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Contrôles des voyageurs européens sans visa aux États-Unis : "L’attitude des douaniers a changé"

Alors que certains ressortissants européens pourraient faire l’objet de contrôles renforcés aux États-Unis, selon une proposition de loi soutenue par le gouvernement, certaines personnes s’inquiètent déjà des conséquences de cette mesure. Reportage.

En arrivant aux États-Unis, les voyageurs européens pourraient désormais être surveillés de près. Si ces derniers peuvent actuellement entrer sur le territoire américain sans visa, la première puissance mondiale pourrait bientôt se doter d’un arsenal juridique visant à durcir les contrôles, tel que l’a voté mardi 8 décembre la Chambre des représentants du Congrès. Le gouvernement américain s’est déclaré favorable à cette loi.

Alors que ce renforcement des contrôles doit encore être validé par le Sénat, Tancrède Fulconis, un étudiant français de la prestigieuse université de Georgetown, observe déjà des changements. "À l’aéroport, les douanes me posent maintenant beaucoup de questions", explique-t-il à France 24. "Les douaniers s’intéressent en particulier à mon voyage au Liban puisque ce pays est considéré à risque pour les États-Unis. On m’a demandé à quelle date j’y étais allé, avec quelles personnes, le nom de ces personnes, ce que j’ai fait là-bas, etc."

Une méfiance accrue depuis les attentats du 13 novembre à Paris, dont certains des auteurs étaient détenteurs de passeports européens. Washington craint en effet que des jihadistes belges ou français ne rentrent sur le territoire américain pour y mener des attaques. Les ressortissants de ces deux pays, tout comme ceux de 36 autres États, peuvent en effet se rendre aux États-Unis sans visa pour un voyage touristique et pour une durée 90 jours, grâce au programme ESTA.

"Des kamikazes de Paris auraient pu rentrer dans notre pays"

La proposition de loi adoptée par la Chambre des représentants, et qui doit encore être validée par le Sénat, interdirait aux voyageurs des 38 pays partenaires s'étant rendus depuis mars 2011 en Irak, Syrie, Iran et Soudan de bénéficier d'une exemption, les forçant à demander un visa auprès des autorités américaines avant leur voyage. La loi vise aussi les personnes ayant la double nationalité avec l'un des pays nommés, par exemple des Franco-Iraniens, même s'ils ne sont jamais allés en Iran.

"C’est choquant de penser que si je vais dans un de ces pays [Irak, Syrie, Iran et Soudan, NDLR], ça sera beaucoup plus dur pour moi de revenir aux États-Unis", estime pour sa part Costanza Concetti, étudiante italienne en relations internationales à l’université de Georgetown.

De son côté, Mick Mulvaney, membre républicain du Comité de surveillance et de réforme du gouvernement, justifie cette proposition de loi en brandissant l'argument du principe de précaution. "Quelques uns des kamikazes de Paris auraient pu rentrer dans notre pays et on ne l'aurait jamais su à cause de ce programme d'exemption de visa", explique-t-il.

"Je ne pense pas qu'on soit en mesure, à ce stade, de faire la différence entre les voyageurs qui sont allés là-bas [en Irak, Syrie, Iran et Soudan, NDLR] pour se radicaliser ou aller dans des camps terroristes et ceux qui y vont pour des raisons humanitaires ou légitimes", précise Mick Mulvaney à France 24.

Chaque année, près de 20 millions de citoyens des pays alliés des États-Unis rentrent sur le territoire américain sans visa.