
Que s'est-il passé vendredi dans le Thalys qui reliait Amsterdam à Paris ? De l'attaque d'un homme armé à l'évacuation des passagers, France 24 retrace le fil des événements.
Une kalachnikov en bandoulière
Il était environ 17 h 50 vendredi lorsqu'un passager français d’un Thalys reliant Amsterdam à Paris cherche à se rendre aux toilettes de la voiture 12. Il "s'est trouvé face à un individu porteur d'un fusil d'assaut kalachnikov en bandoulière", a raconté le ministre français de l’Intérieur, Bernard Cazeneuve. Le ministre ajoute que le passager "a tenté courageusement de le maîtriser avant que l'agresseur ne tire plusieurs coups de feu". Les coups de feu tirés par l’assaillant blessent un passager franco-américain au thorax.
Selon Chris Norman, un consultant britannique âgé de 62 ans qui voyageait dans le même wagon, le personnel du Thalys aurait alors cru qu'une bagarre avait éclaté entre les deux hommes.
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Dans le wagon, trois jeunes Américains en vacances
Trois amis américains se trouvent dans le wagon où sont tirés les coups de feu : Alek Skarlatos, membre de la garde nationale de l'Oregon et récemment rentré d'une mission en Afghanistan, Spencer Stone, militaire au sein de l’armée de l’air, et Anthony Sadler, étudiant à Sacramento (Californie). Les trois jeunes hommes passaient des vacances en Europe.
"On a entendu un coup de feu et du verre brisé", a raconté à plusieurs médias Alek Skarlatos, 22 ans.
Une passagère américaine du Thalys a elle aussi raconté la scène à France 24 : "J’avais les yeux fermés, j’étais en train de dormir. J’ai soudain entendu un bruit de glace et j’ai vu que j’avais des bris de verre dans les cheveux".
CNN diffusé une vidéo prise à bord du train
Exclusive video shows the moments after U.S. military members helped prevent train massacre in Belgium. http://t.co/4it8QuuOfk
— CNN Breaking News (@cnnbrk) 22 Août 2015"On s'est dit : 'On y va'"
"Au début je n'ai pas compris ce qui se passait", a expliqué Alek Skarlatos. "Puis j'ai regardé en arrière et j'ai vu un type avec une AK (AK-47, fusil d'assaut kalachnikov). Mon ami [Spencer] et moi, on s'est baissés et puis on s'est dit : 'On y va', et il y est allé."
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Spencer s’élance alors à l’assaut de l’homme, lui court après sur une dizaine de mètres et parvient à "l'attraper par le cou" et à le projeter au sol. Alek, juste derrière lui, prend le pistolet des mains de l’assaillant.
L'un des Américains blessé à la main
Armé d’un véritable arsenal de guerre (une kalachnikov, un pistolet automatique, neuf chargeurs et un cutter, selon Bernard Cazeneuve), l’homme se débat au sol et blesse Spencer Stone au cutter. "Il l'a tailladé à l'arrière du cou et lui a pratiquement coupé le pouce", a raconté après les faits Chris Norman, qui s'est joint aux trois jeunes Américains pour maîtriser le tireur.
Après avoir désarmé l'assaillant de 26 ans, ils l'auraient frappé à la tête "jusqu’à ce qu'il perde connaissance", puis ligoté à l'aide d'une cravate.
Anthony Sadler raconte que l'un des soldats américains s'est ensuite occupé de la personne touchée par balle, qui "perdait beaucoup de sang". "Spencer, qui a eu un entraînement médical, a fait pression sur son cou pour qu’il ne meure pas", ajoute le jeune homme.
Jean-Hugues Anglade parmi les blessés
L'acteur français Jean-Hugues Anglade se trouvait dans le wagon d’à côté avec sa femme et ses enfants. Comprenant qu’une attaque était en cours, il a brisé la vitre de l’alarme et s’est ainsi blessé à la main. Le train a alors ralenti.
En parallèle, le personnel du Thalys a donné l’alerte. Le chauffeur du train est désormais au courant de ce qui se passe dans le wagon numéro 12.
Hospitalisation et évacuation
À l’arrivée du Thalys à Arras, les secours prennent en charge les blessés. Le passager franco-américain blessé par balle au thorax est transporté par hélicoptère jusqu’à l’hôpital de Lille. Patrick Goldstein, le chef des urgences au CHRU de Lille, a affirmé samedi soir qu'il "allait bien" mais nécessitait une une surveillance médicale.
Spencer est dirigé vers la clinique de la main à Lesquin, près de Lille, où il a été opéré samedi matin avec succès. "C'est un grand 'mastard', costaud et souriant, il est ravi, il y a plein de gens qui viennent dans sa chambre pour le féliciter, des patients qui venaient se faire opérer sont venus le voir", a témoigné une source médicale.
Quelques heures après son opération, il a pu sortir de la clinique, un bras en écharpe. Accompagné d'un officiel américain, il est monté à bord d'une berline portant l'immatriculation du corps diplomatique des États-Unis, sans faire de déclaration. Il a été conduit à l'hôtel de police d'Arras pour y être entendu.
Le suspect a été arrêté en gare d'Arras. Les passagers sont évacués et dirigés vers un gymnase de la ville.
Récompenses
Dès vendredi soir, Alek Skarlatos, Anthony Sadler et Chris Norman ont été décorés de la médaille de la ville d'Arras par le maire, Frédéric Leturque (UDI), venu à leur rencontre dans un restaurant de la ville.
Le maire d'Arras rend hommage aux "héros américains"
Hommage aux #héros américains qui ont neutralisé le tireur du #Thalys dérouté à #Arras #reconnaissance #respect pic.twitter.com/WnBr2i6hrN
— Frédéric Leturque (@FLeturque) 21 Août 2015François Hollande et Barack Obama ont tous deux salué le courage des trois jeunes gens. Le président français les recevra à l’Élysée, le lundi 24 août, pour "leur témoigner la gratitude de la France", a précisé l'Élysée dans un communiqué.
"Je suis juste un étudiant, je suis venu voir mes amis pour mon premier voyage en Europe et on a arrêté un terroriste, c'est plutôt dingue", s’est exclamé vendredi Anthony Sadler face à la presse. Le père du jeune homme a depuis les États-Unis dit avoir encore du mal à réaliser que son fils "parti découvrir l'Europe pour s’ouvrir l'esprit" est désormais un "héros national de la France".
Depuis vendredi, les félicitations et les remerciements aux trois Américains se multiplient sur les réseaux sociaux.
Avec AFP