logo

"L’Arabe du futur 2" : l’enfance syrienne de Riad Sattouf séduit les lecteurs

Le deuxième tome de "L'Arabe du futur", la bande dessinée autobiographique de Riad Sattouf, est sorti jeudi en librairie et connaît déjà un succès fulgurant. L'auteur y revient sur sa première année d'école dans la Syrie du milieu des années 1980.

Beaucoup de lecteurs sont venus acheter "L'Arabe du futur 2 : Une jeunesse au Moyen-Orient", le deuxième tome des aventures autobiographiques de Riad Sattouf le jour même de sa sortie, le jeudi 11 juin. Certains avaient même pris la précaution de réserver un opus auprès de leur libraire. 75 000 exemplaires de cette bande dessinée, qui retrace l’enfance d’un petit garçon blond dans la Syrie de Hafez al-Assad, ont déjà été livrés en librairies selon l’éditeur. Quant au premier tome, déjà vendu à 200 000 exemplaires, il a été à nouveau tiré à 15 000 exemplaires à l’occasion de cette sortie.

Pourquoi les lecteurs se passionnent-ils pour l’histoire de cette enfance au Moyen-Orient, ballotée entre la Libye, la Syrie et…la Bretagne ? Pour Élisabeth Trétiack-Franck, de la maison d’édition Allary Editions qui publie "L’arabe du futur" (tomes 1 et 2), c’est l’universalité du récit qui explique son succès mais aussi "le fait que l’histoire se passe dans des pays présents presque tous les jours dans l’actualité".

>> À voir sur France 24 : "Riad Sattouf raconte son enfance entre Libye, Syrie et France"

Alors que le tome 1 se déroulait majoritairement en Libye, Riad Sattouf dresse comme décor du tome 2 de ses aventures la Syrie du milieu des années 1980, où le culte de Hafez al-Assad envahit jusqu’aux salles de classe. 

Parmi les passages les plus édifiants : le chant patriotique imposé à l'école, la maîtresse qui frappe les enfants sans vergogne, le crime d'honneur banalisé ou les jeux de cour de récré des petits Syriens du village de Ter Maaleh qui consistent à "tuer le plus de juifs possible"... Autant d'absurdités racontées avec les yeux naïfs d'un enfant de six ans parachuté dans une dictature arabe.

C’est cet humour attendrissant qui a donné envie à Véronique, 57 ans, d’acheter la bande dessinée : "J’ai entendu l’auteur sur RTL. Il racontait des anecdotes tellement drôles que j’ai eu envie de l’offrir. Je prends le tome 1 parce que le couple à qui je vais en faire cadeau ne connaît pas encore", raconte-t-elle devant le comptoir de BD et compagnie, une librairie indépendante parisienne.

Pourtant Riad Sattouf reconnaît avoir eu quelques difficultés à s'emparer de son sujet. "Je me suis demandé comment raconter l'histoire de ma famille sans blesser personne. J'ai cherché le bon ton et le bon angle pour aborder le sujet", explique-t-il à l’AFP.

"Aussi bien des férus d’histoire que des férus d’humour"

Sacré par le prix du meilleur album au festival de BD d’Angoulême l’an dernier, Riad Sattouf est aujourd’hui synonyme de succès littéraire. "Après le prix d'Angoulême, 25 000 nouvelles ventes du tome 1 ont été enregistrées", confie Élisabeth Trétiack-Franck. Pourtant rien n’était gagné d’avance. "Riad Sattouf avait l'habitude de travailler avec L’Association, un petit éditeur indépendant qui ne le mettait pas vraiment en valeur. Heureusement, il a changé pour ‘L’arabe du futur’", explique Raphaël Dayries, gérant de BD et compagnie.

Les bonnes critiques et les conseils des libraires ont fait le reste. "Dans la newsletter que j’envoie à mes clients, je l’ai mis en ouvrage du mois. Quand il y a quelque chose que j’aime, je le mets en avant", affirme ce passionné de bande dessinée de 34 ans. Résultat : treize exemplaires du tome 2 vendus en deux jours dans cette librairie. En mai 2014, lors de la sortie du tome 1, Raphaël Dayries n’en avait vendu que dix exemplaires sur tout le mois.

Pour Noémie Lafaye, employée de la librairie indépendante La 25e heure, le succès de Riad Sattouf s’explique également par sa capacité à séduire un public non-spécialiste de la bande dessinée. "Son texte est suffisamment dense pour plaire aussi aux lecteurs de romans", souligne-t-elle. Selon les libraires, les lecteurs de L’Arabe du futur aurait en majorité plus de 30 ans. "Ce sont aussi bien des férus d’histoire que des férus d’humour", précise Raphaël Dayries.

Si les amateurs d'histoire apprécient les albums de Sattouf, c'est que derrière les aventures du petit garçon blond s'écrit l'histoire mouvementée du Moyen-Orient. Dans le tome 2 de "L'arabe du futur", Riad Sattouf dépeint une Syrie où l’on peut se promener parmi les ruines de Palmyre et où le président Hafez al-Assad est réélu le 10 février 1985 avec 100% des voix. "Un record mondial" selon le héros blondinet. Pas franchement étonnant dans la mesure où, quelques bulles plus tôt, la maîtresse intimait à ses élèves de dire à leur parents de voter pour lui.

L’auteur a annoncé qu'il comptait livrer un troisième, voire un quatrième volume. S’il refuse d’en dévoiler la trame, il a confié à l’AFP que sa mère, très effacée dans ce second tome, serait plus présente dans les prochains albums.

Avec AFP