Deux jours après la sortie du Royaume-Uni de l'UE, l'Espagne se rend aux urnes dimanche 26 pour de nouvelles législatives. Les partis politiques espagnoles ont tous essayé de tirer parti du Brexit pour faire pencher le scrutin en leur faveur.
Les Espagnols ont commencé à voter dimanche 26 juin, juste après l'ouragan du Brexit au Royaume-Uni. Après l'onde de choc qui s'est abattue sur l'Europe, ils doivent décider s'ils gardent la droite au pouvoir ou s'ils privilégient le parti anti-austérité Podemos à la tête de leur pays. Les bureaux de vote ont ouvert à 9h, heure locale pour accueillir jusqu'à 20h quelque 36,5 millions d'électeurs.
Pour se démarquer, la droite de Mariano Rajoy, au pouvoir, s'est posé en garant de la stabilité. "Il est particulièrement important de transmettre un message de stabilité institutionnelle et économique. Le moment n'est pas venu d'alimenter ou d'accroître l'incertitude", a souligné le chef du gouvernement conservateur sortant, lors d'une allocution télévisée.
Rajoy, au pouvoir depuis fin 2011, s'est gardé d'évoquer trop directement le parti anti-austérité, mais ses lieutenants s'en sont chargés. "Le radicalisme et le populisme n'apportent jamais de stabilité", a déclaré la secrétaire générale du Parti populaire (PP), Maria Dolores de Cospedal, en appelant au "vote de la modération (...) de la stabilité, de la croissance".
Podemos, de son côté, en a profité pour attribuer la sortie du Royaume-Uni aux politiques de la droite. "Personne ne voudrait quitter une Europe juste et solidaire, nous devons changer de cap", a estimé Pablo Iglesias, le chef de file du parti anti-austérité, à la télévision. "Lorsque l'Europe est compatible avec des salaires de misère (...) alors le projet européen est en crise".
Tenter de convaincre les indécis
Décrié pour les affaires de corruption touchant sa formation, Mariano Rajoy a axé sa campagne sur la nécessité de poursuivre la politique économique menée en accord avec Bruxelles. Et, Podemos, nouveau parti anti-austérité entré au Parlement en décembre, ayant le vent en poupe, dénonce justement les choix de la Commission européenne.
Les élections législatives de décembre 2015 avaient débouché sur un Parlement fragmenté entre quatre grandes formations : le PP de Mariano Rajoy, les socialistes, Podemos et le libéral Ciudadanos. Aucun parti n'ayant réussi à former un gouvernement depuis le scrutin, le blocage politique a obligé le roi Felipe VI à convoquer de nouvelles élections.
La campagne pour ces nouvelles législatives a pris l'allure d'un second tour, les partis s’étant affrontés entre eux à droite et à gauche pour capter les voix des indécis. Le PP, qui arriverait en tête avec quelque 28 % des suffrages, selon les sondages, tente de récupérer les voix cédées en décembre au nouveau parti libéral Ciudadanos.
À gauche, la nouvelle coalition formée par Podemos et le parti écolo-communiste Izquierda Unida, appelée "Unidos Podemos", est en train de gagner du terrain. Et ce, au détriment du traditionnel Parti socialiste auquel il pourrait ravir la seconde place.
Pedro Sanchez, le chef du Parti socialiste, critique lui aussi les politiques libérales de Bruxelles. Il a surtout regretté la convocation d'un référendum. "Au bout du compte, les référendum font retomber les responsabilités sur les citoyens qui n'ont pas toutes les informations sur les conséquences" de leur décision, a-t-il dit. Une attaque évidente contre Podemos qui propose un référendum d'autodétermination pour la Catalogne, riche région du nord-est de l'Espagne en proie à une poussée de fièvre indépendantiste.
L’impact incertain du Brexit sur le scrutin
Alors que le scrutin se tient ce dimanche, l’impact du Brexit sur les 36,5 millions d’électeurs n’est pas clair.
"Cela peut avoir un impact" et favoriser le pouvoir en place, avait déclaré avant le référendum le politologue Pablo Simon, de l'université Carlos-III. "Un événement entraînant de l'incertitude tend à favoriser le parti qui est au gouvernement".
Selon Sara Morais, de l'institut de sondages GAD3, le Brexit pourrait renforcer la polarisation et profiter à Podemos comme au PP.
"Il peut y avoir davantage de vote en faveur de la stabilité, analysait-elle. Mais le Brexit, c'est aussi la démonstration du pouvoir du peuple qui passe par dessus l'establishment. Le message c'est : oui, les choses peuvent changer. Cela peut renforcer Podemos", a-t-elle déclaré.
Avec AFP