Difficile de comprendre le soulèvement des Burkinabè, qui a conduit à l’éviction du président Blaise Compaoré en octobre 2014, sans évoquer Thomas Sankara. À six mois des prochaines élections présidentielles, prévues en octobre, la jeunesse se veut être la digne héritière de celui qui a longtemps été surnommé "le Che Guevara africain". Reportage sur place de notre reporter Julien Sauvaget.
À six mois des élections présidentielles, l’ombre de l’ex-chef d’État Thomas Sankara plane plus que jamais sur le Burkina Faso. Le "Che Guevara africain" a laissé une trace indélibile dans les esprits, même les plus jeunes. Pourtant la plupart d'entre eux n'étaient pas nés en 1987, quand il fut assassiné. Pour eux, qu’importe si Thomas Sankara fut aussi un dictateur sans pitié qui fit assassiner ses opposants et réprima ceux qui doutaient de sa révolution.
Arrivé au pouvoir en 1983 sur un coup d’État, Thomas Sankara impose sa révolution à tous les niveaux. Sous sa férule, la Haute-Volta, nom donné par les colons français à cette région, devient le Burkina Faso, le pays des hommes intègres. Plus qu’un nom, un étendard. Les salaires des ministres sont baissés. Les berlines du gouvernement sont remplacées par des Renault 5. Le Burkina Faso est un pays pauvre, et Thomas Sankara refuse de mener un train de vie dispendieux. Il veut montrer l’exemple et se construit l’image d’un homme intègre, dévoué au peuple, luttant sans relâche pour l’indépendance et l'auto-suffisance de son pays.
>> À voir sur France 24 : "Il faut qu'une enquête sérieuse soit menée" sur l'assassinat de Sankara
Cet anti-impérialisme, Thomas Sankara finira par le payer de sa vie, victime à son tour d’un coup d’État, en 1987, fomenté par son meilleur ami, Blaise Compaoré. Véritable tragédie grecque, cette amitié qui se termine dans le sang ternira durablement la présidence du nouveau maître de Ouagadougou.
>> À lire sur France 24 : "Retrait des ministres pro-Compaoré du processus de transition burkinabé"
Mais Blaise Compaoré, qui a été poussé hors du pouvoir par la rue fin octobre, n’a pas réussi à tuer le mythe. Bien au contraire. La jeunesse du pays s’empare de l’image de Thomas Sankara, écoute en boucle ses rares discours enregistrés, s’échange sous le manteau des t-shirts à son effigie.
La route sera longue et difficile, mais l’immense espoir qu’a fait naître ce printemps africain est à l’image de l’espoir qu’avait suscité en Afrique la prise de pouvoir de Thomas Sankara. Ce reportage de notre reporter Julien Sauvaget est l’histoire de cette génération avide de changement, pleine de vie et d’envie… Une génération qui a su provoquer son destin pour prendre en main son avenir. La génération Sankara.