Le musicien Papa Wemba ne montera plus sur scène. La star de la rumba congolaise est décédée après s'être évanoui sur la scène d'un festival de musique à Abidjan. À 66 ans, il laisse derrière lui une œuvre dense, forte d'une cinquantaine d'albums.
Jules Shungu Wembadio Pene Kikumba, de son nom d'artiste Papa Wemba, est décédé à Abidjan, dimanche 24 avril, à l'âge de 66 ans. La veille, lors d'un concert pour le Festival des musiques urbaines d'Anoumabo (Femua) dans la métropole ivoirienne, il avait été victime d'un malaise sur scène et évacué d'urgence par les secours.
"Il était 5h30 du matin, rapporte Anne Sylvestre-Treiner, correspondante de France 24 à Abidjan. La fête battait alors son plein à Anoumabo, le quartier populaire où a lieu le festival tous les ans. Papa Wemba, qui était l’artiste le plus attendu de la soirée, allait entamer sa quatrième chanson quand tout à coup le chanteur congolais s’est effondré sur scène. Immédiatement, les secours sont arrivés et il a été évacué vers l’hôpital le plus proche."
À Abidjan, l’émotion est très forte, indique Anne Sylvestre-Treiner. "Les amateurs de musique que l’on rencontre depuis ce matin au Femua sont abattus. Mais l’onde de choc va aller bien au-delà des frontières ivoiriennes. Papa Wemba, nous dit-on, était un artiste irremplaçable, un homme pluriel qui a su transcender les générations et s’adapter à son temps. C’était un ambassadeur du Congo et de l’Afrique."
En avril 2014, France 24 recevait Papa Wemba pour son album "Maître d’école".
"Papa Wemba voulait mourir sur scène, c'est ce qu'il m'a confié il y a deux semaines au téléphone", a raconté A'Salfo, le leader du groupe ivoirien Magic System, promoteur du Femua. Selon un journaliste qui l'a interviewé dans sa chambre d'hôtel avant le concert, a-t-il encore témoigné, "Papa Wemba présentait des signes de fatigue. Il buvait de l'eau à chaque phrase".
À 66 ans, il laisse derrière lui une œuvre foisonnante, plus d'une cinquantaine d'albums réalisés entre 1970 et 2014, dont le plus récent "Maître d'école". Pour la sortie de ce dernier, Papa Wemba s'était rendu sur le plateau de France 24, où il avait expliqué avoir ressenti le besoin de revenir aux origines de la rumba congolaise.
De Paris à Kinshasa, les hommages au "rossignol" de la musique congolaise se sont multipliés. En République démocratique du Congo, le ministre de la Culture Banza Mukalay s'est dit "surpris" et "attristé", évoquant "une grande perte pour la musique". "C'est une icône, un artiste de talent, un modèle qui vient de partir", a-t-il encore déclaré, assurant que "les dispositions sont prises pour que ses funérailles se passent dignement". Selon lui, le chanteur sera en effet "enterré ici en RDC".
Sur Twitter, les premiers hommages ont également commencé à affluer peu après l’annonce de son décès. Le rappeur français Passi a envoyé ses pensées à l'artiste congolais : "Merci pour ta voix, tes chansons, ta sympathie et pour cet héritage artistique merci pour tout..."
De nombreux fans ont comparé la nouvelle au choc provoqué jeudi soir par le décès de la star américaine Prince.
Né en 1949 sous le nom de Jules Shungu Wembadio Pene Kikumba, Papa Wemba tenait sa passion du chant de sa mère, une "pleureuse" qu'il accompagnait aux veillées funèbres.
Après des débuts dans des chorales religieuses, il arrive à Kinshasa à la fin des années 60 où il participe, en 1969, à la création d'un des principaux groupes zaïrois des années 70, Zaïko Langa Langa, qui dépoussière la rumba traditionnelle. En 1977, il crée le groupe Viva La Musica et devient une star en Afrique centrale.
Dans les années 80, les producteurs européens s'intéressent à lui. Il finit par s'installer en France en 1986. Le chanteur et auteur-compositeur s'était fait connaître par des tubes comme "Analengo", "Maria Valencia" ou "Yolele". Papa Wemba fut également l’un des premiers artistes congolais à signer avec Real World, la maison de disque de Peter Gabriel chez qui il avait sorti trois albums.
Dans les années 2000, il se fait connaître dans la rubrique faits divers avec une condamnation en France pour aide au séjour irrégulier d'étrangers sous couvert de ses activités musicales. Il a passé plus de trois mois en détention en 2003 dans le cadre de cette affaire.
Avec AFP