La Cour suprême de Russie a refusé mercredi de dissoudre Memorial, une ONG de défense des droits de l’Homme. Créée par des dissidents, dont Andreï Sakharov, l’organisation est depuis plus de 25 ans un caillou dans la chaussure de Moscou.
La dissolution de Memorial n’aura pas lieu : la Cour suprême de justice de Russie a refusé mercredi 28 janvier de se prononcer en ce sens, rejetant ainsi un recours intenté par le ministère russe de la Justice.
Symbole de la lutte pour la défense des droits de l'Homme en Russie, Memorial va donc pouvoir continuer son œuvre débutée il y a plus de 25 ans. Autrefois en URSS, aujourd’hui en Russie, l’organisation créée par des dissidents, dont le prix Nobel de la Paix Andreï Sakharov, se bat pour que soient reconnus par la justice les manquements de l’État aux droits humains.
Depuis l’arrivée de Vladimir Poutine, au poste de Premier ministre puis à la tête de l’État, elle multiplie les mises en garde et dénonciations. Tchétchénie, Caucase, Ukraine : l'homme fort du Kremlin ne lésine pas sur les cas d'infractions aux droits.
Mal aimée du pouvoir, l'ONG avait été accusée fin octobre de "violations flagrantes et répétées de la législation et de la Constitution russes". Elle avait alors modifié sa charte et sa structure pour se mettre en conformité avec la loi.
Le ministère de la Justice a reconnu mercredi que l'organisation avait "rectifié toutes les violations" qui lui étaient imputées, sans toutefois retirer son recours sur la dissolution de Memorial.
"Je suis très contente de la décision" de la Cour suprême, a réagi la déléguée pour les droits de l'Homme auprès du Kremlin, Ella Pamfilova. "J'espère que cette organisation de défense des droits de l'Homme, la plus ancienne [de Russie], poursuivra ses activités", a-t-elle déclaré, citée par l'agence Interfax.
"Agent de l'étranger"
Pour les membres de Memorial, le combat pour les droits de l’Homme peut continuer mais la bataille juridique est loin d’être finie. La justice russe a imposé à l'ONG de s'enregistrer en tant qu'"agent de l'étranger", une dénomination datant de l'époque soviétique qui désigne depuis l'année dernière les organisations bénéficiant d'un financement en provenance de l'étranger et ayant "une activité politique".
L'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) a d’ailleurs exprimé de "sérieuses craintes" concernant ce statut. "Memorial et les autres groupes similaires doivent pouvoir jouer librement leur rôle vital de défense des droits" de l'Homme, a estimé Michael Georg Link, directeur du bureau des droits de l'Homme de l'OSCE.
L'ONG était entrée en 2013 dans le collimateur du ministère de la Justice, qui lui reprochait sa structure "en parapluie", lui permettant d'avoir sous sa tutelle une cinquantaine de groupes de défense des droits de l'Homme. Ils ont depuis été transformés en antennes régionales d’une seule et même organisation.
Avec AFP