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Législatives espagnoles : une campagne électorale d'une rare violence

Alors que l'Espagne s'apprête à voter lors de législatives qui pourraient faire entrer au Parlement les partis réformateurs Podemos et Ciudadanos, la campagne se déroule dans un contexte très tendu. Mercredi, Mariano Rajoy a été frappé au visage.

Les élections législatives en Espagne se tiendront le week-end prochain, au terme d'une campagne électorale qui s'est déroulée dans une ambiance particulièrement tendue, voire violente. Le chef du gouvernement conservateur Mariano Rajoy, qui brigue un deuxième mandat, a reçu mercredi 16 décembre un coup de poing au visage alors qu'il faisait campagne dans les rues de Pontevedra, ville de sa Galice natale, au nord du pays.

L'agresseur, un jeune homme de 17 ans, a été rapidement maîtrisé par le service de sécurité et le Premier ministre a aussitôt affirmé que tout allait bien, refusant de suspendre pour une heure seulement son bain de foule. L’enjeu est de taille pour Mariano Rajoy et la situation tendue, à trois jours de législatives auxquelles sa formation, le Parti populaire (PP) arriverait en tête mais avec moins de 30 % des voix, selon les derniers sondages.

Vidéo de Pontevedra où Mariana Rajoy reçoit un coup de poing au visage, le 16 décembre 2015

Le PP reste favori mais son image est entachée par des accusations de corruption, ce que n’a pas manqué de rappeler la socialiste Pedro Sanchez, lors du débat qui l’a opposé à Rajoy lundi dernier. Le candidat du parti socialiste (PSOE) a notamment déclaré que le chef du gouvernement devait être une "personne décente". Et "vous ne l'êtes pas", a-t-il lancé à Mariano Rajoy, qui a jugé que son adversaire formulait des "affirmations misérables et mesquines". Distancé dans les sondages, le candidat socialiste a également attaqué Mariano Rajoy sur son bilan, martelant que le chômage touchait plus de 20 % de la population espagnole.

Podemos et Ciudadanos, les voix de la jeunesse et du changement

Si le débat a marqué les esprits par sa rare violence verbale, il n’a pas vraiment changé la donne politique. À trois jours du premier tour, les électeurs sont nombreux à être indécis. Derrière les deux courants majoritaires, la jeune garde de la gauche et du centre continue sa percée dans les sondages.

>> À lire sur France 24 : "Élections en Espagne : la droite de Mariano Rajoy punie, percée des Indignés"

Podemos, le parti de la gauche anti-austérité, est crédité de 18 % des voix, tandis que Ciudadanos (Les citoyens), la nouvelle formation centriste dirigée par Albert Rivera, approche les 20 % d’intention de vote. Alors que le PP et le PSOE alternent au pouvoir depuis 1982, ces nouveaux partis, qui incarnent le renouveau et la jeunesse espagnole, peuvent changer la règle du jeu.

Lancé en 2014 par Pablo Iglesias, professeur de sciences politiques de 37 ans, Podemos a canalisé l’indignation d’une population écœurée par des scandales de corruption à répétition et acculée par une cure d’austérité drastique. Dirigeants socialistes, au pouvoir jusqu’en 2011, puis conservateurs, ont mis le pays au régime sec après la crise économique de 2008. Mais Iglesias a dénoncé le système, sa corruption et ses injustices, siphonant les voix du parti socialiste, sanctionné par les électeurs pour sa gestion de la crise.

Ciudadanos, au départ un parti régional catalan, s’est quant à lui lancé dans la politique nationale fin 2014 alors que l’Espagne virait à l’optimisme. Il promet de débarrasser l'économie et les institutions de la corruption et du clientélisme, ainsi que de réformer le marché du travail, dans un pays où le chômage dépasse encore 21 %.  Son discours centriste séduit à droite et à gauche et incarne une nouvelle génération de la politique espagnole. 

Risque d'instabilité politique

Alors que Podemos et Ciudanos drainent un électorat jeune, Mariano Rajoy, qui se pose en garant de la stabilité économique et politique, mise sur les électeurs les plus âgés pour rester maître du jeu. Mais ce n’est pas gagné. Avec les 25 à 30 % de voix dont le Parti populaire est crédité, il n’est pas garanti d’obtenir la majorité absolue, et sans cette dernière, il aurait besoin des voix de Ciudadanos pour être investi par le Parlement. Or le chef de Ciudadanos, Albert Rivera, un juriste télégénique de 36 ans, répète qu'il ne va soutenir "ni Rajoy ni (Pedro) Sanchez".

À gauche, s'ils se résolvaient à s'allier, le PSOE et Podemos ne réuniraient pas la majorité des 176 sièges sur 350 pour gouverner, selon les sondages. Une donne complexe qui augure une période d’instabilité politique si aucun parti ne parvient à nouer des alliance pour forme un gouvernement.

Avec AFP