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Les migrants arrivant en Grèce à partir de dimanche seront renvoyés en Turquie

Les membres de l'UE ont conclu vendredi un accord avec Ankara : tous les migrants arrivant dans en Grèce seront renvoyés vers la Turquie. Pour chaque Syrien renvoyé, un autre Syrien sera réinstallé en Europe, selon le principe du "un contre un".

Tous les immigrants illégaux arrivant en Grèce en provenance de la Turquie seront reconduits, selon un accord entre l'Union européenne (UE) et la Turquie approuvé vendredi 18 mars par les représentants des Vingt-Huit .

"C'est un jour historique", a réagi le Premier ministre turc Ahmet Davutoglu depuis Bruxelles. "Nous avons réalisé aujourd'hui que la Turquie et l'UE avaient la même destinée", a-t-il déclaré.

Les dirigeants européens doivent désormais se retrouver avec le Premier ministre turc Ahmet Davutoglu pour parapher ensemble l'accord, dont la mesure phare est le renvoi de tous les nouveaux migrants arrivant en Grèce depuis la Turquie, y compris les demandeurs d'asile.

Ces renvois "commenceront à partir du 4 avril", a assuré Angela Merkel, qui a joué un rôle clé dans la conclusion de cet accord, quitte à froisser des partenaires européens agacés par ses initiatives.

La chancelière allemande a déclaré que l'accord mettrait à mal le business des trafiquants et qu'il envoyait un "message clair" de dissuasion en direction des migrants à venir. Cela veut dire que "quiconque emprunte cette route dangereuse ne risque pas seulement sa vie, mais il sait aussi qu'il aura peu de chance de réussite", a-t-elle ajouté.

"Un contre un"

"Pour chaque Syrien renvoyé vers la Turquie depuis les îles grecques, un autre Syrien sera réinstallé depuis la Turquie vers l'UE", prévoit le projet d'accord selon le principe du "un pour un". Et "la priorité sera donnée" aux migrants n'ayant pas tenté de se rendre irrégulièrement dans l'UE.

Ce qui signifie que les Syriens renvoyés de Turquie figureront en bas de la liste des personnes éligibles à une réinstallation. Ce dispositif serait dans un premier temps plafonné à 72 000 places offertes en Europe.

Certains États membres étaient réticents jusqu'au dernier moment, craignant une illégalité du renvoi de demandeurs d'asile ou rechignant à faire trop de concessions à la Turquie, taxée par certains de dérive autoritaire.

"Personne n'en est fier"

"Ce n'est pas un très bon accord, mais on est bien obligé. Personne n'en est fier, mais on n'a pas d'alternative", a résumé un diplomate européen.

L'ONU avait mis en garde contre un "risque de possibles expulsions collectives et arbitraires", mais la Commission européenne a assuré que le mécanisme prévu était dans les clous du droit international.

Des procédures individuelles seront garanties à chaque demandeur d'asile qui arrivera sur les côtes grecques à partir de dimanche, avec un examen individualisé de sa requête et le droit de faire appel de la décision de renvoi.

"C'est un travail herculéen qui nous attend, et spécialement la Grèce", a reconnu le président de l'exécutif européen Jean-Claude Juncker. Une logistique complexe va en effet devoir être mise en place sur les îles grecques en un temps record, avec notamment l'envoi de juges sur place.

La Turquie récompensée

En échange de la contribution d'Ankara à la résolution de la crise migratoire, la Turquie espère obtenir la libéralisation des visas pour les citoyens turcs, l'accélération du processus d'adhésion de la Turquie à l'UE et une aide financière supplémentaire de la part de l'Europe. L’UE lui a déjà promis trois milliards d'euros.

Côté français, le président François Hollande a déclaré que la négociation sur l'adhésion de la Turquie à l'UE ne préjugeait en rien de son résultat. "Il n'y a pas de changement ni dans la position de la France ni dans la position de l'Europe. La position de la France, c'est que négociation ne veut pas dire adhésion et que les négociations ne préjugent en rien de ce que sera le résultat", a-t-il déclaré, soulignant que le processus prendrait "des années".

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Erdogan critique l’Europe

Alors qu’Ahmet Davutoglu négociait à Bruxelles pour trouver une issue à la crise migratoire, le président turc Recep Tayyip Erdogan s’est indigné vendredi des positions européennes, invitant l’UE à se pencher sur son propre traitement des réfugiés avant de dire à la Turquie ce qu'elle doit en faire.

"Alors que la Turquie accueille trois millions (de migrants), ceux qui sont incapables de faire de la place à une poignée de réfugiés et qui, au cœur de l'Europe, maintiennent des innocents dans des conditions honteuses, doivent d'abord regarder chez eux", a-t-il déclaré.

Le chef de l'État s'est par ailleurs indigné des critiques de l'UE concernant le respect des droits de l'Homme et a reproché à certains États membres de "danser sur un champ de mines" en soutenant des organisations terroristes. Plusieurs dirigeants européens avaient exprimé leur préoccupation au sujet des pertes civiles dues aux opérations de l'armée turque contre les séparatistes du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK).

Avec AFP et Reuters