
À la veille de l'ouverture d'un salon du Bourget plombé par la crise et l'accident de l'A330 du vol AF 447, le constructeur européen EADS reste optimiste. Et prévoit de beaux jours pour l'aéronautique civile.
REUTERS - A la veille de l'ouverture du salon aéronautique du Bourget, EADS se veut optimiste quant aux perspectives à long terme de l'aéronautique civile et envisage une augmentation des cadences de production d'Airbus dès que la conjoncture témoignera de signes de reprise concrets.
La première division du groupe européen d'aéronautique et de défense vise toujours 480 livraisons cette année - à peu près autant qu'en 2008 -, mais a réduit sa production ces derniers mois à l'aune de la crise et du tarissement du crédit qui pénalise sévèrement les achats d'avions des compagnies aériennes.
Airbus, comme son concurrent américain Boeing , veut par tous les moyens éviter la constitution de stocks coûteux. Dans le même temps, ses équipes et celles d'EADS n'étant pas en mesure de prévoir précisément quant interviendra le redémarrage de l'économie, il ne souhaite pas se faire surprendre.
"Nous sommes prêts à adapter la production, Airbus l'a déjà fait", a déclaré Louis Gallois, président exécutif d'EADS, lors d'un séminaire de presse organisé ce week-end.
"Nous disposons de la flexibilité pour poursuivre les ajustements sans licencier, même s'il y a des limites. Mais nous sommes également prêts à augmenter la production à nouveau [...] quand cela sera nécessaire, et cela sera nécessaire sur le long terme", a-t-il ajouté, avant de rappeler qu'Airbus affichait un carnet de commandes total supérieur à 3.500 appareils.
Pour l'heure, le constructeur prévoit toujours de réduire les cadences de production de ses monocouloirs (les avions de la famille A320) de 36 à 34 appareils à partir d'octore.
Tom Enders, président d'Airbus, a toutefois fait observer que son entreprise avait pratiqué une politique de "surréservations" pour parer aux annulations et qu'elle devait être en mesure, le cas échéant, de livrer ses clients en 2010 et au-delà.
"Nous voulons sécuriser toutes les livraisons (le constructeur est payé en intégralité à ce stade, ndlr) et sommes prêts à soutenir nos clients financièrement dans certains cas", a-t-il expliqué. "Le financement des compagnies reste difficile mais 40% des livraisons devraient être garanties par des agences de crédit export en 2009."
"Et en dépit du retournement de cycle actuel, nous pensons toujours que le trafic aérien devrait doubler d'ici aux 15 prochaines années", a-t-il mis en avant.
SCENARIOS
Pour l'heure, Louis Gallois a indiqué qu'il était encore très difficile de prévoir une reprise tangible de l'activité économique.
"Nous n'avons pas de visibilité. Nous évaluerons en 2010 la profondeur de la crise", a-t-il dit, "et nous travaillons sur plusieurs scénarios".
Tom Enders a de son côté confirmé qu'Airbus échouerait très certainement à enregistrer 300 commandes brutes cette année, mais qu'il ne "sacrifierait" pas les marges aux ventes.
D'après les dernières estimations de l'Association internationale du transport aérien (IATA), les compagnies aériennes devraient perdre neuf milliards de dollars en 2009.
Louis Gallois a reconnu que cette édition du salon du Bourget devrait donc recenser moins de commandes d'avions que lors des précédentes éditions. Certains spécialistes attendent tout de même quelques achats d'avions émanant de compagnies d'Asie ou du Moyen-Orient et des annonces de partenariats.
Interrogé sur l'état d'avancement du programme d'avion de transport militaire A400M, en retard de trois à quatre ans, le président exécutif d'EADS a souligné que les négociations, "intenses" et "constructives", se poursuivaient avec les pays clients et qu'un nouveau calendrier de livraison serait probablement arrêté d'ici au 31 décembre.
En attendant, les ministres de la Défense des sept principaux pays concernés par le programme - France, Allemagne, Grande-Bretagne, Espagne, Belgique, Luxembourg et Turquie - se retrouveront à Séville, en Espagne, le 22 juin pour une réunion décisive au cours de laquelle ils aborderont les questions liées au calendrier, aux spécifications de l'appareil et à d'éventuelles pénalités.
A ce jour, les dépassements du programme A400M, dont le développement est estimé à quelque 20 milliards d'euros, sont supérieurs à deux milliards d'euros et EADS anticipe une charge financière "significative" au premier semestre 2009.
"Je ne sais pas si le programme sera profitable pour les 180 premiers appareils (ceux commandé par les sept pays de l'Otan, ndlr) mais cet avion jouit d'un immense potentiel à l'exportation", a fait valoir Louis Gallois.
Le dirigeant a également répété qu'EADS envisageait toujours de croître grâce à des acquisitions dans les services, la défense et la sécurité une fois que l'environnement économique se serait stabilisé.