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Au Pakistan, les hypothèses avancées par l'avocat des familles des 11 ingénieurs tués en 2002 à Karachi ne convainquent pas. Notre correspondant Matthieu Mabin a cherché à savoir pourquoi.

Près de deux jours après que l’affaire des commissions de Karachi a agité la presse française, le Dawn, l’un des principaux journaux pakistanais fait état du rebondissement. En dernière page du journal, le quotidien reprend presque mot pour mot la dépêche de l’Agence France Presse parue deux jours plus tôt. A Islamabad, l’affaire suscite le scepticisme.

Joint par France 24, le porte-parole du ministère des Affaires étrangères pakistanais, Adul Basit, se souvient bien des onze ingénieurs français tués le 8 mai 2002 dans un attentat suicide. A l’époque l’affaire avait fait grand bruit et était passée pour une riposte du réseau Al-Qaida à l’intervention américano-otanienne en Afghanistan.

"Ici, les affaires terroristes importantes ne sont jamais résolues"

Mais aujourd’hui, le complot anti-français décrit par les avocats des familles des victimes laisse la classe politique pakistanaise totalement indifférente. "Ici, les affaires terroristes importantes ne sont jamais résolues. Par exemple la justice pakistanaise n’évoque même plus l’enquête sur les assassins de Benazir Bhutto, alors qu’elle était la femme du Président actuel, alors vous imaginez bien que les ingénieurs français… ", explique un parlementaire d’opposition sous couvert d’anonymat.

"Au Pakistan quand la justice est dans l’impasse, on finit toujours par désigner le coupable le plus facile, celui qui fait l’unanimité contre lui, au choix : les services secrets pakistanais, indiens ou américains", ajoute le parlementaire.

Si la classe politique pakistanaise n’a, pour le moment, formulé aucune réaction officielle dans les milieux francophiles d’Islamabad, les commentaires vont bon train.  "Si l’attentat de Karachi est effectivement une vengeance des services secrets pakistanais après l’arrêt du versement des commissions, pourquoi avoir attendu sept ans (1995-2002) pour frapper ?", s’interroge un avocat proche du PPP, le parti du président.

Frustration des familles

Pour lui, aucune complicité à l’intérieur de l’armée n’était nécessaire à un groupe fondamentaliste pour organiser l’attentat contre les ingénieurs français. "A cette époque, ils étaient logés dans l’hôtel le plus visible de Karachi et faisaient chaque jour le même trajet en bus, du Sheraton au chantier naval où ils travaillaient, tout le monde le savait, tout le monde les voyait", se souvient-il.

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Enfin, pour Iqbal Nassri, journaliste pakistanais qui suit l’affaire depuis 2002, ce rebondissement est d’abord l’expression de la frustration des familles ressentie après la libération des deux auteurs présumés de l’attentat, en mai dernier.  "On leur a pris leurs coupables après leur avoir fait croire qu’ils seraient condamnés, ça a dû être très dur. Mais vu d’ici, on a un peu l’impression que les avocats des familles cherchent avant tout à ce que cette histoire ne soit pas oubliée."