Abeldhamid Abaaoud, a été tué lors de l'assaut de la police, mercredi 18 novembre, à Saint-Denis. Cette figure médiatique de l'EI, qui a participé aux attentats du 13 novembre, avait été impliqué dans plusieurs projets terroristes.
Il s’attendait à "ce que ça se termine mal". Omar Abaaoud, le père d’Abdelhamid, l’un des terroristes à la manœuvre lors des attentats du 13 novembre à Paris, n’a plus de colère à l’égard de son fils. "Il ne lui trouve ni ne lui cherche aucune excuse", a révélé l’avocate du vieil homme à la presse. Il aurait simplement souhaité qu’on le capture vivant, "pour comprendre".
Mais Abdelhamid Abaaoud a été tué lors de l’assaut policier le 18 novembre, à Saint-Denis. La dérive de ce jeune belge restera donc à jamais un mystère pour son père, reparti vivre dans son Maroc natal. Le vieil homme a sombré dans une "profonde dépression", depuis qu’il a appris que son fils était membre actif et médiatique de l’organisation de l’État islamique (EI). Aussi appelé "Abou Omar al-Baljiki" ou "le Belge", Abdelhamid a été impliqué dans plusieurs attentats ou projets d'attentats en Europe.
"Nous avions une belle vie"
Le jeune homme a pourtant eu "une belle vie, même une vie fantastique", confiait Omar Abaaoud en janvier dernier, dans une interview accordée à "Het Laatste Nieuws" alors qu’il venait d’apprendre que son fils avait mis en place la cellule terroriste démantelée à Verviers, en Belgique, le 15 janvier 2015, soit moins d'une semaine après les attaques à "Charlie Hebdo" et à l’hypercacher de Vincennes.
Né il y a 28 ans à Molenbeek - commune de l’agglomération de Bruxelles connue pour être un vivier de terroristes islamistes –, Abdelhamid Abaaoud n’était pas, selon son père, "un enfant difficile". Il a même obtenu à 12 ans une bourse d’étude dans un collège catholique réputé et a ensuite travaillé avec son père dans son magasin de vêtements. "C’était devenu un bon commerçant", constatait Omar. Les anciens voisins de la famille, interrogés par la presse belge, sont moins élogieux et ils se souviennent plutôt d’un petit délinquant. "C'était un petit con", confie l’un d’eux, qui l’accuse d’avoir harcelé ses professeurs et volé des portefeuilles.
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Selon la presse belge, Abdelhamid Abaaoud a été incarcéré en 2010 pour vol et c’est en prison qu’il a alors rencontré Salah Abdeslam, également originaire de Molenbeek et actuellement recherché pour son implication dans les attentats du 13 novembre.
Une radicalisation brutale
"Jeune, il n'allait jamais à la mosquée", raconte de son côté sa sœur Yasmina au "New York Times". Mais il s’est radicalisé brutalement, auprès d’imams fondamentalistes de Molenbeek, tentant à son tour de convertir des jeunes du quartier au jihadisme, dont son jeune frère Younès.
En 2013, il disparaît du jour au lendemain et on retrouve sa trace en Syrie plusieurs mois plus tard. Il est parti avec Younès, qui, à 13 ans seulement, est rapidement surnommé "le plus jeune jihadiste du monde". Un enlèvement qui lui vaut d’être renié par son père qui n’a d’ailleurs pas fait de démarches pour récupérer le corps de son aîné.
Les faits d’armes qui ont rendu célèbre Abdelhamid ont de quoi détourner tout père, même le plus aimant. "Très actif sur les réseaux sociaux en 2014", selon Wassim Nasr, journaliste de France 24 spécialiste des mouvements jihadistes, Abdelhamid a commencé à se faire connaître en se présentant sur Facebook comme le "touriste terroriste". Puis il s’est rapidement distingué par son sens de la propagande macabre.
Dans une vidéo récupérée sur son portable par un journaliste de la RTBF et diffusée début 2014, on le voit "tractant des corps" ensanglantés pour les emmener dans une fosse commune à Azaz, en Syrie. "Avant on tractait des grosses remorques remplies de bagages et de cadeaux pour aller en vacances au Maroc. Maintenant, sur le chemin d’Allah, on tracte les kouffar [les mécréants], ceux qui nous combattent, ceux qui combattent l’islam", commente-t-il, face à la caméra de son téléphone, tout sourire.
Un terroriste qui nargue l’Europe
Courant 2014, il disparaît des radars. Selon un rapport du département de la sécurité nationale américaine, ses parents reçoivent un appel leur annonçant qu’il a été tué au combat en Syrie. Mais ce n’est qu’une stratégie – payante - pour passer entre les mailles du filet de la surveillance européenne. Les services de sécurité pensent qu’il est revenu brièvement en Europe dès la fin 2013, puis une nouvelle fois avant l’attaque contre la rédaction du magazine français "Charlie Hebdo" en janvier 2015.
Dans une interview accordée au magazine jihadiste Dabiq en février, soit après avoir échappé à la police belge à Verviers, Abaaoud confirmait être revenu en Europe, dont il nargue les failles sécuritaires. "J’ai vu tout à coup ma photo dans tous les médias mais, alhamdoulillah (grâce soit rendue à Dieu), les kouffar étaient rendus aveugles par Allah", y disait-il. "J’ai même été arrêté par un policier qui a regardé la photo qu’il avait de moi, mais il n’a pas vu la ressemblance et m’a laissé repartir". En Belgique, "nous avons pu nous procurer des armes et une planque sûre pour préparer nos opérations contre les croisés".
De fait, il n’a pas lésiné sur les "opérations". Outre les attentats du 13 novembre, il a été "impliqué dans quatre" des six attentats "évités ou déjoués par les services français depuis le printemps 2015", a annoncé le ministre français de l’Intérieur, Bernard Cazeneuve, dont un projet d’attentat contre une église de la banlieue parisienne en avril dernier et l’attaque du Thalys Amsterdam-Paris fin août.
Il est par ailleurs établi qu’il a eu des contacts avec Medhi Nemmouche en janvier 2014, soit quatre mois avant la tuerie du Musée juif de Bruxelles. Selon le journaliste de RFI David Thomson, les deux hommes combattaient dans le même groupe en Syrie. Il a en outre été condamné par contumace à vingt ans de prison en Belgique en juillet, dans un procès de filière jihadiste.
Son rôle dans les attaques de Paris
S’il a été régulièrement présenté ces derniers jours comme le commanditaire présumé des attentats de Paris, "ce n’est probablement pas le cas", estime Wassim Nasr. Il est en revanche avéré qu’Abaaoud a participé aux fusillades.
"Il était l’un des trois membres du commando qui a attaqué les bars des Xe et XIe arrondissement de Paris. Il était même l’un des deux tireurs du commando, qui comprenait également Brahim Abdelsam, qui s’est fait exploser au café 'Le comptoir Voltaire' un peu plus tard", ajoute le journaliste de France 24 Christophe Dansette.
Abdelhamid a été vu dans le métro, à la station Croix-de-Chavaux, à Montreuil, le 13 novembre à 22h14 très exactement, soit après les attentats. C’est ensuite dans l’appartement de la rue Corbillon à Saint-Denis qu’il a été retrouvé mort, après l’assaut policier du 18 novembre 2015.