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Réessayer"On peut dire que les scrutins se sont passés aussi mal que possible pour les républicains et Donald Trump", assène René Lindstaedt, spécialiste de la politique américaine à l'université de Birmingham. Pour autant, les résultats des votes du mardi 4 novembre représentent-ils le meilleur des mondes possible pour les démocrates nord-américains ?
Ils n’ont, en apparence, pas de quoi se plaindre. Le socialiste Zohran Mamdani s'est imposé dans la course à la mairie de New York tandis que les démocrates Abigail Spanberger et Mikie Sherrill ont été élues gouverneures, respectivement dans les États de Virginie et du New Jersey.
Cerise sur ce gâteau électoral, le très médiatique gouverneur de Californie Gavin Newsom a réussi à faire adopter un redécoupage électoral qui va donner un avantage certain aux démocrates dans cet État.
Risque de complaisance et luttes intestines
"La bonne nouvelle pour les démocrates est que tous ces succès confirment que les politiques de Donald Trump sont de plus en plus impopulaires et que les électeurs ont voulu le sanctionner lors de ces élections", reconnaît René Lindstaedt.
En théorie, ce genre de victoires en série "devrait donner un élan au Parti démocrate pour mieux s’opposer à Donald Trump", note cet expert. Sauf qu'"il n’y a rien dans ces résultats qui fournisse aux démocrates de quoi fabriquer un message cohérent au-delà de 'Votez pour nous, nous ne sommes pas Donald Trump'", note-t-il.
En effet, quel point commun existerait-il entre un candidat socialiste comme Zohran Mamdani et Mikie Sherrill, qui se définit comme une "démocrate modérée des banlieues chics" ? Les démocrates vont aussi avoir du mal à déterminer s’il vaut mieux attaquer frontalement Donald Trump comme aime à le faire Gavin Newsom sur les réseaux sociaux, ou adopter la méthode Abigail Spanberger en Virginie, qui s’est bien gardée de critiquer directement le président nommément tout en dénonçant sa politique.
La solution de facilité serait de considérer que tant que Donald Trump continue à faire du Donald Trump, les démocrates vont accumuler les succès sans avoir à faire grand-chose. "Il y a un réel risque de complaisance qui amènerait les démocrates à penser que dorénavant, n’importe qui peut gagner contre un républicain", avertit Richard Johnson, spécialiste de la politique américaine à l’université Queen Mary de Londres.
"Nul doute que ces résultats vont aussi entraîner des luttes intestines au sein des démocrates", souligne René Lindstaedt. "C’est le problème avec les partis sans leader incontesté censé maintenir la discipline partisane", confirme Richard Johnson.
Pour ces experts, l’aile gauche du parti va probablement vouloir capitaliser sur la victoire très médiatique de Zohran Mamdani, tandis que les modérés brandiront les cartes Abigail Spanberger et Mikie Sherrill pour freiner ses ardeurs.
Miser sur le local et le sang neuf
"Il est clairement encore trop tôt pour croire que ces résultats pourront permettre d’identifier la bonne stratégie pour battre les républicains lors de la prochaine présidentielle", assure Jérôme Viala-Gaudefroy, maître de conférences à Sciences Po Saint-Germain-en-Laye et spécialiste des États-Unis. Pour lui, dans l’idéal, il faudrait patienter jusqu’aux élections de mi-mandat de 2026 pour affiner le profil du meilleur candidat démocrate.
Pas sûr cependant que les démocrates puissent se permettre de ne rien faire d’ici là. "S’ils n’essaient pas de capitaliser sur ces victoires, le parti donnera vraiment l’impression de ne pas savoir quoi faire de ce succès. Ce ne sera pas bien perçu par les électeurs", affirme René Lindstaedt.
D’autant plus que Donald Trump ne va pas rester les bras croisés. "Traditionnellement, un président américain tirerait les leçons de ces échecs et remettrait en cause certaines de ses politiques les moins populaires. Mais avec Donald Trump, le danger est que pour ne pas avoir l’air affaibli, il soit encore plus combatif et déterminé à mener à bien sa politique", juge René Lindstaedt.
Alors comment réagir ? Pour les experts interrogés, la leçon à tirer la plus évidente de ce scrutin serait de donner davantage de place aux multiples facettes démocrates qui existent localement. "Une grande tendance politique de ces dernières années aux États-Unis a été de faire prévaloir le message national au détriment des spécificités locales. Je pense que les démocrates gagneraient à laisser davantage de liberté à leurs candidats pour adapter leur discours aux réalités du terrain", estime Richard Johnson. Une manière de ratisser le plus large possible face à un Parti républicain "réputé avoir une ligne idéologique beaucoup plus stricte", ajoute cet expert.
Et le grand ratisseur démocrate pour 2028 "devrait être issu de la nouvelle génération du parti", estime Jérôme Viala-Gaudefroy. Pour lui, l’autre grande leçon de ces succès électoraux est qu’ils sont incarnés par des candidats qui n’étaient pas ou peu connus auparavant. "Il y a une volonté de changement avec des électeurs qui préfèrent des candidats capables de formuler des propositions concrètes" plutôt que des cadres du parti qui capitalisent sur leur expérience et leur nom, conclut Jérôme Viala-Gaudefroy.
