
Le projet de réforme constitutionnelle est soumis à l'approbation des électeurs centrafricains, appelés aux urnes dimanche, dans un climat tendu. Deux personnes sont mortes dans des affrontements à Bangui.
Les électeurs de Centrafrique, près de deux millions de personnnes, votaient, dimanche 13 décembre, à l'occasion du référendum sur le projet de réforme de la Constitution, première étape d’un processus électoral censé sortir le pays de trois ans de violents affrontements intercommunautaires et qui porte notamment sur la réduction du nombre de mandats présidentiels.
Mais le scrutin se déroule dans un climat "chaotique", rapporte Anthony Fouchard, correspondant de France 24 en Centrafrique : des tirs à l'arme lourde ont frappé en milieu de journée le quartier musulman de Bangui, le PK5, où s'affrontaient partisans et opposants au référendum, faisant deux morts.
"Les combats ont commencé par une rafale de kalachnikov, et puis une roquette a explosé dans un arbre, tout près de l’école où le vote devait avoir lieu, tout ça dans le quartier majoritairement musulman du PK5", précise notre correspondant.
Images d'Anthony Fouchard, correspondant de France 24
Les corps de deux personnes décédées étaient entreposés dans la mosquée Ali Babolo du PK5. De sources hospitalières, une vingtaine d'habitants ont été blessés au cours de ces affrontements.
"Le matin, les urnes n’avaient pas pu être acheminées dans le quartier, car des hommes armés avaient bloqué le convoi. L’ONU avait promis aux habitants mécontents d’amener des urnes avant la fin de la matinée et c’est le général Balla Keita en personne, celui qui commande les casques bleus ici, qui est arrivé sur les lieux avec les urnes, les isoloirs et tout le matériel nécessaire. Et c’est quelques minutes après son arrivée que les combats ont commencé. Cela a créé une panique générale dans l’école où patientaient depuis des heures plus de 500 personnes", rapporte Anthony Fouchard, qui se trouvait sur place.
Dans la nuit de samedi à dimanche, des tirs avaient déjà été entendus dans ce quartier, selon la mission de l'ONU en Centrafrique (Minusca). "Des jeunes armés ont patrouillé [dimanche] matin pour empêcher l'agence nationale des élections et l'ONU d'installer les urnes", explique Anthony Fouchard, qui a rencontré des habitants "très déçus de ne pas pouvoir voter". Certains d'entre eux ont entrepris de marcher vers le siège de la Minusca pour faire valoir leurs droits.
Un groupe armé, le SRPC, dirigé par Nourredine Adam, un ex-chef de guerre de la coalition Séléka, a perturbé le scrutin dans l‘est , indique le journaliste. À Kaga Bandoro, fief de cette faction, des urnes ont été brûlées et des agents électoraux tabassés .
"Ce sont également des partisans du SPRC qui ont tiré dimanche à Bangui, ce qui n’a pas empêché les Centrafricains d’aller voter", souligne Anthony Fouchard.
Début du marathon électoral en Centrafrique
Hormis le parti de l'ex-président François Bozizé, dont la candidature à la présidentielle a été invalidée cette semaine, et certains responsables anti-balaka et Séléka, la plupart des partis politiques centrafricains ont appelé à se prononcer en faveur du texte.
Les experts s'accordent à dire que le "oui" devrait l'emporter, dans ce vote qui "marque le début d'un marathon électoral en Centrafrique".
La journée de dimanche a en effet valeur de test avant la présidentielle et les législatives, prévues le 27 décembre, dans un pays dévasté par trois années de violences intercommunautaires. Ces échéances, repoussées plusieurs fois, sont censées clore une transition politique à bout de souffle et permettre un retour à l'ordre constitutionnel, sous forte pression de la communauté internationale qui maintient la Centrafrique sous perfusion financière.
"Le simple fait que ce scrutin puisse se tenir est très positif ; pour une fois le calendrier a été respecté", estime Mathieu Bile, chef de la division électorale de la Minusca.
La Centrafrique, l'un des pays les plus pauvres au monde, est le théâtre de violences depuis le renversement du président François Bozizé en mars 2013 par l'ex-rébellion Séléka, elle-même finalement chassée du pouvoir par une intervention internationale début 2014.
Avec AFP