A l’instar des Américaines de l’Indiana qui avaient inondé leur gouverneur pro-life de messages, les Polonaises ont décidé d’envoyer des rapports sur leurs cycles menstruels au gouvernement qui menace un droit à l'avortement déjà exceptionnel.
On sait la Pologne, pays à forte tradition catholique, frileuse sur la question de l’avortement. Elle a d’ailleurs des lois en la matière qui comptent parmi les plus rigides d’Europe : aujourd’hui, il n’est possible d’y avorter qu’en cas de viol, de risques pour la santé de la mère, ou si le fœtus présente d’importantes malformations.
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La semaine dernière, les Polonais ont appris que l’avortement, même dans ces cas particuliers, pourrait être purement et simplement interdit dans leur pays. Et Beata Szydlo, la Première ministre, soutient sans complexe cette réforme au top du progrès.
Si des milliers de citoyens ont manifesté dimanche 3 avril devant le siège du gouvernement à Varsovie, d’autres ont décidé de frapper plus plus fort… et plus près : grâce à une page Facebook divulguant le numéro de téléphone et l’email de Mme Szydlo, n’importe quelle femme peut désormais troller cette dernière en lui envoyant un rapport sur l’état de ses menstruations, rapporte le site américain Quartz.
Et donc l’inonder de messages l’informant que ses maux de ventre viennent de reprendre, qu’elle entre dans son 3ème jour de règles ou qu’elle est en pénurie de tampons.
Regroupé sous le hashtag #TrudnyOkres (#RèglesDouloureuses), ce mouvement s’inspire directement de l’action des militantes pro-choix de l’Indiana, aux Etats-Unis, qui avaient pris pour cible le gouverneur Mike Pence. Après avoir signé un projet de loi anti-avortement, le Républicain avait été soumis au même spamming, ses coordonnées ayant aussi été divulguées.
"Le gouvernement polonais veut contrôler notre utérus, nos ovaires et nos grossesses. N’est-ce pas adorable qu’il s’en soucie autant ?", est-il écrit en accroche sur la page, en polonais et en anglais. "Comme l’ont fait les femmes dans l’Indiana, inondons notre Première ministre d’informations, de questions et de doutes à propos de nos cycles mensuels, de nos règles, de notre ovulation ou de nos sécrétions vaginales. Donnons-lui un aperçu complet de ce qu’il se passe dans nos vies (…) Peut-être alors qu’elle se souviendra qu’elle est une femme aussi."
Sur la page Facebook du mouvement, elles sont ainsi des dizaines à relayer les messages qu'elles ont envoyé par courrier, mail ou par SMS à la chef du gouvernement.
"Madame la Première ministre, pardonnez-moi, je vais faire vite. Mes règles sont terminées depuis quelques jours (…) J’ai eu deux jours de retard, puis plus rien pendant une journée, puis encore des saignements pendant une journée. Étrange, n’est-ce pas ? Elles sont aussi très douloureuses, moi que n’avais que du Ketonal (un anti-inflammatoire). J’ai cru que j’allais y passer. Madame la Première ministre, comment faites-vous face à la douleur de vos menstruations ?" "Chère Première ministre. Ceci est mon deuxième message de la journée, mais je n’arrivais pas à faire un choix. Mon partenaire m’a demandé pourquoi je ne voulais pas avoir de rapports sexuels avec lui. Je lui ai dit la vérité, à savoir que ni vous ni Monsieur le Président n’était d’accord avec ça (...) Après tout, la propriété du gouvernement est la propriété du gouvernement."Et d'autres de poursuivre : “Chère Madame la Première ministre, aujourd'hui je ressens un picotement dans mon ovaire gauche. Je pense que je suis en train d'ovuler" ; "en ce moment même, mes seins sont tendus, mes jambes et mon bas ventre sont gonflés et j'ai déjà mangé tous mes chocolats de Pâques et la moitié de ceux de mon mari."
Suite aux manifestations, Beata Szydlo a fait machine arrière, affirmant que l'interdiction totale de l'avortement n'était "pas à l'ordre du jour en Pologne". La proposition de réforme, qui émane d'un groupe citoyen soutenu par l'Église catholique polonaise, n'a en effet pas encore récolté les 100 000 signatures nécessaires à son étude et à sa transformation en projet de loi. Quant à son enthousiasme pour cette loi, manifesté lors d'une interview à la radio, la Première ministre a rappelé qu'il relevait "de ses opinions personnelles".
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