Un camp d’accueil d’urgence doit ouvrir en février à Cologne, ville marquée par une vague d'agressions sexuelles à la Saint-Sylvestre. Aische Westermann, du "Conseil aux réfugiés", explique comment s'y passe désormais l’accueil des migrants.
Cologne ne s’attendait pas à ça. Depuis l’implication probable de migrants dans des agressions sexuelles, la nuit du 31 décembre 2015, cette ville de l'Ouest est devenue un symbole récupéré par des mouvements islamophobes comme Pegida.
Un coup dur pour les acteurs de terrain, autorités et bénévoles, qui ont travaillé pour permettre à Cologne d’absorber l’afflux de migrants sans heurts. Et des efforts, la quatrième ville d’Allemagne a dû en faire pour accueillir plus de 13 000 réfugiés en un an. Une vraie course contre la montre pour mettre en place les structures d’accueil.
Aische Westermann s’occupe du seul camp d’accueil d’urgence de Cologne pour le “Conseil aux réfugiés”, une organisation qui travaille avec la municipalité pour l’accueil des nouveaux arrivants. Elle explique à France 24 comment les migrants sont pris en charge et quels sont les problèmes rencontrés.
France 24 : Comment fonctionne le camp d’urgence de Cologne ?
Aische Westermann : Pour l’instant, il ne fonctionne pas. Celui qui avait été installé en urgence en août dernier n’était équipé que de tentes et il a été fermé en décembre. Un nouveau doit ouvrir en février dans le sud de la ville. En attendant, les demandeurs d’asile sont répartis là où il y a de la place dans les centres d’accueil de la commune.
Le nouveau camp d’urgence offrira des hébergements en containers de deux étages, avec une capacité totale de plus de 950 personnes, sensiblement plus qu’avant. Les réfugiés y séjourneront entre quatre et huit semaines avant d’être redirigés vers des structures d’accueil avec davantage de place pour vivre.
Cela sera-t-il suffisant pour accueillir tous les nouveaux arrivants ?
On peut difficilement le dire à l’avance. Il vaut mieux attendre le printemps pour se rendre compte de l’ampleur de la vague de nouveaux arrivants à loger. Mais une chose est sûre : à Cologne, tous ceux qui arrivent ont un toit. Mais il y a en a qui doivent dormir à même le sol, donc, en ce sens, on peut dire que ce n’est jamais satisfaisant, ni suffisant pour accueillir tout le monde.
Quels problèmes rencontrez-vous dans ce camp d’urgence ?
Tout d’abord, les migrants n’ont pas forcément les papiers attestant de leur demande d’asile. Normalement, c’est fait à Dortmund, le centre national pour le premier accueil. Mais les autorités y sont parfois débordées et on se retrouve à Cologne à devoir vérifier les documents et les demandes avec ces réfugiés.
Ensuite, il y a la santé et l’hygiène de manière plus générale. Les personnes affectées de maladies graves sont transférées dans des centres médicaux et celles qui peuvent être traitées sur place, le sont. Le voyage les a souvent épuisés et ils ont pu attraper des maladies, sans compter les problèmes plus triviaux, comme les poux.
Comment se passe la cohabitation entre les différents demandeurs d’asile ?
À Cologne, nous avons essentiellement des Syriens, des Irakiens et un nombre grandissant d’Afghans. Il est difficile de répondre à votre question parce que l’un des soucis, justement, est de savoir ce qui se passe réellement dans le camp. Les habitants sont réticents à en parler au personnel sur place.
Nous savons d’expérience qu’il peut y avoir des problèmes de violences sexuelles. C’est pourquoi, à Cologne - et ce n’est pas le cas partout en Allemagne - les hommes et les femmes sont séparés. Mais ça ne règle qu’une partie du problème, car on oublie trop souvent que cette violence peut aussi s’exercer contre les jeunes hommes. Il faut aussi prendre en compte le fort rejet, parfois exprimé violemment, des homosexuels.
Pour améliorer cette cohabitation, et rendre l’atmopshère plus vivable, les personnes qui travaillent dans le camp se montrent très créatives et proposent une large palette d’activités. Dans le nouveau camp, il y aura un système de référents bien identifés pour chaque problématique.
Les événements de la nuit du Nouvel An ont-ils eu un effet sur la politique d’accueil et le travail dans le camp d’urgence ?
Non, pour l’instant le camp dispose toujours des mêmes moyens et nous n’avons pas ressenti de durcissement de la position des autorités. Et, par ailleurs, si le travail au camp peut être un indicateur de l’ambiance générale, nous enregistrons une forte demande pour faire du bénévolat de la part des habitants des quartiers alentour en prévision de l’ouverture du camp en février. Donc la volonté d’aider et d’accueillir des demandeurs d’asile est toujours aussi forte.