Jean-Marie Le Pen n'est désormais plus membre du Front national. Il en a été définitivement exclu jeudi. Mais évincer le "Menhir", n’est pas le mettre hors d’état de nuire, rappelle Aurélien Mondon, spécialiste de l’extrême droite.
Fidèle à sa verve guerrière, Jean-Marie Le Pen s’est dit, vendredi 21 août, victime d’un "peloton d’exécution". Ses bourreaux ? Sa propre maison, sa propre famille. Le co-fondateur du parti frontiste a été évincé du Front national (FN), la veille, lors d'un bureau exécutif du parti, pour ses propos sur le maréchal Pétain ou encore sur les chambres à gaz. C’est sa fille, Marine, qui, selon lui, "commandait au loin, au téléphone, le peloton d’exécution […] parce que c’est sale de tuer papa", a-t-il déclaré à la sortie du siège du parti.
Mais même mort, exécuté par les "sbires" de la nouvelle présidente du FN, Jean-Marie Le Pen a bien l'intention de rester debout. De ne pas se faire enterrer. "Quoi qu’il arrive, il y a peu de chances qu’il se fasse oublier. Tant que sa santé le lui permettra, Jean-Marie Le Pen continuera à donner son avis", prédisait au mois de mai Lorrain de Saint Affrique, qui fut son conseiller en communication entre 1984 et 1994. Quatre mois plus tard, cette analyse se vérifie : Jean-Marie Le Pen veut continuer de à ne pas se faire oublier. Et pour cela, plusieurs options s’offrent à lui.
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Le recours juridique, dans un premier temps. Le fondateur du FN a déclaré jeudi qu’il allait attaquer en justice la décision de son éviction du parti. Une stratégie qui ne lui avait pas déjà trop mal réussi après sa suspension du parti, le 4 mai. Début juillet, la justice avait décidé de lui rendre sa qualité d’adhérent. "Il peut à nouveau faire appel, en effet. Il a ce pouvoir de nuisance. Sa requête peut même aboutir mais cette démarche ne ferait que retarder l’inévitable", estime pourtant Aurélien Mondon, professeur de sciences politiques à l’université de Bath au Royaume-Uni, interrogé sur France 24. "Le FN a rendu les choses très claires. Jean-Marie Le Pen n’a pas de futur dans le FN tel qu’il est".
itDu danger de la "normalisation" du FN
Reste donc l’option politique. "L’ancien président peut s’allier avec un parti d’extrême-droite ou même créer sa propre mouvance", ajoute le spécialiste de l’université de Bath. Et quoi de plus dévastateur pour le FN que de regarder le "Menhir" lui faire concurrence ? Car la menace est réelle : rien ne dit en effet que Jean-Marie Le Pen ne présentera pas sa propre liste aux régionales de décembre, voire à la présidentielle de 2017. S’il laisse encore planer le doute sur ses intentions électorales, une chose est sûre : "Il va continuer à faire du bruit, précise Aurélien Mondon, il est entré en politique comme un rebelle, il en sortira comme un rebelle."
Et, au passage, le "Vieux" - qui a juré "d'agir sans relâche" pour mettre des bâtons dans les roues de sa fille - espère bien scinder en deux les troupes de Marine. "Des cadres du FN vont quitter le parti pour le suivre, ils font partie d’une génération de frontistes qui n’a jamais accepté la normalisation du parti", souligne le professeur de sciences politiques.
Pour Aurélien Mondon, le danger provient surtout de la nouvelle charte idéologique du parti frontiste. En expulsant son père, Marine Le Pen rejette aussi son premier commandement : rester un parti anti-système. "C’est là son plus grand danger. En faisant entrer le parti dans la normalisation, dans le système, elle risque de perdre cet image d’outsider qui a pourtant fait toute la popularité du parti de son père."