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France : les homosexuels peuvent officiellement donner leur sang, mais sous conditions

Depuis dimanche, les homosexuels peuvent officiellement faire don de leur sang en France. Si, et seulement si, ils n’ont eu aucun rapport sexuel ces 12 derniers mois. Une condition que certaines associations jugent "disproportionnée".

C’est désormais officiel. Le décret autorisant les homosexuels de sexe masculin à donner leur sang est entré en vigueur, dimanche 10 juillet, en France. Cette ouverture met ainsi fin à l’exclusion permanente dont les donneurs gays faisaient l’objet depuis 1983 en raison des risques de transmission du sida.

Annoncée dès avril 2015 par Marisol Touraine, la ministre de la Santé, cette autorisation vise ainsi à mettre fin à une "discrimination" et à un "tabou". "Donner son sang est un acte de générosité, de citoyenneté, qui ne peut être conditionné à une orientation sexuelle", avait-elle affirmé.

Reste que le "don de sang total" (cellules et plasma), qui est la forme de don la plus courante, est soumis à conditions pour les hommes ayant des relations sexuelles avec les hommes (HSH). Afin de respecter "la sécurité des patients", ces derniers devront en effet avoir été abstinents durant 12 mois. Un délai réduit à 4 mois pour le plasma (partie liquide du sang), dont les échantillons prélevés seront mis en quarantaine pendant deux mois et demi environ pour s'assurer de leur innocuité.

Pour les autorités sanitaires, cette ouverture graduelle aux homosexuels permettra également d’en savoir davantage sur les nouveaux donneurs. Si les études démontrent qu'il n'y a pas de risques, les règles du don du sang pour les homosexuels se rapprocheront des règles générales appliquées aux autres donneurs. Cette deuxième étape interviendrait en 2017, a précisé le ministère.

"Un premier pas", mais...

"Cette levée de l’interdiction constitue un premier pas, indique à France 24 Virginie Combe, vice-présidente de SOS homophobie. Mais nous souhaitons une évolution qui se base sur le comportement plutôt que sur une population. On espère avoir des données qui pourront déterminer quels sont les comportements à risque. Aujourd’hui, rien ne dit qu’un couple homosexuel marié et fidèle présente plus de risques qu’un couple d’hétérosexuel marié et fidèle."

"Une exposition élevée au VIH n’est pas liée à l’orientation sexuelle mais aux comportements sexuels, abonde Sophie Aujean, porte-parole en Europe de l’Association internationale des lesbiennes, gays, bisexuels, transexuels et intersexués (ILGA) qui considère les 12 mois d’abstinence "disproportionnés". "Une année, c’est très long. Et cela va sûrement dissuader les hommes ayant un rapport avec un autre homme de donner leur sang, estime-t-elle. Un délai de quatre mois aurait été plus raisonnable."

Si de nombreuses organisations se félicitent de la levée de l’exclusion permanente, nombreux sont ceux qui regrettent que les homosexuels soient une nouvelle fois stigmatisés. Lors de l’annonce de Marisol Touraine en avril, Didier Lestrade, cofondateur de l’association de lutte contre le sida Act Up-Paris, écrivait sur Slate : "Demander aux gays (ou aux autres d’ailleurs) une période d’abstinence d’un an pour être éligible ressemble à un poisson d’avril. Mais c’est une preuve supplémentaire de l’incompréhension totale du gouvernement Hollande face aux espoirs des LGBT."

Sur Twitter, de nombreux internautes avaient également fait part de leur indignation fasse à ce que le premier secrétaire du Parti social, Jean-Christophe Cambadélis, qualifiait de "pas supplémentaire vers l’égalité".

Pour voir les images sur vos tablettes et mobiles, cliquez sur ce lien.

Proposons aux hétéros de faire aussi un pas en pratiquant l'abstinence 1 an avant leur #DonDuSang https://t.co/O870dWs3mn

— Thomas Vampouille (@tomvampouille) 4 novembre 2015

Ah vous êtes Gay ! Ok alors voici quelques conditions à respecter si vous voulez donner votre sang #MarisolTouraine pic.twitter.com/1ll99Tf1uw

— RT Pierre (@RouatP) 4 novembre 2015

La levée de l’interdiction était un engagement de campagne de François Hollande. Elle concerne 500 000 donneurs potentiels supplémentaires, estime le docteur François Charpentier, interrogé lundi par France Info. "Si 4 % donnent, cela fait 20 000 dons possibles". Chaque année, trois millions de dons sont faits en France.

En 2014, entre 10 et 15 donneurs ont été signalés comme porteurs du VIH, ce qui signifie que la probabilité qu’un échantillon soit contaminé est de 1 sur 3,5 millions. La dernière fois qu’un receveur a contracté le VIH à la suite d’une transfusion remonte à 2003.