Quand un de ses clients veut avoir des relations sexuelles tarifées avec une jeune fille noire, Dominique Alderweireld fait de son mieux pour satisfaire ses désirs : "On a un client qui veut baiser une négresse. Y a une négresse ?" Ce sont là ses propos, rapportés jeudi 5 février par le président du tribunal correctionnel de Lille. Dodo la saumure s’explique en soulignant son sens prononcé de l’humour et de la dérision, que semblent d’ailleurs illustrer les blagues, de plus ou moins bon goût, qu’il n’a cessé de faire pendant l’audience.

Lors du quatrième jour du procès Carlton, le rôle joué par ce proxénète notoire dans l’organisation de parties fines avec Dominique Strauss-Kahn en France a été examiné par le tribunal en l’absence de l’ancien directeur du FMI à l’audience.

Accusé de proxénétisme aggravé en réunion, l’homme âgé de 66 ans est "ami depuis plus de 45 ans" avec René Kojfer, ancien responsable des relations publiques de l’hôtel Carlton à Lille, l’un des personnages-clés de l’affaire. Dans le dossier du Carlton, Dodo la saumure - gérants de maisons closes en Belgique où la législation sur la question est plus tolérante qu'en France - est considéré comme le plus gros fournisseur de "filles" qui ont alimenté des soirées organisées notamment par son ancien et fidèle compagnon, qu’il surnomme désormais "Juda" ou "M. 3 minutes".

"M. Kojfer ne m’a pas attendu pour connaître les prostituées", se défend-il. "Je n’ai jamais influencé personne pour que les filles se rendent au Carlton ou dans d’autres établissements. Cela n’aurait d’ailleurs pas été dans mon intérêt", assure celui qui a été condamné par deux fois pour proxénétisme en France, en 1995 et 1999. Selon l’intéressé, "ses" travailleuses "indépendantes" sont libres.

"Dodo a téléphoné, il faut trois filles pour Lille"

Pourtant, à la barre, la prostituée "Jade", employée à l’époque dans un établissement dirigé par "Dodo" et sa compagne Béatrice Legrain en Belgique, raconte une toute autre version. "Parfois, Sofia (une responsable d’un établissement de Dodo, NDLR) disait ‘Dodo a téléphoné, il faut trois filles pour Lille.’ De toute façon, c’était Dodo ou René (qui sollicitait les filles, NDLR), je n’y ai jamais été de mon propre chef", explique-t-elle.

L’ancienne prostituée, en pleurs, raconte qu’elle préférait alors se rendre à Lille, une "porte de sortie" pour elle, plutôt qu’exercer dans les établissements belges, où règnent violence verbale et pression. "Aller au Carlton c’était une récréation. C’était sympa, les gens étaient gentils", se souvient-elle, en précisant que les rencontres se déroulaient dans un appartement situé non loin de l’hôtel et non pas dans l’hôtel même.

"Jade", qui parle de "Dodo" comme de son "patron", affirme également s’être rendue dans un restaurant italien à Lille. "Plusieurs filles venaient de Belgique sur commande de René (Kojfer, NDLR)", se souvient-elle, notant que ces rencontres étaient bien organisées. "J’étais payée à mon retour de Lille, au "Club Madame" (l’un des établissements de Dodo la saumure, NDLR). Il y a juste eu une seule fois où c’est René qui m’a rémunérée."

De son côté, Béatrice Legrain, responsable du "Club Madame", nie tout en bloc. "Je ne savais pas qu’il y avait des filles qui allaient au Carlton", dit-elle.

L’air décontracté, Dodo la saumure tente pour sa part de tirer profit de cette mauvaise publicité. Après avoir attisé la colère de l’ancien ministre socialiste en nommant l’un de ses établissements, aujourd’hui fermé, le "DSK" pour "Dodo Sex Klub", le sexagénaire ne compte pas s’arrêter là. "J’ai pour projet d’ouvrir ‘le FMI’ et le ‘7 sur 7’", annonce-t-il, amusé. "J’avais aussi pensé au 'Carlton' mais j'ai abandonné l’idée." En fin d’audition, il ajoute, plus sérieusement : "Mes établissements ne sont pas aussi luxueux que le Carlton."

Les audiences dans l’affaire du Carlton se poursuivront jusqu’au 20 février au moins. DSK comparaîtra à partir du mardi 10 février.