logo

L'EI continue de progresser dans la province irakienne d'Anbar

En Irak, les jihadistes de l'EI continuent d'avancer dans la province d'Anbar et dans sa capitale Ramadi, dont ils cherchent à s'emparer des faubourgs périphériques. Pour les tribus sunnites qui les combattent, la tâche s'annonce difficile.

Les jihadistes de l’organisation de l’État islamique (EI) ne cessent d'avancer dans la vaste province d'Anbar, située à l'ouest de Bagdad, et notamment dans sa capitale, Ramadi. Le 10 avril, l'EI a notamment lancé une offensive pour s'emparer de deux quartiers des faubourgs nord de la ville.

Dès début 2014, de grandes parties de l'Anbar et certains quartiers de Ramadi étaient déjà aux mains des islamistes, bien avant l'entrée de l'EI dans Mossoul, la grande ville du nord de l'Irak, et dans d'autres secteurs sunnites du pays en juin 2014. Depuis, les jihadistes semblent poursuivre inexorablement leur avancée.

L’armée irakienne, qui a de son côté déclaré avoir également lancé une offensive pour reprendre la ville, est à la peine. Selon Wassim Nasr, journaliste à France 24 et spécialiste des mouvements jihadistes, "c'est faute de pouvoir compter sur les tribus sunnites locales".

>> À lire sur France 24 : "Falloujah : là où tout a commencé pour l'EI"

Pour ces tribus, la tâche s’annonce en effet des plus difficiles. "En 2007, ce sont précisément les clans sunnites de Ramadi qui avaient réussi à chasser ceux qui s'appelaient encore l'État islamique en Irak (EII) des villes", rappelle-t-il. "Mais à l’époque, les Américains les avaient soutenus financièrement et leur avaient fourni des armes. Ils leur avaient aussi promis qu'ils prendraient part au pouvoir." Autant de promesses qui les avaient motivés pour combattre les jihadistes.

Les tribus sunnites de Ramadi se sentent trahies par Bagdad

Aujourd’hui le contexte est tout autre. "Le gouvernement de l’époque, ainsi que tous ceux qui suivirent, n'ont pas tenu leurs engagements de faire participer au pouvoir les tribus sunnites. S'ajoutent aujourd'hui à ces promesses déçues la corruption endémique des institutions irakiennes et le retour des chiites – longtemps opprimés – sur le devant de la scène", analyse Wassim Nasr.

En décembre 2013, Bagdad avait réprimé dans le sang la contestation anti-gouvernementale à Ramadi. De quoi porter le ressentiment des sunnites de la région à son paroxysme. Lors de ces évènements, le pouvoir avait en outre arrêté et condamné à mort Ahmed al-Alwani, député de Ramadi et membre d’une tribu sunnite, connu pour son soutien aux manifestants anti-gouvernementaux. Son frère avait été tué par les forces irakiennes lors de l'opération. Autant d'éléments qui expliquent pourquoi les tribus sunnites, qui se sentent trahies par Bagdad, ne sont pas motivées pour combattre les jihadistes. Et qui font de Ramadi un terrain favorable à l'EI.

Et pourtant, des hommes des tribus sunnites de la région cherchent à se battre, mais manquent d'armes. Le chef du conseil provincial de l'Anbar, Sabah Karhout, a appelé le Premier ministre, Haïdar al-Abadi, pour lui demander de dépêcher d'urgence des renforts militaires et du matériel, expliquant que ses combattants allaient être à court de munitions. Mais Bagdad rechigne à leur fournir les armes ou l'aide américaine. "Le pouvoir irakien ne leur fait pas confiance : en effet, beaucoup de jeunes des tribus sunnites, poussés par la frustration se battent désormais dans les rangs des jihadistes", conclut Wassim Nasr.