, notamment à travers des questions prioritaires de constitutionnalité, et se préparent à bloquer, dans les entreprises, tout accord permettant d'appliquer la loi : "Il ne faut pas que la loi rentre dans les entreprises", a martelé jeudi Philippe Martinez.

Fort du soutien de la CFDT, l'exécutif, lui, est resté inflexible, défendant un texte de "progrès social" et le présentant comme une solution pour lutter contre le chômage. À quelques mois de la présidentielle, le gouvernement veut aller vite sur ce dossier épineux. La plupart des décrets, dont les plus décriés (temps de travail, référendum en entreprise, accords offensifs), doivent être publiés en octobre.

Quatorze journées de mobilisation depuis mars, une pétition record, des sondages montrant la désapprobation des Français, le recours à l'article 49-3 pour faire passer le texte sans vote au Parlement... : cette réforme, l'une des dernières du quinquennat, a connu un parcours particulièrement agité. La ministre du Travail, Myriam El Khomri, a reconnu récemment "des erreurs au lancement de cette loi", mais s'est également dite "fière des droits nouveaux qu'elle instaure, en particulier un droit universel à la formation pour tous nos concitoyens".

Avec AFP