
Répression, armes chimiques, relation avec les services secrets français... Après quatre ans d'une guerre meurtrière, le président syrien a répondu aux questions de France 2, une première sur une chaîne de télévision française, publique de surcroît.
Plus de quatre ans après le début du conflit sanglant qui déchire la Syrie, la chaîne française de télévision publique France 2 a interviewé le président syrien Bachar al-Assad à Damas.
Sur la majorité des sujets abordés lors de l'entretien (usage d'armes chimiques, terrorisme, relations avec les puissances occidentales, etc.), l'homme fort de Damas est resté sur sa ligne et a livré un discours inchangé depuis le début du conflit dans son pays.
"Nous n’utilisons que des armes conventionnelles"
Accusé de réprimer aveuglément une partie de son peuple depuis le début de la guerre civile, le chef de l’État persiste à désigner les terroristes comme les responsables du conflit. "Toute personne a le droit de réclamer la liberté mais cela justifie-t-il de tuer des policiers, des civils, d’attaquer des bâtiments publics, des hôpitaux ?", a-t-il feint d’interroger lors de l’entretien de 15 minutes diffusé lundi 20 avril à 20 h 30.
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Alors que David Pujadas, présentateur vedette du journal de 20 heures de France 2, lui montre une image de barils d'explosifs largués par des hélicoptères, dont seule l'armée syrienne dispose en Syrie, Bachar al-Assad nie en bloc. "Dans notre armée, nous n’utilisons que des armes conventionnelles qui nécessitent de viser, affirme-t-il. Pourquoi tuer aveuglément la population puisque la guerre en Syrie sert à gagner le cœur des gens ?"
À plusieurs reprises, le chef de l’État a donc souligné qu’il n’aurait pu rester au pouvoir ces quatre dernières années sans le soutien de sa population. "Serait-il possible d’avoir le soutien du peuple si nous étions si brutaux ?", interroge-t-il.
Le président syrien dément en outre l'usage de gaz de chlore contre des secteurs rebelles de la province d'Idleb, après des accusations de l'organisation Human Rights Watch (HRW). "Non, c'est un autre faux récit donné par des gouvernements occidentaux, a-t-il répondu. Nous n'avons pas utilisé le chlore, et nous n'en avons pas besoin. Nous avons nos armements classiques, et nous pouvons atteindre nos objectifs sans y avoir recours."
Quant aux accusations portant sur sa responsabilité dans l'émergence de l’organisation État islamique (EI), le président syrien a souligné que cette dernière avait "été créée en Irak en 2006 sous la supervision des Américains". "Je ne suis pas en Irak. Je n'y ai jamais été. Je ne contrôlais pas l'Irak. C'étaient les Américains qui contrôlaient l'Irak. L'EI est venu d'Irak en Syrie, car le chaos est contagieux", a-t-il ajouté.
Des "contacts" entre les services secrets français et syriens
Interrogé sur une possible reprise des relations entre les services de renseignement français et syriens en dépit de la rupture des relations diplomatiques bilatérales, Bachar al-Assad affirme que des "contacts" ont eu lieu. "Il y a eu des rencontres avec certains responsables de vos services de renseignement mais il n'y pas de coopération, ni d'échanges d'informations", a-t-il ajouté sans identifier toutefois les personnes concernées.
Selon lui, des représentants des services français sont venus en Syrie mais pas l’inverse. "Ils sont peut-être venus pour échanger des informations mais quand vous voulez avoir ce type de collaboration, il faut de la bonne volonté des deux côtés", a-t-il poursuivi, en laissant entendre que tel n'est pas le cas du côté de Paris, qui est pourtant, selon lui, à l’origine de cette rencontre.
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"Nous sommes toujours intéressés au dialogue avec quiconque", indique-t-il également en réponse à une question sur une relance des relations avec la France. "Mais comment peut-on établir un dialogue avec un régime qui soutient le terrorisme dans notre pays ?", s'est-il interrogé, en reprenant son antienne selon laquelle les opposants à son pouvoir ne sont que des terroristes.
Paris a fermé en mars 2012 son ambassade à Damas afin de protester contre la répression du régime. Depuis deux ans, la France fait l'objet de pressions syriennes et de certains hommes politiques français pour restaurer les relations diplomatiques bilatérales mais le président François Hollande s'y refuse jusqu'à présent officiellement et de manière catégorique.
Avec AFP