
Au lendemain du vote des Britanniques en faveur du Brexit, l'Union européenne cherche à organiser sa réaction. Jean-Juncker a d'ores et déjà prévenu Londres qu'il voulait entamer immédiatement les négociations de sortie.
Après le camouflet que lui ont infligée les électeurs britanniques vendredi 24 juin en choisissant de lui tourner le dos, l’Union européenne (UE) doit désormais élaborer un plan de bataille. Quelques heures après la publication des résultats du référendum, le président du Conseil européen Donald Tusk, celui de la Commission Jean-Claude Juncker et celui du Parlement Martin Schulz ont demandé que "cette décision du peuple britannique" soit effective "dès que possible", afin d’éviter toute contagion parmi les 27 restants.
Jean-Claude Juncker a d'ailleurs vite dû afficher sa fermeté face au Premier ministre britannique David Cameron, qui avait estimé qu'il "ne serait pas juste [qu'il soit] le capitaine conduisant le pays vers sa prochaine destination", reportant à octobre, après sa démission, le début des négociations. Le président de la Commission a réagi vendredi soir en annonçant qu'il voulait entamer immédiatement les discussions.
"Politiquement, il faut donner le signal d’un sursaut européen, d’une volonté de continuer à 27. Un projet qui serait mieux ficelé et qui parlerait davantage aux citoyens", juge la journaliste de France 24 Caroline de Camaret. Car après le choc du Brexit, vient le temps de la réflexion et d’une analyse des raisons d’une telle défiance vis-à-vis de l’UE chez les Britanniques, partagée par une partie des citoyens européens.
Jean-Marc Ayrault et Frank-Walter Steinmeier, les ministres français et allemand des Affaires étrangères, ont ébauché un projet d’une union plus flexible, qu’ils comptent proposer à leurs homologues italien, néerlandais, belge et luxembourgeois lors d’une réunion des six États fondateurs de l’UE, samedi à Berlin, qui fait suite à une réunion informelle des ministres européens des Affaires étrangères vendredi matin au Luxembourg. Ils envisagent notamment "d'offrir un espace" aux pays qui ne sont pas prêts à approfondir l'intégration, selon une source diplomatique.

Le président français François Hollande a, lui aussi, esquissé des pistes pour résoudre la "crise morale" que traverse l’UE. Jugeant que "l'Europe ne peut plus faire comme avant" face aux "extrémismes" qui se nourrissent de la défiance des citoyens à l'égard d'une Union jugée intrusive et bureaucratique, il a annoncé que la France serait "à l'initiative pour que l'Europe se concentre sur l'essentiel", à savoir "la sécurité", "l'investissement pour la croissance et pour l'emploi", "l'harmonisation fiscale et sociale" et "le renforcement de la zone euro et de sa gouvernance démocratique".
Marathon diplomatique
Avec le mini-sommet de samedi, un marathon diplomatique semble s’être enclenché au sein des plus hautes instances européennes pour gérer les multiples conséquences du Brexit. Un sommet européen, prévu de longue date, aura lieu les 28 et 29 juin.
Donald Tusk, le président du Conseil, a d’ores et déjà annoncé qu'il avait l'intention d'organiser en plus une réunion "informelle" en marge de ce sommet, avec 27 chefs d'États et de gouvernement, hors Royaume-Uni, afin de discuter des conséquences du Brexit.

Il faudra notamment envisager le sort des 73 eurodéputés britanniques, "qui pourront rester jusqu’en 2019 sans participer au processus décisionnaire", souligne Caroline de Camaret. Et quid de la présidence britannique du Conseil de l’UE (qui réunit les ministres compétents par domaine d'activité et ne doit pas être confondu avec le Conseil européen), prévue au deuxième semestre 2017 ?
Le Parlement européen va également se rassembler, mardi 28 juin, selon son président, Martin Schulz, qui a annoncé la convocation d'une session plénière extraordinaire. "La réaction en chaîne que les eurosceptiques célèbrent maintenant un peu partout n'aura absolument pas lieu", a-t-il assuré.
Les chefs d’États et de gouvernements européens pourraient quant à eux décider de se réunir de nouveau au mois de juillet.
"Vous voulez partir ? Très bien, mais vous allez en payer le prix"
Ces rencontres au plus haut niveau européen pourraient permettre de déterminer l’attitude commune à adopter face à Londres, qui ne semble pas encore claire. "Certaines capitales, comme Paris, voudraient une ligne dure vis-à-vis des Britanniques. ‘Vous voulez partir ? Eh bien, très bien, mais vous allez en payer le prix’. Et cela, c’est aussi pour éviter un effet de contagion", estime Kattalin Landaburu, correspondante de France 24 à Bruxelles.
Le gouvernement français aurait en effet débattu, vendredi après-midi, entre des tenants d’une ligne dure et ceux d’une attitude plus conciliante. François Hollande a donc dû arbitrer entre une "fermeté absolue" à l'égard des Britanniques, selon la formule d'un ministre favorable à cette ligne, et la ligne portée par son ministre des Affaires étrangères, Jean-Marc Ayrault, soucieux d'éviter tout esprit de revanche.
La France cherchera donc la "convergence franco-allemande", selon les mots de l’occupant du quai d’Orsay, afin de redonner une nouvelle perspective à l'UE, même si la France semble davantage demandeuse d’une telle issue que l'Allemagne.
Avec AFP et Reuters