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Inde : au Gujarat, la révolte de la caste aisée des Patel contre les Intouchables

Les autorités du Gujarat, dans l'est de l'Inde, ont déployé mercredi des forces militaires dans plusieurs zones de la région, après de violentes manifestations de la caste plutôt aisée des Patel contre les plus basses castes indiennes.

Depuis trois jours, le riche État indien du Gujarat connaît l’un de ses pires épisodes de violence. Des Patidar, également appelés Patel, une caste de fermiers, d’entrepreneurs et d'hommes d'affaires de la classe moyenne, manifestent quotidiennement contre le système de la discrimination positive pratiquée en faveur des castes les plus basses. Les Patel - qui représentent quelque 12 % de la population du Gujarat - réclament notamment une révision des quotas dans les universités, alors que la majorité des postes sont réservés aux "Intouchables" et "autres castes arriérées".

"La moitié des places à l’université publique leur sont fermées à cause des quotas, et l’alternative de l’enseignement privé est très coûteuse. Avec le système des quotas, la justice sociale l’emporte sur le mérite, suscitant la frustration", explique "Le Monde".

Appel au calme

Mardi, les événements ont dégénéré après l’arrestation du leader des Patel, Hardik Patel, âgé de 22 ans, libéré quelques heures plus tard. Au moins neuf personnes sont mortes dans cet État d'où est originaire le Premier ministre Narendra Modi. Un agent de police est décédé à l'hôpital après avoir été battu par la foule dans la rue, selon les autorités. Trois autres personnes sont mortes à Ahmedabad, la principale ville du Gujarat, trois Indiens sont tombés sous les balles des forces de l’ordre, et deux manifestants ont succombé, mercredi soir, à leurs blessures.

Une dizaine de policiers ont également été blessés dans ces violences. Et des centaines de bus, voitures, postes de police ont été incendiés. Face à cette flambée de violence, les autorités ont déployé mercredi 26 août des forces armées dans plusieurs zones de la région et décrété un couvre-feu.

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Le Premier ministre, qui fut le chef de l'exécutif du Gujarat pendant plus de dix ans, a lancé un appel au calme lors d'une allocution télévisée prononcée en gujarati mercredi. "J'appelle tous mes frères et sœurs du Gujarat à ne pas recourir à la violence", a déclaré Narendra Modi. "Tous les problèmes peuvent être résolus de manière pacifique par la discussion."

Les rues d'Ahmedabad étaient désertes mercredi avec la fermeture des écoles et des magasins. Des protestations ont en revanche continué à Surat, haut lieu de la taille du diamant, selon des médias locaux et la police.

Hardik Patel, jeune leader charismatique de 22 ans

Le meneur du mouvement, Hardik Patel, en a lui aussi appelé au calme après sa remise en liberté dans la nuit de mardi à mercredi, tout en promettant de maintenir la pression.

"Tous les observateurs sont déconcertés par ce garçon de 22 ans qui mène l'agitation et est parvenu à faire l'objet d'un culte en si peu de temps", a commenté l'analyste politique et journaliste Sandeep Bamzai, percevant ce phénomène comme "entièrement nouveau", contrairement à celui des violences communautaires qui sévissent "depuis plusieurs décennies" dans le Gujarat.

Les dirigeants politiques semblent avoir été pris de cours par l'étendue et la violence du mouvement, débuté il y a plusieurs mois mais qui s'est accéléré ces dernières semaines.

C'est la première fois qu'un couvre-feu est instauré dans l'État depuis les émeutes meurtrières de 2002. À l’époque de violents heurts avaient opposé des hindous aux musulmans. Au moins 1 000 personnes avaient péri, essentiellement des musulmans.

Avec AFP