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La famille de l'ex-chef rebelle angolais Jonas Savimbi attaque "Call of Duty"

Trois des enfants du défunt chef rebelle angolais Jonas Savimbi ont attaqué en diffamation l'éditeur du jeu vidéo "Call of Duty". Un personnage ressemblant à leur père y est mis en scène comme un personnage "barbare".

Un jeu vidéo peut-il porter atteinte à l'honneur d'une personnalité historique et de sa famille ? C’est ce que pensent en tous cas les proches du défunt chef rebelle angolais Jonas Savimbi. Ils estiment que ce dernier apparaît comme un "barbare" dans le jeu à succès "Call of Duty".

Trois des enfants de Jonas Savimbi, mort en 2002, installés en région parisienne, ont attaqué en "diffamation" Activision Blizzard, la filiale française de l'éditeur américain du jeu de tir et de guerre, devant le tribunal de grande instance de Nanterre. Une première en France pour un jeu vidéo, selon les avocats des parties. Ils réclament 1 million d'euros de dommages et intérêts et le retrait de la version incriminée. Les juges civils examineront l'affaire le 3 février.

"Un gros bêtasson qui va tuer tout le monde"

Seigneur de guerre aussi charismatique que controversé, Jonas Savimbi a pris la tête de l'Union nationale pour l'indépendance totale de l'Angola (Unita), mouvement rebelle qu’il dirigea d'une main de fer lors de la guerre civile qui a déchiré l'ancienne colonie portugaise à partir de son indépendance en 1975.

Fils d'un pasteur protestant, de formation maoïste mais longtemps allié des États-Unis contre le régime pro-communiste du Mouvement populaire de libération de l'Angola (MPLA), il était presque toujours vêtu de son uniforme militaire, revolver à la hanche. Sa mort au combat en 2002 avait finalement mis un terme à 27 ans de conflit, permettant la signature d'un cessez-le-feu.

Alertés par les réseaux sociaux, les enfants de Jonas Savimbi ont reconnu dans le visage d’un des personnages de l'opus "Black Ops II" de "Call of Duty", sorti en 2012, celui de leur père. Celui-ci y est présenté, selon les termes de leur avocate, Me Carole Enfert, comme un "gros bêtasson qui va tuer tout le monde". Dans une séquence du jeu, le vrai-faux Savimbi, béret rouge et tenue militaire, apparaît dans le feu des rafales, haranguant ses troupes depuis un char, lance-grenades à la main et criant notamment : "Il faut les achever !".

>> À lire sur France 24 : L’ex-dictateur panaméen Noriega part en guerre contre "Call of Duty"

Pour la famille, cette mise en scène "outrancière" ne correspond pas à la personnalité de "leader politique" et de "stratège" de Jonas Savimbi. "Chef de guerre, oui", mais pas seulement : "Il a été un personnage important de la Guerre froide, il a fait partie de l'échiquier mondial, il était défendu par les grands de ce monde, il a été ami de Mandela", insiste Me Carole Enfert.

Dans le camp des "gentils"

Activision Blizzard réfute avoir fait dans la caricature. L'éditeur du jeu estime avoir représenté Jonas Savimbi "pour ce qu'il était" : "un personnage de l'histoire angolaise, un chef de guérilla qui combat le MPLA", argumente Me Étienne Kowalski. L'avocat de l’entreprise estime d’ailleurs que le jeu montre le chef rebelle angolais sous un jour "plutôt favorable", en "gentil qui vient en aide au héros".

Ce n'est pas la première fois que des figures politiques font une apparition dans ce jeu de tir à la première personne : Fidel Castro et John F. Kennedy y ont déjà été mis en scène tout comme l'ex-dictateur déchu du Panama Manuel Noriega, 80 ans et actuellement en prison. Ce dernier avait lancé une offensive judiciaire en 2014 aux États-Unis, accusant l'éditeur d'utiliser son image sans sa permission et de l'incarner en traître patibulaire. Sa plainte avait été rejetée. "Call of Duty" s'inspire d'événements historiques, avait alors argué Activision Blizzard.

Avec AFP