Le président de Djibouti, Ismaïl Omar Guelleh, a été réélu vendredi dès le premier tour de l'élection présidentielle pour un quatrième mandat consécutif. Une partie de l'opposition a boycotté le scrutin, dénonçant une "mascarade électorale".
Sans surprise, le président de Djibouti Ismaïl Omar Guelleh, 68 ans, au pouvoir depuis 1999, a été réélu, vendredi 8 avril, pour un nouveau mandat de cinq ans, au premier tour d'un scrutin boycotté par une partie de l'opposition et placé sous l'étroite surveillance des forces de sécurité.
Ismaïl Omar Guelleh a été réélu avec 86,68 % des voix, selon des résultats communiqués samedi par le ministre de l'Intérieur Hassan Omar Mohamed. Le principal candidat d'opposition Omar Elmi Khaireh arrive en deuxième position avec seulement 7,32 % des voix. Les quatre autres sont loin derrière : Mohamed Daoud Chehem (opposition) avec 2,28 %, Mohamed Moussa Ali (indépendant), 1,53 %, Hassan Idriss Ahmed (indépendant), 1,39 %, et Djama Abdourahman Djama (indépendant) 0,79 % des voix, selon les résultats officiels.
Officiellement, le taux de participation a atteint 68 %. Vendredi, à Djibouti-ville, les électeurs ont pourtant semblé bouder les urnes et la commission électorale avait même décidé, devant la faible participation constatée dans la journée, de prolonger d'une heure les opérations de vote.
"Le peuple djiboutien a décidé de me confier à nouveau la plus haute charge de l'État [...] J'ai compris son espérance et je vais me remettre au travail dès demain pour prendre à bras le corps les défis que nous posent le chômage et le mal-logement", a déclaré le président réélu dans une allocution diffusée samedi à la télévision.
Le président-candidat "recueille entre 74 et 75 % des voix à Djibouti (la capitale) et Balbala", un immense quartier populaire, qui comptent à eux seuls pour environ 60 % de la population de ce petit pays de la corne de l'Afrique.
Le président sortant est par ailleurs crédité de 94 % des voix à Ali Sabieh, la deuxième ville du pays, ainsi qu'à Obock, la quatrième, selon les résultats annoncés dès vendredi soir par le Premier ministre.
"Une mascarade électorale"
Quelque 187 000 électeurs, soit un peu moins du quart de la population (875 000 habitants), étaient appelés aux urnes.
Dans un bureau de vote près du port de Djibouti, un électeur, Kamil Habib ne tarissait pas d'éloges sur le président: "Je suis fier de mon président. Il n'y a pas d'autre choix que lui".
Mais à Balbala, quartier pauvre et contestataire de la capitale, le discours était tout autre. De jeunes chômeurs faisaient le pied de grue en regardant des électeurs se présenter à un bureau de vote.
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"Je n'ai pas voté. Je préfère rester chez moi", a lancé l'un d'eux, découragé par les résultats des élections législatives de 2013, officiellement remportées par la coalition présidentielle, mais que l'opposition estime avoir gagnées.
Ismaïl Omar Guelleh est donc réélu pour un quatrième mandat consécutif de cinq ans après avoir fait modifier la Constitution en 2010 pour en supprimer toute limitation. Il était opposé à cinq autres candidats, dont trois indépendants.
L'opposition, qui avait réussi à se rassembler pour les élections législatives de 2013 sous la bannière de l'Union pour le salut national (USN), se présentait divisée à la présidentielle et une partie d'entre elle, dénonçant "une mascarade électorale", avait appelé au boycott.
Une croissance de 6 % qui ne profite pas à la population
L'autre partie, qui présentait des candidats, a affirmé que certains de ses représentants avaient été refoulés dans plusieurs bureaux vendredi. Une absence confirmée par des observateurs de l'Union africaine lors de la fermeture des bureaux de vote. "Nous demandons au gouvernement de réparer cela et d'organiser une élection transparente, libre, équitable et juste", a déclaré à l'AFP l'un des candidats, Djama Abdirahman Djama (indépendant).
Djibouti, ancienne colonie française où plusieurs grandes puissances (États-Unis, France, Japon et bientôt la Chine) disposent de bases militaires pour profiter de son positionnement stratégique entre l'océan Indien et le canal de Suez, n'a connu que deux présidents depuis son indépendance en 1977.
itLes organisations de défense des droits de l'Homme ont dénoncé ces derniers mois la répression de toute voix dissidente, symbolisée selon elles par le "massacre" du 21 décembre 2015.
L'intervention de la police lors d'une cérémonie traditionnelle à Balbala avait fait 27 morts, selon la Fédération internationale des ligues des droits de l'Homme (FIDH). Le bilan officiel est de sept morts.
Le président Guelleh entend incarner la stabilité et fait valoir la nécessité pour Djibouti de poursuivre sa politique de grands travaux (ports, chemins de fer, oléoducs, gazoducs...), largement financés par la Chine.
Ces projets favorisent la croissance économique (6 % en 2014, selon la Banque mondiale) mais la population n'en profite pas. Le taux de chômage avoisine les 60 %, et 79,4 % des Djiboutiens vivent en-dessous du seuil de pauvreté relative.
Avec AFP