Après avoir passé 19 mois en détention provisoire en Chine, l'avocat Pu Zhiqiang, défenseur des droits de l'Homme, a été condamné mardi à trois ans de prison avec sursis pour avoir critiqué le pouvoir sur un réseau social chinois.
L'avocat chinois Pu Zhiqiang, célèbre défenseur des droits de l'Homme en Chine, a été condamné mardi 22 décembre à trois ans de prison avec sursis pour "incitation à la haine raciale" et troubles à l'ordre public.
Pu Zhiqiang, qui a déjà passé 19 mois en détention préventive, a été jugé pour la publication de sept textes sur son compte de microblogging critiquant la politique ethnique du gouvernement de Pékin dans la région du Xinjiang. Fustigeant l'incompétence et les "mensonges" du Parti communiste, il y dénonçait les politiques répressives menées par la Chine au Tibet et dans la région chinoise à dominante musulmane.
L’avocat de 50 ans est également connu pour avoir défendu devant la justice des victimes de camps de rééducation par le travail, dont le célèbre artiste Ai Weiwei et des citoyens exposés à l'arbitraire des autorités chinoises.
Soumis à un contrôle régulier des autorités
Pu Zhiqiang, qui encourait jusqu'à huit ans d'emprisonnement, a finalement écopé d’une moindre peine. Il a été finalement été condamné à trois ans de prison avec sursis, a indiqué son avocat Mo Shaoping. Des médias d'État ont assuré qu'il ne ferait pas appel.
Pointant l'effet pervers de ce sursis, l'avocat de Pu Zhiqiang a fait part de sa colère après l‘énoncé du jugement. "Nous sommes très loin d'être satisfaits, car nous avions demandé l'acquittement de Pu et cette condamnation entérine sa culpabilité", a déclaré Mo Shaoping. Le caractère suspensif de la sentence implique certes que Pu Zhiqiang devrait sortir de prison, "mais il ne sera pas un homme libre (...) et il sera comme avant susceptible d'être arrêté" arbitrairement, a averti l’avocat.
De fait, Pu sera désormais soumis à un contrôle régulier des autorités et devra demander des permissions pour quitter Pékin. La police aura la voie libre pour déterminer s'il enfreint les conditions de sa probation, auquel cas il retournerait derrière les barreaux.
Manifestations réprimées devant la Cour
À la sortie du tribunal pékinois, au moins trois manifestants venus exprimer leur soutien à Pu ont été violemment tenus à l’écart, tandis que des policiers ont repoussé sans ménagement les journalistes à plusieurs centaines de mètres, confisquant momentanément les cartes de presse de certains. Comme au moment du procès, la Cour était entourée mardi d'un dispositif policier massif, dont d'importantes forces de l'ordre en civil, a constaté l'AFP.
"Pu Zhiqiang est un homme bon ! Défendre les gens du peuple est donc devenu un crime ?", a hurlé une militante avant d'être forcée d'entrer dans un fourgon de police par des hommes en civil. "Arrête ta comédie, il y a des journalistes étrangers ici", lui a intimé un officier. "Je ne m'en irai pas ! Pu est innocent", criait une autre jeune femme, avant d'être emmenée manu militari par les forces de l'ordre. Selon l'ONG Amnesty International, une vingtaine des manifestants venus soutenir Pu Zhiqiang le 14 décembre au début de son procès avaient été interpellés par la police, et au moins quatre d'entre eux ont été depuis placés formellement en état d'accusation.
Sous la présidence de Xi Jinping, la Chine a nettement durci la répression des voix critiques émanant de la société civile avec des centaines d'interpellations. Plusieurs dizaines d'avocats défenseurs des droits de l'Homme avaient été détenus en juillet à travers tout le pays.
Avec AFP et Reuters