
La mort de trois sous-officiers à l'est de Benghazi a contraint Paris à confirmer la présence de soldats français en Libye. Une présence dénoncée par le gouvernement libyen d'union nationale (GNA).
Quelques heures après l’annonce de la mort de trois soldats français en Libye, le gouvernement libyen d'union nationale (GNA) a dénoncé mercredi 20 juillet la présence de militaires étrangers sur son sol. Celle-ci représente "une violation du territoire libyen", a déclaré le GNA dans un message sur son compte Facebook, estimant que rien ne "justifie une intervention" étrangère sans qu'il en soit informé.
Des centaines de personnes ont également manifesté mercredi dans plusieurs villes de Libye pour protester contre la présence militaire française. Des rassemblements ont notamment été organisés à Tripoli mais aussi à Misrata, à 200 km à l'est de la capitale.
"Nous sommes ici pour condamner l'agression par des traîtres français sur notre sol, des traîtres qui tentent de garder secret ce qui se passe à Benghazi et de défendre le criminel de guerre qu'est le général Haftar", a ainsi expliqué Sami Mostafa al-Saadi, président des Aînés et Notables au Centre de conseil de Tripoli, présent lors de l’une de ces manifestations. Le général Khalifa Haftar, chef proclamé de l'Armée nationale libyenne (ANL), s'est posé en héraut de la lutte contre les islamistes à Benghazi, principale ville de l'est du pays, avec un succès mitigé. Il s'oppose en outre toujours à l'autorité du gouvernement libyen d'union nationale (GNA) et est resté loyal aux autorités parallèles qui siègent dans l'est du pays.
"Face à une sorte de contradiction"
Officiellement, à l'instar de la la communauté internationale, la France soutient le gouvernement libyen d'union nationale (GNA) du Premier ministre Fayez el-Sarraj. Mais les trois soldats français ont perdu la vie dans un accident d’hélicoptère alors qu’ils menaient une mission auprès de forces relevant du général Haftar.
"On est face à une contradiction. La France soutient le gouvernement légitime reconnu de Tripoli, qui n’est pas en très bon terme avec le général Haftar, mais le fait que les forces françaises soient présentes à Benghazi montrent qu’elles sont forcément du côté du général Haftar contre les factions jihadistes", résume ainsi Wassim Nasr, journaliste à France 24, spécialiste des réseaux jihadistes. "Cela démontre la complexité de la situation en Libye et en même temps la détermination de la France à combattre les jihadistes là où ils sont, malgré les considérations du jeu politique libyen", ajoute-t-il.
"La priorité de la France est de soutenir le GNA"
Dans cette lutte sur le terrain, des éléments des forces spéciales françaises conseillent bel et bien les troupes du chef de guerre Khalifa Haftar, selon des sources libyennes citées par l’agence Reuters. Mais dans le même temps, la France doit préserver ses relations avec le GNA. Interrogée par France 24, une source diplomatique, qui a souhaité rester anonyme, a ainsi tenté de rassurer le gouvernement d’union nationale. "La priorité de la France est de soutenir le gouvernement d’union nationale et appelle toutes les forces à le reconnaitre", a-t-elle insisté auprès du journaliste Wassim Alahmar.
Jusque-là très discrètes sur l'activité de ses forces spéciales en Libye, les autorités françaises ont été obligées d’évoquer la présence de soldats déployés pour aider les troupes légalistes face aux différentes milices islamistes, en particulier le groupe État islamique (EI). "Les forces spéciales sont là, bien sûr, pour aider et faire en sorte que la France soit présente partout pour lutter contre les terroristes", a ainsi déclaré mercredi le porte-parole du gouvernement, Stéphane Le Foll, sur France Info.