Pour les petites îles, comme les Seychelles et l'île Maurice, le réchauffement climatique est une question de survie à court-terme. C'est le message qu'ont voulu faire passer leurs représentants à la COP21.
“Dans 80 ans, nos îles auront peut-être disparu si nous ne faisons rien”. Toky Rasoloarimanana énonce, lundi 30 novembre, cet état de fait avec un mélange de détermination et d'incrédulité dans la voix. Cette porte-parole de la Commission de l'océan Indien a beau connaître les études scientifiques sur l'impact du rechauffement climatique sur le bout des doigts, il s'agit après tout de son chez soi. Pas facile à accepter.
Alors elle est venue à la COP21 dans l'espoir que cette conférence sur le climat permette de mettre un coup de projecteur sur la situation de Madagascar, l'île Maurice, les Seychelles, les Comores et la Réunion, qu'elle représente. Et plus largement, les “petites îles” menacées par les déréglements climatiques. Et tant pis si Toky Rasoloarimanana doit répondre encore et encore aux même questions.
De nouveaux réfugiés climatiques tous les ans
Cette native de Madagascar qui vit depuis 13 ans sur l'île Maurice sait que dans l'hémisphère Nord, on se rend difficilement compte de la situation des 26 millions d'habitants qui vivent dans cette zone de 5,5 millions de km². “Le terme de réfugiés climatiques n'a fait son apparition que récémment dans les discussions au sommet, mais nous en parlons comme des 'personnes affectées' depuis des années”, souligne-t-elle.
Il s'agit des habitants insulaires que les caprices du climat obligent à tout abandonner pour déménager. Difficile de les compter, “il y en a tous les ans des nouveaux”, souligne-t-elle. Mais l'impact de la hausse des températures va bien au-delà de ces drames personnels et affectent tous les aspects de la vie quotidienne.
“Le plus frappant, c'est qu'on ne s'y retrouve plus dans les saisons. D'habitude il y a neuf mois d'été et trois mois d'hiver, mais l'été est devenu plus froid et l'hiver plus chaud et il faut constamment s'adapter”, raconte-t-elle. Ces déréglements ont un impact économique profond, surtout sur la pêche. “Nous sommes la seconde zone au monde pour la pêche au thon, mais avec ces changements, les poissons ont tendance à aller plus en profondeur et il est donc plus difficile et plus cher [en matériel] d'en pêcher. C'est catastrophique pour l'économie de la région”, explique Toky Rasoloarimanana.
Catastrophes naturelles : monnaie courante
Quant aux catastrophes naturelles, elles sont devenues monnaie courante. “Il y en a bien plus que lorsque j'étais petite”, assure cette militante de la cause climatique. Les populations sont habituées très jeunes, à y faire face. “À l'école, on apprend aux enfants les gestes essentiels en cas de catastrophe pour qu'ils sachent où se cacher, qui appeler”, souligne-t-elle. Sur la côte est de Madagascar, tous les ans “les habitants sont obligés de reconstruire pendant plusieurs mois leur habitat après la saison des cyclones”, rappelle Toky Rasoloarimanana.
Cette situation est d'autant plus difficile pour elle, qu'une partie des habitants de cette région menacée fait ce qu'elle peut pour préserver son environnement. “Sur l'île Maurice, il y a même aujourd'hui des poissons qui meurent de vieillesse ! Ces insulaires ont appris ce que signifiait un développement durable bien avant que le terme ne devienne à la mode”, affirme cette Mauritienne. Le problème est que l'avenir de ces petites îles depend moins du bon vouloir de ces habitants que de décisions prises et de comportements plus ou moins éco-responsables aux États-Unis, en Chine ou encore en Inde.