
Alors que les partisans du candidat réformateur Mir Hossein Moussavi comptaient manifester à nouveau à Téhéran ce lundi, le pouvoir a décidé d'interdire toute manifestation. Certains journaux contestataires ont par ailleurs été suspendus.
Le gouvernement iranien a durci, lundi, son attitude face aux manifestants qui protestent depuis samedi dans les rues de la capitale, Téhéran, contre l’irrégularité de l’élection présidentielle. Signe de l’inquiétude du régime, le président iranien, Mahmoud Ahmadinejad, a retardé de vingt-quatre heures un déplacement prévue de longue date en Russie. Celui-ci devait participer à Ekaterinbourg à un sommet des États d'Asie centrale.
En l’absence d’informations fiables, aucune indication n’était disponible lundi en milieu de journée sur une éventuelle extension du mouvement de contestation à d’autres villes de province.
Prises de court par la mobilisation, les autorités ont décidé d’interdire toute manifestation des partisans du réformateur Mir Hossein Moussavi, crédité de 33,75 % des voix par les résultats officiels. L’interdiction a été rendue publique alors qu’une nouvelle manifestation était annoncée dans la journée. Mir Hossein Moussavi avait appelé ses partisans à marcher pacifiquement de la place Enqelab à la place Azadi, en plein centre de la capitale.
"Cette décision est très claire. Il n’est pas question que les partisans de Moussavi continuent de manifester" dans les rues et à provoquer "des troubles", explique à FRANCE 24 le correspondant de l’AFP à Téhéran, Siavosh Ghazi.
Des manifestants "déterminés à poursuivre" le mouvement
Ce durcissement du régime ne semble pourtant pas dissuader les protestataires. À en croire des partisans de Moussavi cités par les agences de presse, des groupes de manifestants n’excluent pas de se rassembler dans plusieurs endroits de Téhéran.
Plus que jamais "en colère", les partisans de Moussavi paraissent "déterminés à poursuivre" leur mouvement de protestation, estime le correspondant de l’AFP.
Interrogée par FRANCE 24, Sasfran Assadi, qui habite Téhéran, témoigne de l’esprit de résistance dont font preuve ses concitoyens. Sasfran Assadi parle d’Iraniens décidés à battre le pavé tant que le régime s’en tiendra aux résultats officiels. "Nous manifestons parce que les chiffres ont été inversés", raconte-t-elle.
Celle-ci ironise encore sur le "show très rigolo" d’Ahmadinejad, allusion à la manifestation qui a rassemblé, dimanche, dans le centre de la capitale, des milliers de partisans du président contesté. "C’est une image trompeuse" qui ne reflète pas le sentiment de la majorité des Iraniens, explique-t-elle.
Réza Pahlavi, fils du dernier Shah d’Iran, qualifie les manifestations de "processus de désobéissance civile" et y voit une preuve du "refus du régime" par le peuple iranien. Les résultats officiels et la répression du mouvement de contestation constituent une "déclaration de guerre" à la population, lance-t-il depuis Washington.
La presse muselée
Autre signe d'un raidissement des autorités, l'engagement d'une opération coup de poing contre la presse. Kalameh Sabz, journal exprimant les positions de Mir Hossein Moussavi, a ainsi été suspendu.
Plusieurs médias étrangers accusent, quant à eux, le pouvoir d'avoir empêché leurs journalistes de couvrir les manifestations. Les chaînes de télévision publiques allemandes ARD et ZDF dénoncent des mesures destinées à maintenir leurs équipes à distance. La BBC parle d’un brouillage "en provenance d'Iran" affectant ses émissions au Proche-Orient et en Europe.
Selon le quotidien iranien Sarmayeh, Velayat, un autre journal iranien, a lui aussi été suspendu, après avoir publié une caricature de Mahmoud Ahmadinejad. Aucune précision n'est fournie sur la teneur du dessin. Sarmayeh se contente de parler du dépôt d’une plainte pour "insulte" au président. "Cela montre la détermination du pouvoir à reprendre le contrôle de la situation", observe le correspondant de l’AFP à Téhéran.