Selon une étude rendue publique mardi, près d'un quart des managers en France ont été confrontés à un "fait religieux" (prières, refus d'accomplir certaines tâches, demande de congés pour fêtes…) début 2015. Ils n'étaient que 12 % en 2014.
La religion prend de plus en plus de place dans les entreprises françaises : voici en substance la conclusion d'un rapport publié mardi 21 avril par l'Observatoire des faits religieux en entreprise (Ofre) et l'institut Randstad. L'enquête est basée sur un questionnaire en ligne rempli entre les mois de février et mars 2015 par 1 296 salariés, exerçant à 93 % des fonctions d'encadrement.
Dans les chiffres, seuls 12 % des mangers en entreprises étaient confrontés à des "faits religieux" en 2014, contre 23 % cette année. Concrètement, ces "faits religieux" s'apparentent le plus souvent à des demandes de congés pour fêtes religieuses (19 %, contre 18 % en 2014) ou à des ports ostentatoires de signes religieux : croix, kippa, foulards, turban (17 %, contre 10 % l'an dernier).
Peu de managers sont confrontés à faits plus graves comme des refus de travailler sous les ordres d'une femme (environ 4 %, un chiffre stable) ou au refus de travailler avec un collègue d'une religion différente (environ 2%, chiffre également inchangé).
Il n'y a donc pas d'explosion du fait religieux en France, précise Lionel Honoré, directeur de l'Ofre et co-auteur de l'étude. Selon lui, ce résultat s'explique plutôt par une "banalisation" du sujet religieux, les salariés hésitant moins à faire des demandes à leur hiérarchie en lien avec leurs croyances ou pratiques religieuses.
6 % des cas conflictuels
Seuls 6 % de ces faits se caractérisent comme "conflictuels", contre 3 % en 2014. Les raisons de ces tensions sont souvent liées à des menaces d'accusation de racisme ou de discrimination envers l'employeur. Il est important de souligner que, dans l'ensemble, 88 % des confrontations n'entraînent ni conflit, ni blocage.
Concernant la laïcité en entreprise, les réponses ont aussi évolué depuis l'année dernière. Trois sondés sur dix considèrent que la religion devrait se cantonner à la sphère privée contre 12 % en 2014. Et ils sont presque six sur dix à inclure la notion de "défense de liberté de culte" dans la définition de la laïcité, contre 12 % en 2014.
Si la quasi-totalité des personnes interrogées déclare ne pas être gênée par les pratiques religieuses de ses collaborateurs, ils sont 38 % à penser que ces dernières ont un impact négatif sur les relations entre collègues. Pour Lionel Honoré, "si quantitativement le fait religieux au travail n'augmente pas, qualitativement, il se complexifie".
Un point positif à retenir : la religion n'est pas un sujet tabou entre collègues, 84 % connaissent la confession religieuse de leurs voisins de bureau et 75 % estiment qu'il est admissible de prier pendant les pauses – si cela n'affecte pas le travail.