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Femme voilée verbalisée à Nice : fausse polémique, vraie indignation

Les photos du contrôle d’une femme voilée sur une plage ont provoqué une polémique. Le Daily Mail accuse la police de l'avoir contrainte à se dévêtir. Certains évoquent une manipulation. Il n'en est rien, selon l'agence photo à l'origine des clichés.

La polémique française sur le burkini continue de faire couler de l’encre. Mardi 23 août, une série de cinq photos, publiée par le Daily Mail, d’un contrôle de police effectué sur une plage de la Promenade des Anglais, à Nice, a suscité un mouvement d’indignation sur Internet.

Sur ces images, on voit des agents municipaux en train de contrôler une femme, qui semblait assoupie. L’estivante porte un foulard bleu noué sur la tête, une tunique à manches longues ainsi qu’un legging.

Sur les trois derniers clichés, la femme retire son haut et garde le débardeur noir qu’elle portait en dessous. En guise de légende, le Daily Mail indique : "La femme se voit ensuite ordonner d’enlever son vêtement bleu." Il n’en fallait pas plus pour enflammer les réseaux sociaux. Sous le hashtag #WTFFrance ("C’est quoi ce bordel ?"), les internautes dénoncent une politique intrusive et des libertés bafouées par le pays des droits de l’Homme.

Certains soupçonnent en revanche une mise en scène en soulignant la qualité "professionnelle" de la prise de vue et la position de la femme, qu’ils jugent peu naturelle. Un billet sceptique du politologue et essayiste Laurent Bouvet, posté sur Facebook, a ainsi donné lieu a un déferlement de commentaires soupçonneux : "C'est de la provoc' pure et simple", "Clairement, sa tenue pouvait être assimilée à un burkini (et était conçue) pour attirer les policiers (…) et créer une polémique" ou encore "Se mettre en plein cagnard, toute de noir vêtue, c'est assez étrange."

"Une manipulation", selon Estrosi

De son côté, l'ancien maire (LR) de la ville et actuel président du conseil régional de Provence-Alpes-Côte d'Azur, Christian Estrosi, s’est fendu d’un communiqué pour "(dénoncer) ce qui apparaît comme une manipulation qui dénigre la police municipale, et met en danger ses agents".

Contactée par France 24, la mairie assure que les agents municipaux, qui étaient présents dans le cadre d’un "dispositif estival de sécurité de surveillance des bords de mer" n’ont pas forcé cette femme à se déshabiller mais ont seulement "appliqué l’arrêté" pris par la commune de Nice en la verbalisant. "Les policiers n’ont pas demandé à la dame d’enlever son tee-shirt, insiste-t-on à la mairie. Elle l’a enlevé elle-même pour montrer qu’elle avait un maillot. Le policier lui a dit qu’elle devait soit se mettre en tenue de plage, soit quitter la plage. Elle a préféré quitter la plage."

L’arrêté, pris le 18 août, interdit "l’accès aux plages publiques (…) ainsi qu’à la baignade sur la commune de Nice (…) à toute personne n’ayant pas une tenue correcte, respectueuse des bonnes mœurs et de la laïcité, respectant les règles d’hygiène et de sécurité des baignades adaptées au domaine public maritime. Le port de vêtements pendant la baignade ayant une connotation contraire à ces principes y est également interdit." Selon la mairie de Nice, 24 verbalisations ont eu lieu à ce jour dans le cadre de l'application de l'arrêté.

Une scène authentique "à 1 000 %"

Sollicitée par France 24, l’agence photo britannique Vantage News, créditée par le Daily Mail, explique avoir acheté ces photos auprès d’une autre agence, française cette fois, Best Image. Son rédacteur en chef, Yvan Bousseau, dément toute manipulation et "confirme à 1000 % qu’il ne s’agit pas d’une mise en scène" ni d’un "set-up comme certains se l’imaginent".

Le photographe à l’origine de ces images, un indépendant qui "voulait travailler sur cette actualité [du burkini] est par hasard tombé sur cette scène qui a duré 10 minutes, hier matin [mardi 23 août 2016] au début de la Promenade des Anglais vers 11 h. La femme a été verbalisée et elle est partie quelques minutes après les policiers."

À l’heure actuelle, la femme n’a pas dévoilé son identité. À la suite de cette affaire, le Conseil français du culte musulman a été reçu, mercredi 24 août, par le ministre de l'Intérieur, Bernard Cazeneuve, qui a estimé, à l'issue de l'entretien, que les arrêtés anti-burkini pris dans certaines communes littorales ne devaient pas conduire à "des stigmatisations" ou à dresser les Français "les uns contre les autres".