Plusieurs cas de discrimination raciste ou sexuellle ont entaché ces derniers jours la réputation d’Airbnb. La plateforme de réservation de logements entre particuliers peine à trouver la réponse adaptée.
Qu’ont en commun une étudiante d’origine nigériane et une productrice de télé transsexuelle américaine ? Elles ont toutes les deux essuyé un refus en tentant de réserver un logement sur Airbnb. Deux affaires aux forts relents de discrimination qui font tâche depuis quelques jours pour la célèbre plateforme de location de logements entre particuliers.
Le cas de l’étudiante a provoqué un tollé sur les réseaux sociaux, exprimé au travers du hashtag #AirbnbWhileBlack (être noir sur Airbnb). Il faut dire que sa mésaventure, narrée par une amie sur son blog fin mai, est édifiante. Cette jeune femme cherchait à trouver un logement à Charlotte, en Caroline du Nord, mais elle s’est heurtée au refus d'un loueur qui lui a rappelé qu’”ici c’est le Sud, darling” et qu’elle ferait mieux de chercher ailleurs “pour reposer sa tête de négresse”.
“Malaise” et “puberté”
Quelques jours plus tard, la productrice Shadi Petosky a raconté sa propre mésaventure, qui remonte à 2015. Lundi 6 juin, elle a expliqué sur Twitter s’être également heurtée en 2015 à un refus de la part d’un loueur sur Airbnb. Cette fois-ci, la couleur de peau n’y est pour rien : la logeuse potentielle n’a pas voulu l’accueillir car elle ne voulait pas que son fils ado de 13 ans, “en pleine puberté” ressente “un malaise” en présence d’une transsexuelle. “Les gens utilisent l’argument de l’enfant pour nous discriminer. Ils ne se rendent pas compte que nous pouvons être parents !”, s'est insurgée Shadi Petosky au quotidien britannique The Guardian.
I was denied @Airbnb because I disclosed that I'm trans. Airbnb did nothing. Had I not disclosed I'd be "dishonest" pic.twitter.com/jEkbEFIG2r
— Shadi Petosky (@shadipetosky) 5 juin 2016Elle a précisé avoir déjà alerté Airbnb de l’incident l’an dernier… sans succès. Elle a donc décidé de rebondir sur l’affaire de racisme pour rendre publique sa propre histoire.
Cette fois-ci, la réaction ne s’est pas fait attendre. La logeuse indélicate a été bannie à vie d’Airbnb. Le PDG de la plateforme, Brian Chesky, avait également fait subir le même sort au loueur raciste de Charlotte. La start-up californienne, dont le succès mondial donne des maux de tête à l’industrie hôtelière, a lancé, par ailleurs, une enquête interne pour savoir comment éviter ces débordements discriminants.
En attendant “Noirebnb”
Le problème est, en effet, délicat. Bien plus que pour les plateformes de réservation de chambres d’hôtel, où les établissements ne peuvent pas refuser une location en cas de disponibilité. Sur Airbnb, les utilisateurs sont incités à laisser leur vrai nom et à publier une photo d’eux, pour créer un “climat de confiance”, a précisé David King, le directeur de la “diversité” du groupe californien.
Un système dont peuvent abuser des loueurs racistes. Une étude de la Harvard Business School, publiée en janvier 2016, avait d’ailleurs démontré qu’aux États-Unis, les demandes de loueurs afro-américains avaient 16 % moins de chance que les autres d’être acceptées.
Depuis l’humiliation subie fin mai par l’étudiante d’origine nigériane, d’autres internautes ont commencé à raconter leurs propres mésaventures. L’un d’entre eux, Rohan Gilkes, a même décidé de travailler sur Noirebnb, une plateforme concurrente à Airbnb spécialement conçue pour les personnes afro-américaines.
Reste à savoir ce qu’Airbnb peut faire. La solution la plus simple - des demandes anonymes - est écartée en raison du sacro-saint principe de la “confiance entre loueurs et logeurs”. Mais les sanctions a posteriori et au coup par coup sont un pis aller. Le mal aura déjà été fait, aussi bien pour le client discriminé que pour Airbnb en terme d’image. Le groupe a promis de lancer une campagne “d’éducation” en direction de son personnel et des loueurs.