Pour Rome, il ne s’agit de rien de moins que d'"arrêter la progression du califat, qui est parvenu à 350 km de [ses] côtes". Et pour stopper l'organisation de l'État islamique, l’Italie est prête à mobiliser plusieurs milliers de militaires et à prendre la tête d’une coalition internationale contre les milices jihadistes en Libye, qui comprendrait "sûrement la France, le Royaume-Uni et l'Allemagne".

C’est en substance la déclaration choc du ministre italien de la Défense, Roberta Pinotti, dans un entretien publié dimanche 15 février dans le quotidien "Il Messagero". Le jour même, Rome annonçait la suspension des activités de son ambassade à Tripoli et le rapatriement "à titre provisoire" de son personnel.

"Si en Afghanistan nous avons envoyé jusqu'à 5 000 hommes, dans un pays comme la Libye qui nous concerne de bien plus près et où le risque de dégradation est bien plus préoccupant pour l'Italie, notre mission peut être significative et consistante, aussi en ce qui concerne les effectifs", a insisté la ministre de la Défense.

"Risque imminent"

"Nous en discutons depuis des mois, mais c'est devenu urgent", a-t-elle précisé, en affirmant que "toute décision sera prise au Parlement" et que son collègue des Affaires étrangères, Paolo Gentiloni, "fournira jeudi est informations et des évaluations".

"Le risque est imminent, on ne peut attendre au-delà. L'Italie a des exigences de défense nationale : ne pas voir un califat qui gouverne sur la côte d'en face. Mais nous voulons nous coordonner avec d'autres dans un système de légalité internationale".

"Nous devons être présents en Libye comme nous sommes intervenus en Irak aux côtés des très valeureux combattants kurdes", a-t-elle déclaré, sans préciser quel type d'intervention serait décidé.

Toute intervention militaire italienne en Libye serait cependant délicate sur le plan symbolique car le pays a été colonisé par l’Italie entre 1911 et 1947. Le spécialiste des mouvements jihadistes à RFI, David Thomson, a ainsi noté dans un tweet qu’une intervention militaire italienne permettrait aux combattants jihadistes sur place de s’inscrire dans la continuité des mouvements qui ont combattu pour l’indépendance libyenne au lendemain de la Seconde Guerre mondiale.

Selon "Il Messaggero", l’organisation de l’État islamique (EI) a d'ailleurs déjà récupéré les propos de la ministre italienne de la Défense pour sa propagande interne. La radio des jihadistes, qui diffuse via Internet depuis son fief de Mossoul, en Irak, a retranmis l’intégralité des propos de Roberta Pinotti en affublant la responsable italienne du titre de "ministre de la Croisade".

Avec AFP