Le justice a tranché en faveur de la Cimade, association d'aide aux étrangers en situation irrégulière, dans le conflit juridique qui l'oppose au ministre de l'Immigration au sujet de l'aide dans les centres de rétention administrative.
AFP - La justice a donné raison samedi à la Cimade dans une manche du bras de fer qui l'oppose au ministère de l'Immigration depuis neuf mois sur l'aide aux étrangers dans les centres de rétention administrative (Cra).
Ce nouveau rebondissement intervient à deux jours de la mise en place prévue de la réforme de la rétention qui devait confier à six associations (Cimade, Ordre de Malte, Forum Réfugiés, Collectif Respect, France Terre d'Asile et Assfam) la tâche d'assister les étrangers en situation irrégulière, mission dévolue à la seule Cimade depuis 25 ans.
Le juge des référés du tribunal administratif de Paris a suspendu l'exécution de ce marché public signé le 10 mai, qui faisait l'objet d'un recours de la Cimade, jusqu'à l'examen des requêtes déposées sur le fond de cette affaire. Il a ordonné à l'Etat de verser 3.000 euros à l'association au titre des frais de justice.
La Cimade, soutenue par de nombreuses associations de défense des droits humains et des étrangers, avait dénoncé la transformation de la mission d'aide aux étrangers, notamment pour former des recours contre une expulsion, en une simple mission d'information. Un moyen, selon elles, d'atteindre plus facilement les quotas d'expulsions de plus en plus élevés (27.000 prévues pour 2009 contre 26.000 en 2008).
La Cimade a immédiatement exprimé sa "satisfaction" devant cette décision de justice et demandé au ministère "d'ouvrir de toute urgence une concertation" avec les associations "afin de dégager une solution permettant de garantir et de maintenir une réelle assistance juridique aux étrangers".
De son côté, Eric Besson a indiqué se donner "48 heures pour prendre les décisions qui conviennent afin que les droits des étrangers soient bien pris en compte après le 2 juin". Pour le ministère, la guérilla judiciaire de la Cimade tient à ce qu'elle ne veut pas perdre son "monopole" dans les Cra qui pèse 4 millions d'euros d'aides publiques par an.
Dans son ordonnance, le juge des référés note que "le ministère a la faculté de conclure avec la Cimade un avenant prolongeant" sa mission au-delà du 2 juin, comme cela avait déjà été le cas à l'automne dernier après l'annulation du premier appel d'offre. La Cimade "y est prête", a-t-elle fait savoir.
Surtout, le magistrat a abordé dans ses motivations le fond du litige qui oppose la Cimade (et les associations qui la soutiennent) au ministère de l'Immigration, incarné par Brice Hortefeux à la mise en route de l'appel d'offres fin août 2008 puis Eric Besson depuis janvier.
Deux éléments sont propres à créer "un doute sérieux quant à la légalité du marché", pointe le juge: d'une part la rédaction de son objet qui ne permet pas de garantir que les étrangers pourront exercer des recours, un des objectifs pourtant fixés par le législateur; d'autre part le fait qu'une des associations retenues, Collectif Respect, n'a pas démontré ses capacités professionnelles pour assurer une telle mission.
Une majorité d'ONG de défense des droits des plus démunis s'est rangée derrière la Cimade, notamment le Secours catholique et Emmaüs, toutes deux issues du monde catholique.
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