Accusant l'Arabie saoudite d'entraver l'accès de ses citoyens à La Mecque, l'Iran a annoncé qu'il n'enverrait pas de pèlerins au hajj en 2016. Cette décision scelle l'échec des négociations entamées depuis avril entre les deux pays.
Malgré des semaines de négociations avec Riyad, Téhéran a annoncé, dimanche 29 mai, qu'il n'enverrait pas de pèlerins à La Mecque en 2016. L'Iran a accusé les autorités saoudiennes d'entraver le "droit absolu des Iraniens d'effectuer le hajj". Les relations entre les deux pays n'ont cessé de se détériorer depuis le précédent grand pèlerinage en septembre 2015, lors duquel une gigantesque bousculade a fait 2 300 morts dont 464 Iraniens.
Riyad et Téhéran, dont les relations diplomatiques sont rompues depuis janvier, menaient depuis avril des discussions difficiles pour fixer les conditions de l'organisation du pèlerinage prévue cette année en septembre. L'Iran a reproché aux Saoudiens de ne pas avoir répondu à ses demandes concernant "la sécurité et le respect des pèlerins iraniens". "Après deux séries de négociations sans résultat à cause des entraves des Saoudiens, les pèlerins iraniens ne pourront malheureusement pas effectuer le hajj", a déclaré dimanche le ministre iranien de la Culture, Ali Janati. Mais pour Riyad, les conditions fixées étaient "inacceptables", a rétorqué le royaume wahhabite dimanche après-midi.
Riyad rejette la faute sur l'Iran
"L'Iran a réclamé le droit d'organiser des manifestations, ainsi que des avantages (...) qui créeront le chaos au hajj, ce qui est inacceptable", a précisé le ministre saoudien des Affaires étrangères. Il faisait allusion aux manifestations dites de "l'aversion des athées", émaillées de slogans hostiles aux États-Unis et à Israël, que les fidèles chiites iraniens tentent chaque année d'organiser lors du pèlerinage en Arabie saoudite sunnite.
En 1987, une manifestation de pèlerins iraniens à La Mecque avait dégénéré en affrontements avec les forces de sécurité saoudiennes, faisant 402 morts, dont 275 Iraniens. Depuis, les pèlerins iraniens ont pris l'habitude de manifester discrètement dans leurs camps pendant le hajj pour éviter tout contact avec les forces de sécurité saoudiennes.
Le petit pèlerinage suspendu depuis avril 2015
Le 24 mai, une délégation iranienne était rentrée bredouille après une nouvelle mission en Arabie saoudite pour tenter de trouver un accord sur le pèlerinage de ses citoyens. "Le ministère saoudien du Hajj et ses responsables n'avaient pas l'autorité nécessaire pour prendre des décisions", avait alors déploré Saïd Ohadi, président de l'Organisation iranienne du hajj, en précisant que les Saoudiens n'avaient pas accepté les conditions de l'Iran. Le ministère saoudien du hajj avait en revanche tenu la partie iranienne responsable.
Depuis avril 2015, l'Iran a également suspendu la oumra (le "petit pèlerinage" à la Mecque que les musulmans peuvent effectuer à tout moment) après l'agression de deux jeunes pèlerins iraniens par des policiers saoudiens. Environ 500 000 pèlerins se rendaient chaque année en Arabie saoudite pour ce petit pèlerinage, tandis que quelque 60 000 Iraniens s'étaient rendus à la Mecque pour le grand pèlerinage en 2015.
Ce sera la seconde fois en près de 30 ans que les Iraniens n'iront pas en Arabie saoudite pour le hajj, l'un des cinq piliers de l'islam que tout fidèle est censé accomplir au moins une fois dans sa vie s'il en a les moyens.
Avec AFP