Au lendemain du revers essuyé par le parti de Gordon Brown lors des élections européennes, FRANCE 24 est allée à la rencontre des sympathisants du Labour dans le sud de Londres, l'un des traditionnels bastions travaillistes.
Situé au cœur de la circonscription de Camberwell et Peckham, le marché d’East Street est une icône pittoresque du sud de la capitale anglaise. Harriet Harman, présidente du groupe travailliste à la Chambre des communes, officie dans ce bastion de la gauche britannique. En 2005, elle y a été élue haut la main avec plus de 65 % des suffrages. Mais aujourd’hui dans la rue, les émissaires de Gordon Brown ne sont plus vraiment les bienvenus. "Avant, je votais pour les travaillistes, mais maintenant je soutiens les libéraux démocrates", confie un vieillard. "Je ne suis pas allée voter car nos députés sont des bons à rien ! Tout ce qu’ils veulent, c’est s’en mettre plein les poches !", s’emporte une passante.
D’autres électeurs se délectent de voir leur gouvernement en pleine déconfiture. "Les gens sont stupéfaits de la vitesse à laquelle le gouvernement s’effondre. Le Parti travailliste est en train de perdre complètement la face. On s’amuse pas mal quand on voit ça à la télé !"
La déconvenue des uns ouvre, bien-sûr, des possibilités pour les autres. Oliver Wooller, président de l’Association des conservateurs pour cette même circonscription de Camberwell et Peckham ne cache pas sa satisfaction et attend les prochaines élections parlementaires avec impatience. "Le fait que dans ce bastion travailliste les gens soient prêts à prendre en considération d’autres alternatives montre que l’avenir du Labour est sans espoir. S’ils ne gagnent pas ici, ils ne gagneront nulle part. Pour nous, c’est une très belle opportunité !"
Un mélange explosif
Le Labour est un parti en ruines, c’est indéniable. Le scandale récent des notes de frais abusives des parlementaires y est pour beaucoup. Mais ce n’est pas l’unique explication. Pour Rodney Barker, professeur en sciences politiques, d’autres facteurs sont à prendre en compte : "S’il n’y avait que le scandale des notes de frais, s’il n’y avait que la crise économique mondiale, s’il n’y avait qu’un leader incapable de diriger ou s’il n’y avait qu’un gouvernement à bout de souffle, la survie serait possible. Le problème, c’est la conjonction de ces facteurs. Isolés, ils ne sont pas bien dangereux mais lorsqu’ils s’ajoutent les uns aux autres, cela fait un mélange explosif, et c’est ce qui est en train de se passer."
Et c’est précisément le résultat du scrutin européen qui pourrait bien allumer la mèche. Avec moins de 16 % des suffrages pour les candidats travaillistes, le Labour enregistre son pire score à une élection depuis la Première Guerre mondiale. Mais jusqu’à quand Gordon Brown pourra-t-il bien tenir les rangs ?